Shandong, Penglai... ces nouveaux vignobles chinois qui s'allient à la France pour créer de grands crus<!-- --> | Atlantico.fr
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Les plus célèbres marques de vin chinois, celles que les Occidentaux peuvent croiser dans un restaurant anglais ou à l’aéroport de Pékin, proviennent presque tous de Shandong.
Les plus célèbres marques de vin chinois, celles que les Occidentaux peuvent croiser dans un restaurant anglais ou à l’aéroport de Pékin, proviennent presque tous de Shandong.
©Reuters

Tchin Chine

La collaboration franco-chinoise a permis la création de grands vins. Aymeric Mantoux et Benoist Simmat reviennent sur ces procédés qui optimisent la qualité des grands crus. Extraits de "La guerre des vins" (1/2).

Aymeric Mantoux et Benoist Simmat

Aymeric Mantoux et Benoist Simmat

Aymeric Mantoux et Benoist Simmat sont tous deux journalistes. Ensemble, ils ont publié La guerre des vins chez Flammarion.

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Shandong est une province de l’est de la République populaire – à peu près trois cents kilomètres au sud-est de Pékin, sur la mer Jaune. Elle revêt une importance particulière dans l’imaginaire chinois. Il s’agit en effet du pays natal de Confucius, père du confucianisme, doctrine sociale officiellement abrogée, mais toujours unanimement observée. Shandong est aussi surnommé le « verger de la Chine » pour son climat particulièrement propice, et développe actuellement ce qui doit devenir le « Bordeaux chinois » : au nord-ouest de la province, sur la côte, est située un vignoble communément appelé « vignoble de Shandong ». Les plus célèbres marques de vin chinois, celles que les Occidentaux que nous sommes pourraient croiser dans un restaurant anglais ou à l’aéroport de Pékin – Changyu, Great Wall, Weilong – en proviennent.

Pour apprécier à sa juste valeur ce que peut être une collaboration franco-chinoise en matière de création d’un grand vin, nous nous rendons dans la ville balnéaire de Penglai, célèbre parce que tous les ans des constructions ou des villes entières apparaissent au large sous forme de mirage !

Penglai – plus généralement écrit « Yantai » – est l’épicentre du vignoble chinois et a déjà été officiellement baptisée par l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) « Ville internationale de la vigne et du vin » voici une vingtaine d’années. C’est ici que la famille Rothschild, propriétaire de Lafite, a décidé d’implanter son cousin chinois, avec pour objectif d’en faire le plus grand cru possible d’ici à 2015-2016. Une propriété de 25 hectares (puis le double dans un second temps) devant produire 120 000 bouteilles à terme.

Nous gagnons le site de Moulangou sur la « commune » de Daxindian, pour rencontrer Gérard Colin, grand, sympathique et costaud Bordelais, qui accepte bien volontiers d’expliquer les raisons de son implantation ici. « C’est en 2006 que Christophe Salin, PDG de Domaines Barons Philippe de Rothschild, m’a confié l’étude de ce projet. Nous avons choisi Penglai pour de multiples raisons économiques et touristiques.

Par exemple, la localisation du nouvel aéroport de Yantai se situera à vingt minutes de notre vignoble avec des liaisons rapides vers Pékin, Shanghai, Séoul ou Osaka, et nous pourrons aussi profiter d’une infrastructure routière importante, du port de Yantai, du tourisme balnéaire, car la ville est célèbre pour ses Huit Immortels… Cela nous a amenés à créer une co-entreprise avec le groupe local Citic, dont nous possédons 70 % du capital. Notre objectif est de produire un vin exprimant au mieux la diversité de ce terroir, un cru complexe et élégant, digne de la signature Rothschild. »

Pour élaborer ce futur « Lafite » Chinois – mais qui n’en est surtout pas une copie, insiste Gérard Colin –, les ingénieurs ont examiné à la loupe tous les critères géographiques (climat, exposition, types de sols, etc.) et ont bouleversé le terroir (40 000 tonnes de pierres extraites !) pour préparer celui-ci à faire son oeuvre. Comme à Pauillac, les équipes de Gérard Colin chercheront à récolter des raisins à parfaite maturité (majoritairement du cabernet-sauvignon), à ne sélectionner ensuite que les meilleurs, puis à les vinifier, évidemment en barrique, pour approcher cette complexité et cette suavité qui est la signature des grands bordeaux à travers le monde depuis deux siècles. L’idée est bel et bien de produire un grand cru de Shandong.

Bien entendu, confie le Français, le processus de création de ce vignoble hautement qualitatif a été jalonné d’obstacles : impossibilité de faire venir dans les temps l’intégralité du « matériel végétal » (les jeunes pousses de cépages français, venus d’Europe) ; difficulté à obtenir le droit d’exploiter des terres qui, in fine, demeurent propriété collective (de l’État) ; complications dues à l’organisation d’un processus de développement sur sept longues années, etc. Gérard Colin, qui vit onze mois sur douze en Chine, assure que le potentiel est considérable dans la République populaire de Chine contemporaine. Toutefois, il émet quelques doutes quant à l’avènement rapide d’une « Chine du vin ». Star des wine-makers français installés en République populaire, Colin retrouve parfois son portrait dans des plaquettes publicitaires de propriétés chinoises avec lesquelles il n’a jamais travaillé. Un exemple qui en dit long sur certaines façons de faire peu scrupuleuses dans l’empire du Milieu et qui sont de nature à susciter plus de méfiance que de confiance. C’est aussi Colon qui a épaulé les Hongkongais CK Chan (millionnaire du charbon dans le Shanxi) et sa fille Judy Leissner dans leur projet de grands vins… Ce même projet Grace Wineyard, dont le Chairman’s Reserve 2009 a été couronné de succès lors de la dégustation contée plus haut.

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Extrait de "La guerre des vins" chez Flammarion (5 septembre 2012)

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