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Remise en question plus que nécessaire : pourquoi il faut absolument arriver à financer la protection sociale sans taxer le travail
©Flickr

Bonnes feuilles

Ce livre bat en brèche le consensus qui règne sur le sujet du chômage. À force de se focaliser sur les rigidités du marché du travail et sur son coût, on oublie de poser des questions simples. Extrait de "Un avenir pour l'emploi, Sortir de l’économie administrée" de Bruno Coquet, aux Editions Odile Jacob (2/2).

Bruno Coquet

Bruno Coquet

Bruno Coquet est docteur en Economie, Président de UNO - Etudes & Conseil.

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La taxation du travail doit encore être réduite, car il est contre-productif de taxer le travail quand on veut créer des emplois. Chacun sait pourquoi et comment nous en sommes arrivés là, mais aujourd’hui il apparaît indispensable de faire autrement pour sortir de l’ornière. Il faut pour cela trouver des solutions qui n’augmentent pas les coûts unitaires de production, ni ne baissent les salaires.

L’horizon des politiques publiques de développement de l’emploi ne peut être que le déplacement de toutes les taxes qui pèsent sur le travail vers d’autres assiettes. Cet objectif pourrait être atteint en poussant à l’extrême les allégements de cotisations sociales, au point de stériliser l’ensemble du coût de la protection sociale qui pèse sur le travail ; ce dernier serait détaxé, et la protection sociale serait financée avec d’autres impôts (par exemple CSG, TVA, etc.).

Derrière ce déplacement d’assiette, la logique sous-jacente de course aux armements resterait cependant inchangée : d’un côté taxer plus pour financer des besoins élevés de protection sociale, de l’autre côté exonérer plus afin de limiter l’effet sur l’emploi de ces taxes. Plus de taxes et plus d’allégements à la fois : ce que l’on appelle le « coin fiscal » épaissirait, distordant un peu plus les incitations données aux individus et aux entreprises.

Cette manière de fiscaliser le financement de la protection sociale aurait un autre inconvénient : il affaiblirait sa contributivité, ce qui aurait pour effet de distendre un peu plus le lien entre le prix de la protection sociale d’une part, les garanties et prestations d’autre part. Cela ne va pas dans le sens des incitations souhaitables pour discipliner les assurés et maîtriser le coût de la protection sociale.

L’instrument unique des allégements de cotisations sociales a rendu service, mais si tant est qu’on le juge efficace pour créer des emplois, il souffre d’une limite indépassable : il ne peut pas traiter deux objectifs à la fois, coût du travail et coût de la protection sociale.

Ces nombreuses contradictions commandent de revenir à l’essence du problème : réduire le coût du travail implique d’abaisser soit le salaire, soit le coût de la protection sociale. Le choix constant a été de ne faire ni l’un ni l’autre : d’une part baisser les salaires, notamment le Smic, aurait eu pour effet d’augmenter le nombre de salariés ne pouvant vivre de leur salaire ; d’autre part les allégements de cotisations sociales patronales ont satisfait les employeurs en réduisant leurs charges, mais aussi les assurés sociaux dont la couverture sociale n’était pas remise en cause.

Les bas salaires étant insuffisants pour vivre, il est difficile d’arguer qu’ils sont trop élevés. Dès lors si le coût du travail est élevé en France ce ne peut être qu’en raison du coût de la protection sociale, ou parce que le financement de celle-ci est assuré par des taxes assises sur le travail.

C’est donc la clé. En agrégeant les cotisations patronales et salariales de Sécurité sociale, la protection sociale des salariés absorbe plus de 40 % de leur rémunération. Cette masse énorme n’a guère été remise en question, alors que son poids augmente continûment et qu’il pèse sur l’emploi : les réformes régulièrement mises en oeuvre infléchissent les dépenses de retraites et de santé, mais sans changer radicalement le coût de la protection sociale. Rien que sur les dépenses de santé plusieurs points de PIB sont en jeu : baisser le coût de la protection sociale ne veut pas seulement dire réduire les prestations contreparties des dépenses actuelles, mais aussi transformer une efficience accrue en baisse de prix, de manière à rendre du pouvoir d’achat aux Français, en particulier aux salariés.

Extrait de Un avenir pour l'emploi de Bruno Coquet, aux Editions Odile Jacob

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