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Téléphone, pyjama, serviettes… Etes-vous vraiment sûr que vous lavez les objets et vêtements du quotidien aussi souvent que vous devriez ?
©Flickr/Racineur

Grand ménage

Lavez-vous régulièrement votre téléphone (que l'on touche 150 fois par jour) ? Votre clavier d'ordinateur (5 fois plus sale qu'un siège de toilette) ? Et vos draps, véritables nids de peaux mortes et d'acariens? Voici un petit guide pratique pour avoir une hygiène irréprochable.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Atlantico : Quels risques à ne pas les laver régulièrement (maladie infectieuse, allergie, désagréments) ?         

Stéphane Gayet : Les microorganismes (virus, bactéries, microchampignons et microarthropodes) font partie de notre vie : ils sont omniprésents dans notre environnement immédiat et même sur notre peau et nos muqueuses. Ce monde immense et invisible ne doit pas être perçu comme une menace systématique pour notre santé. Certes, quand on évoque les « microbes » (terme du langage courant correspondant à celui de microrganismes), on a le plus souvent à l’esprit les agents infectieux, c’est-à-dire les microorganismes pathogènes, ceux qui déterminent des maladies telles que la grippe, la tuberculose, le sida, la méningite, l’hépatite B ou encore la fièvre Ebola. Mais il s’agit là d’une vision déformée de ce monde infiniment petit. Bien sûr, il y a les microorganismes pathogènes et l’on a tout à fait raison de s’en méfier, car ils frappent les plus vulnérables d’entre nous et parfois de façon mortelle ; mais ils ne constituent en réalité qu’une toute petite fraction de l’ensemble.

L’attitude la plus judicieuse et raisonnable, vis-à-vis de ce risque microbien quotidien, consiste à le gérer en raisonnant à partir de tout ce que nous savons et en restant pragmatique. Il s’agit par conséquent de distinguer les objets en fonction de leur caractère lisse (matière plastique dure) ou poreux (pièce de linge), de leur utilisation par une seule personne ou différentes personnes qui se succèdent, de la partie du corps avec laquelle ils sont en contact (la main, l’avant-bras, le visage, le corps), de la nature de ce contact (direct ou par l’intermédiaire d’un vêtement ou d’une chaussure) et enfin de la fréquence avec laquelle ils sont en contact avec nous.

En termes de nature des risques représentés par tous ces objets potentiellement contaminés par différents microorganismes, il s’agit essentiellement de risques infectieux. Mais à vouloir trop en faire, par exemple en désinfectant de façon très fréquente des objets manipulés, on peut déplacer le risque et le transformer en risque allergique voire toxique eu égard aux désinfectants appliqués et par définition non rincés.

En matière de gestion des risques, il y a toujours une part de subjectivité, d’évaluation personnelle des risques, en fonction de la façon dont nous les percevons. Par ailleurs, les risques sont fluctuants au cours du temps : en période d’épidémie d’infections virales respiratoires et gastro-intestinales, le niveau de risque est bien plus élevé que le reste de l’année.

Il y a également une alternative à la décontamination ou désinfection très fréquente, c’est l’attitude qui consiste à éviter de contaminer un objet ou de se contaminer à partir de lui.

A quelle fréquence doit-on les nettoyer ?        

Les propositions que nous avançons sont forcément teintées d’empirisme et de subjectivité, on l’aura compris. Elles ne sont qu’un guide que chacune et chacun adapteront en fonction de sa propre perception et de son contexte personnel.

Notre téléphone

On le touche en moyenne 150 fois par jour, c'est un véritable vecteur de bactéries.

Un nettoyage décontaminant quotidien semble une mesure utile et applicable. Mais l’opération est peu délicate compte tenu de la fragilité des composants électroniques.

La télécommande

Cet objet, quotidiennement manipulée, est pourtant un objet très rarement nettoyé. Or, elle peut être porteuse de nombreuses bactéries, et même être vecteur de maladies lorsqu’une personne malade y a touché avant vous ?

Il est préférable d’éviter sa contamination quand on le peut, en insistant sur la nécessité de la manipuler avec des mains propres et en l’entourant d’un film alimentaire que l’on remplace fréquemment. Le caractère délicat de l’opération est semblable à celui du téléphone.

Un nettoyage décontaminant quotidien paraît déjà bien.

Le clavier de notre ordinateur

Ce clavier est bien sûr contaminé par les doigts qui sont le reflet de la propreté de la personne. Le nettoyage décontaminant de cet objet est tout aussi délicat voire davantage que celui du téléphone et de la télécommande. La formule du film alimentaire ou d’une protection spéciale pour clavier peut être utilisée, c’est même une bonne solution. Attention à ne pas laisser couler de liquide dans les interstices, c’est vraiment préjudiciable.

Une fréquence d’une fois par jour paraît à aussi raisonnable.

Nos draps 

Les risques sont ici très différents, puisque les draps sont utilisés quotidiennement par la même personne, du moins dans la plupart des cas… Des draps en place depuis longtemps représentent un inconfort et sont très chargés en acariens (microarthropodes) et en moisissures (microchampignons), mais aussi en bactéries. Attention là aussi à ne pas déplacer le risque allergique (acariens) en risque toxique ou allergique d’autre nature (produits lessiviels : importance de la qualité du rinçage).

Un lavage une fois par semaine est une fréquence raisonnable.

La serviette de toilette

Comme pour les draps et la taie d’oreiller, quand c’est propre, c’est agréable, mais il s’agit là de confort. La serviette de toilette ne doit pas rester humide, l’humidité favorisant la persistance et la prolifération des bactéries, moisissures et acariens. Comme pour les essuie-mains, il est nettement préférable de les individualiser (chacun la sienne). Un changement chaque semaine est une fréquence qui paraît raisonnable là encore.

Notre oreiller

Laver la taie ne suffit pas étant donné la présence d'acariens, de microbes, de peau morte, de virus (grippe, hépatites, varicelle).

Le risque est surtout allergique avec les acariens, ces microarthropodes qui empoisonnent l’existence des personnes ayant une allergie à la poussière de maison, mais qui agressent également ceux qui ne sont pas connus comme allergiques.

Il n’est pas conseillé de se lancer dans le lavage d’un oreiller : il vaut mieux le remplacer, cela une à deux fois par an.

Le jean

La question du lavage des vêtements est également délicate : évidemment, cela consomme de l’eau, de l’énergie et contribue à charger les effluents en détergents qui sont dangereux pour l’environnement. Le lavage use aussi les vêtements et contribue à les ternir, les décolorer.

Ne pas laver ses vêtements fait que tôt ou tard ils vont émettre des mauvaises odeurs en raison du développement de bactéries et de moisissures productrices de gaz malodorants. Les pulvériser avec des sprays odorants comporte d’autres risques : toxique, allergique. Le lavage paraît quand même incontournable, mais un lavage à 40°C et avec très peu de détergent (la moitié de la dose préconisée par les fabricants) est la solution la plus satisfaisante.

Quant à la fréquence, il faut plutôt raisonner en termes de nombre de jours où l’on le porte ; mais cela dépend aussi de son aspect : la bonne mesure se situe probablement aux alentours de deux semaines, mais tellement de facteurs interviennent… que fixer un nombre est difficile.

Le soutien-gorge

Les sous-vêtements sont toujours des éponges à sueur et autres sécrétions cutanées. Les régions couvertes par les sous-vêtements sont souvent le siège d’une macération. Comme pour tous les vêtements, il faut compter le nombre jours où on les porte.

Le juste milieu se situe probablement entre deux et sept jours.

Le pyjama

Ceci est vrai pour les vêtements : certaines personnes transpirent beaucoup, d’autres peu ; certaines personnes se dépensent plus physiquement que les autres. Nous ne salissons pas tous notre linge à la même vitesse. Et puis il y a un autre facteur que nous n’avons pas évoqué, c’est la nature de la fibre textile : les fibres naturelles (coton, lin, soie, laine) sont à la fois plus absorbantes et plus fragiles aux lavages.

Pour le dire différemment, les sous-vêtements et pyjamas en coton sont plus agréables, mais conservent plus les microorganismes et les odeurs.

Le lavage d’un pyjama entre deux et sept jours paraît également une fréquence convenable.

Les torchons

Il est vrai qu’ils sont très contaminés et présentent une source de contamination importante dans la cuisine. Déjà parce qu’humides presque en permanence.

On peut proposer de les changer tous les deux jours à trois jours, voire plus si cela paraît indispensable en fonction de leur degré de salissure.

Le porte-monnaie et la carte bancaire

Il faut surtout avoir à l’esprit que ce sont des vecteurs potentiels. Faut-il rappeler que, lorsque l’on rentre chez soi, l’une des premières choses à faire est de se laver les mains pour éliminer une bonne partie des microorganismes que nous avons récoltés au long de la journée ? La décontamination de ces deux objets est bien difficile : cela dépend, pour le porte-monnaie, de sa composition. Ils doivent être perçus comme des objets contaminés et on doit veiller à s’en protéger

On peut proposer de les décontaminer toutes les semaines, mais avec quelle efficacité ?

Le sac à main

Dans certains pays, on apprend aux adolescentes à ne jamais poser leur sac à main sur le sol, par mesure de prévention. C’est une bonne attitude. En effet, et cela s’applique à tous les bagages, leur surface qui touche le sol récolte de nombreux microorganismes ainsi que des poussières et autres salissures.

Il est déjà préférable qu’il ne touche pas le sol ; ensuite, un nettoyage régulier, une fois par semaine par exemple, est une sage mesure.

Les boutons, interrupteurs et poignées de porte

Avec ces éléments, on aborde la question essentielle des vecteurs, tous ces objets à main touchés par de nombreuses personnes qui se succèdent dans le temps.

Leur nettoyage décontaminant est une nécessité et il faut le faire au moins une fois par jour.

Le paillasson

évidemment, nos semelles de chaussures sont fréquemment en contact avec des excréments d’animaux (chiens, rongeurs, oiseaux…) et elles récoltent fatalement des bactéries fécales. Mais le risque se gère en se déchaussant dès son entrée au domicile, c’est une mesure de prévention à recommander ; du reste, certains peuples comme les Japonais pratiquent cette mesure depuis fort longtemps. Il serait vain d’essayer de décontaminer un paillasson…

Comment bien laver tous ces objets ?      

Pour avoir une action désinfectante par la température, il faut au moins 60 °C. Ceci est vrai pour le lave-linge et le lave-vaisselle. Mais un lavage à 40 °C nettoie déjà bien et élimine beaucoup de microorganismes qui ne sont pas tués, mais partent avec l’eau de rinçage. Un nettoyeur à vapeur pourrait théoriquement permettre de décontaminer un paillasson, mais cela paraît excessif eu égard à la réalité du risque et aux autres moyens de le gérer. Concernant les objets à main qui le supportent, l’utilisation de lingettes nettoyantes et désinfectantes est une mesure commode et efficace, mais qui est tout de même coûteuse. On peut parfaitement prendre une feuille d’essuie-tout imprégnée d’alcool ménager, pur ou dilué à 50 % avec de l’eau en fonction de la fragilité de l’objet. Attention à utiliser un support (lingette ou essuie-tout) seulement légèrement humide, pour ne pas risquer d’abîmer les éléments électroniques fragiles (clavier, téléphone, télécommande).

Concernant le lavage en machine, diminuer la dose de détergent de moitié par rapport à celle préconisée par le fabricant et insister sur le rinçage à cause des risques d’irritation et de sensibilisation des produits lessiviels.

L’eau de Javel (solution liquide titrant à 2,6 % de chlore actif, par définition) est un très bon désinfectant quand elle est diluée au 1/10e ou au 1/5e en présence de salissures (il est préférable de nettoyer avant d’appliquer de l’eau de Javel diluée qui ne nettoie pas).

Pour conclure, il faut rester raisonnable et pragmatique. Ni une propreté et une désinfection obsessionnelles, ni un laisser-aller avec un raisonnement du type « Laissons faire la nature » ne sont des attitudes gagnantes. Il faut retenir que le risque infectieux est surtout représenté par les virus et qu’ils ne résistent en général pas très longtemps dans l’environnement, et que les risques allergiques sont surtout liés aux Acariens.

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