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Démêler le vrai du faux sur la santé : les yeux sont bien les fenêtres de l'esprit
©Pixabay

Bonnes feuilles

Dans son Dictionnaire des idées reçues, Gustave Flaubert écrivait : "Hoquet : Pour le guérir, une clef dans le dos ou une peur". Plus de cent ans après, la littérature scientifique médicale confirme : la peur est bien un moyen de faire passer le hoquet. Mais combien de ces idées communes ont un fondement scientifique ? Démêler le vrai du faux : tel est l’objectif de Jacques Belghiti, professeur de médecine, et Annette Vezin, journaliste et curieuse professionnelle, dans un livre qui met à l’épreuve des données de la recherche plus de 200 idées reçues. Extrait de "Tant qu'on a la santé" de Jacques Belghiti et Annette Vezin, aux éditions Fayard (1/2)

Annette Vezin

Annette Vezin

 Annette Vezin est journaliste.

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Jacques Belghiti

Jacques Belghiti

Jacques Belghiti, professeur de chirurgie digestive à l’Université Paris Diderot est aujourd’hui membre du collège de la Haute Autorité de santé. 

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Les yeux bleus sont plus fragiles : faux

Jean Gabin aurait-­il dit à Michèle Morgan "T’as de beaux yeux tu sais ?" si ses yeux avaient été marron ? Un grand blond aux yeux bleus ou une belle (forcément) blonde aux yeux bleus, qui dit mieux ? Les petits bruns aux yeux marron se sont longtemps consolés en pensant que les yeux bleus étaient plus fragiles. Erreur.

L’iris, qui est la partie colorée de l’œil, se compose de plusieurs couches de pigments. L’iris clair contient effectivement moins de pigments que l’iris foncé et absorbe moins de rayons lumineux, mais ce n’est qu’un phénomène de surface. Car la seconde couche de pigments est complètement opaque, quelle que soit la couleur des yeux. Il n’y a que l’absence totale de pigments dans les deux couches de l’iris, dans les cas extrêmes d’albinisme, qui provoque des troubles de la vision. Avoir les yeux clairs ne prédispose donc pas aux maladies ou aux problèmes oculaires.

Une récente étude montrerait même qu’il y a un risque accru de cataracte avec les iris foncés. Alors, d’où vient cette idée de la fragilité des yeux bleus ? Sans doute de l’association fréquente des yeux bleus au teint pâle qui est, par contre, un facteur de sensibilité aux UV et de risque de cancer de la peau. Les yeux marron trouveront-­ils une nouvelle consolation dans cette étude tchèque montrant qu’ils inspirent davantage confiance que les yeux bleus ? Un raisonnement que ne per‑ suade pas les candidats au laser, qui sont prêts à débourser plus de 5000 euros pour changer la couleur de leurs yeux, en dépit de risques non négligeables : inflammation, cataracte mais aussi glaucome ou perte de la vue. Fragiles ou pas, bleus, verts, gris ou marron, pour mettre tout le monde d’accord, les ophtalmologues recommandent à tous de se protéger du soleil en portant des lunettes.

Les yeux sont les fenêtres de l’esprit : vrai

Enregistrer le mouvement des yeux de touristes devant un tableau et déceler leur personnalité, pour Julien Prévieux, jeune artiste contemporain exposé au Centre Pompidou en 2015, cet exercice est devenu œuvre d’art.

On savait que les yeux en disaient long sur la pensée. Chez les animaux, les grands singes utilisent le regard pour communiquer leur disponibilité sexuelle, leur agressivité ou leur soumission. Et la capacité à comprendre la signification d’un regard direct ou dévié aurait été retrouvée chez des animaux comme les iguanes, les poussins et les serpents. Chez les hommes, le phénomène est encore plus spectaculaire. Le bébé observe très tôt le regard de sa mère et sa capacité à suivre un objet qu’elle regarde est un signe d’apprentissage partagé. Plus étonnant encore, le regard peut aussi révéler des choix politiques.

Des chercheurs italiens de l’Université de Rome ont montré à des sujets, recrutés selon leurs affinités politiques, une image avec des portraits d’hommes poli‑ tiques. Ils leur ont demandé de suivre des yeux une flèche sur cette image. Les sujets situés politiquement à droite suivaient automatiquement la direction du regard de Silvio Berlusconi et ignoraient complètement l’autre visage, celui de l’homme politique de gauche. Comme une empreinte digitale, le regard pourrait bien se révéler être un signe particulier de chaque individu. Lorsqu’on présente une même photo à plusieurs personnes, chacune a une façon spécifique de l’explorer avec différents mouvements oculaires. Un an plus tard, devant la même photo, ils reproduisent exactement les mêmes mouvements. L’exploration visuelle serait donc stable dans le temps. De là à penser qu’il serait possible d’identifier une personne juste en analysant sa façon de regarder quelque chose, il n’y a qu’un clin d’œil.

Les yeux s’abîment avec une mauvaise lumière ou un écran trop proche : faux

Allume la lumière, tu t’abîmes les yeux ! Ne te colle pas à la télévision (ou à l’ordinateur), tu vas devenir myope ! Bonne nouvelle pour les parents d’enfants qui lisent sous la couette ou regardent de trop près la télévision, ils peuvent économiser leur salive et s’épargner de répéter dix fois par jour ces propos alarmistes. Avec une lumière insuffisante, les yeux font un effort supplémentaire, mais sans conséquence néfaste. Mieux, la pénombre permet de diminuer le nombre de clignements des yeux. Si la vision des jeunes Français –  et plus encore des jeunes dans les grandes villes d’Asie, comme le montre l’étude publiée en 2012 dans The Lancet – ne s’améliore pas, les raisons en sont multiples. Plus que la lumière ou la trop grande proximité avec l’écran, c’est l’hérédité qui vient en tête, associée à un mode de vie privilégiant la lecture et les écrans en tous genres, tablette, ordinateur et télévision.

Selon Médiamétrie, de quatre à quatorze ans, les enfants regardent la télévision 2 heures 15 par jour en moyenne et, selon l’enquête européenne EU Kids, les neuf-­seize ans passent en moyenne 2 heures par jour sur Internet. Ce qui, conjugué au temps scolaire et dans les transports, laisse peu de temps dans la journée pour vivre à la lumière du jour et porter son regard au loin, deux facteurs aujourd’hui démontrés comme très bénéfiques pour la vision. Seulement 40 minutes d’activité de plein air par jour auraient permis de diminuer très sensiblement, en trois ans, le taux de myopie chez des enfants de six ans à Guangzhou, en Chine.  Alors, plutôt que de faire la guerre à la lumière insuffisante ou à l’écran trop proche, mieux vaut envoyer les enfants jouer dehors et regarder au loin.

Extrait de "Tant qu'on a la santé" de Jacques Belghiti et Annette Vezin, publié aux éditions FayardPour acheter ce livre, cliquez ici

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