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Rendre la dépense publique plus efficace : pourquoi l'apparente simplicité de la proposition de Nicolas Sarkozy masque un combat politique qui promettrait d'être homérique
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Programme économique

Nicolas Sarkozy a décidé de faire l'ascension de l'Himalaya par la face Nord. Non seulement il participe à une convention des Républicains sur la réforme de l'Etat, mais il fait le choix d'y prononcer un discours appelant à une diminution importante du nombre de fonctionnaires. D'aucuns pourraient y voir une véritable fuite en avant libérale, qui tranche avec le politiquement correct ambiant.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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La réforme de l'Etat, le sujet ingrat

On notera d'abord l'espèce de bravoure politique, de la part de Nicolas Sarkozy, à relever le gant de la réforme de l'Etat. Ce monstre du Loch Ness constitue en effet le sujet repoussoir par excellence. Quel électeur s'intéresse un tant soit peu à ces questions arides qui parlent toutes de tuyauterie administrative, alors que tant de postures sont infiniment plus "payantes" en terme électoral ?

Parlez de solidarité, d'immigration, de police, de justice, et les électeurs seront suspendus à vos lèvres. Parlez-leur d'économie budgétaire, de rationalisation des services administratifs, de décentralisation, de recentralisation, et ils décrochent automatiquement. Pour que Nicolas Sarkozy en fasse un thème de campagne, dans le cadre des primaires, il lui faut un estomac bien accroché, voire une forme d'inconscience politique.

Pourquoi les Français n'aiment pas la réforme de l'Etat

La réforme de l'Etat n'est pas seulement un sujet impopulaire à cause de l'ennui qu'il inspire. Une raison plus profonde éloigne cette question de la préoccupation politique des Français : la remise en cause de l'Etat est une ambition qui plaît toujours lorsqu'elle est générale, mais qui effraie lorsqu'elle devient particulière.

Demandez aux Français s'ils veulent moins d'impôts et de fonctionnaires, et ils vous disent forcément oui. Demandez-leur s'ils sont d'accord pour fermer le collège de 80 élèves situés à proximité de chez eux, la maternité dangereuse à dix minutes de leur village, le commissariat inutile dans leur chef-lieu de canton, et immédiatement ils sont prêts à descendre dans la rue pour protester contre ce diktat parisien qui remet en cause l'égalité sur le territoire de la République.

Tout le dilemme de la réforme de l'Etat est bien là. D'un côté, les Français n'aiment pas l'impôt. De l'autre, ils aiment la dépense publique, lorsqu'elle leur apporte un confort près de chez eux.

Sarkozy fait-il de la provocation ?

Sarkozy ne peut ignorer cette répugnance des Français à aborder les questions qui fâchent. Malgré cette évidence, le candidat à la primaire de la droite pousse le bouchon jusqu'à la provocation. Outre le fait qu'il propose 300 000 suppressions d'emploi par le non-remplacement des départs à la retraite, il n'hésite pas à proposer une harmonisation des régimes de retraite, à commencer par un rapprochement des âges de départ entre secteur public et secteur privé.

Pour le coup, le sujet de campagne est plutôt courageux, parce qu'il est d'intérêt général mais extrêmement impopulaire. Là encore, l'idée d'une parfaite égalité entre public et privé recueille toujours, sur le papier, un soutien massif. Mais que les infirmières commencent à réclamer des conditions spéciales de départ pour tenir compte de la pénibilité de leur métier, que les policiers, les gendarmes, les militaires, demandent des avantages en contrepartie des risques qu'ils prennent, et un sondage d'opinion ne tardera pas à montrer qu'ils sont soutenus par un nombre important de Français.

De ce point de vue, les propositions de Nicolas Sarkozy ne manquent pas de panache. Elles devraient confirmer les solides inimitiés que certaines de ses prises de position durant son mandat lui ont valu. Elles ont un mérite : elles répondent aux véritables sujets politiques et économiques du pays. Leur inconvénient consiste surtout à lui enlever une chance (de plus) d'être élu.

Quel bénéfice l'intérêt général peut-il en tirer ?

Au total, si la réforme de l'Etat est plus que jamais nécessaire, elle a très peu de chances d'aboutir, surtout avec un Nicolas Sarkozy dont la faible créativité de la RGPP a laissé des traces dans tous les services publics. Sarkozy estime les économies générées par ses 300 000 suppressions d'emplois à environ 7 milliards d'euros. Le calcul est un peu tordu.

En réalité, 300 000 suppressions d'emploi rapportent en principe environ 12 milliards d'euros. Si Nicolas Sarkozy minore cette somme à 7 milliards, c'est bien parce qu'il compte augmenter les fonctionnaires qui "restent" avec une partie des économies dégagées.

Cette recette adoptée durant la RGPP sous son mandat a, au passage, démontré toute son inutilité. Elle est en effet perçue comme une simple politique salariale sans lien direct avec les gains de productivité consentis dans les services.

C'est peut-être le problème de Nicolas Sarkozy : sa trop grande confiance dans les recettes utilisées sans succès en 2007.

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