Rapport de l’Ademe sur les énergies renouvelables : les obstacles à un mix électrique 100% renouvelable<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Science
Une étude de l'Ademe tire la conclusion que la France pourrait tirer son électricité uniquement des énergies renouvelables d'ici à 2050.
Une étude de l'Ademe tire la conclusion que la France pourrait tirer son électricité uniquement des énergies renouvelables d'ici à 2050.
©

Mauvais calculs

Une étude de l'Ademe tire la conclusion que la France pourrait tirer son électricité uniquement des énergies renouvelables d'ici à 2050, le tout pour le même prix qu'avec le nucléaire. Une conclusion qui omet de lourdes réalités économiques et techniques.

Rémy Prud'homme

Rémy Prud'homme

Rémy Prud'homme est professeur émérite à l'Université de Paris XII, il a fait ses études à HEC, à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques de l'Université de Paris, à l'Université Harvard, ainsi qu'à l'Institut d'Etudes Politique de Paris. 

Voir la bio »

Atlantico : Le rapport de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), conclut que d'ici 2050, la France pourrait tirer toute son énergie de ressources renouvelables (sans le nucléaire), le tout pour un coût semblable à celui de nucléaire. Que faut-il penser des chiffres avancés par ce rapport ? 

Rémy Prud'Homme : Notons qu'en 2014, selon la très officielle CRE (Commission de Régulation de l'Energie), le prix moyen d'achat aux producteurs est de 91 € pour l'éolien terrestre, de 217 € pour l'éolien en mer, et de 418 €  ​pour le photovoltaïque. Merci pour eux. Ces prix vont baisser, mais jusqu'où, c'est que personne ne sait exacxtement.Or le prix actuel d'achat de GDF du solaire ou de l'éolien est d'environ 200€ moyenne selon la commission de régulation de l'énergie. Le prix de l'éolien maritime est même au dessus de 200€,  le solaire est actuellement payé à 300€ en moyenne. Même si dans le futur on imagine que les prix vont baisser, on ne peut pas être certain.

Il est dit qu'on aura des moyens de stockage considérables, mais aujourd'hui on ne sait pas stocker de l'électricité en grande quantité.

Peut être que les scientifiques vont trouver la solution un jour, mais cela fait déjà un siècle qu'ils cherchent à stocker l'électricité en quantité industrielle. Tous miser sur le renouvelable intermittent sans pouvoir stocker de l'électricité en grande quantité c'est s'exposer à des coupures fréquentes.

Par exemple, la production d'électricité solaire un soir de pointe en hiver est nulle, car il n'y a pas de soleil ! On serait réduit à compter sur l'énergie éolienne, et là c'est le même problème s'il n'y pas de vent, il n'y a pas d'électricité. Sans capacité de stockage on risque de grandes coupures les soirs de pic électrique. En fait, au delà d'un certain point, plus de renouvelable, c'est plus de centrales thermiques polluantes pour pallier aux risques de coupure.

Selon l'étude, ces sources d'énergie se repartirait ainsi : 63 % d'éolien terrestre et en mer, 17 % de solaire, 13 % d'hydraulique et 7 % de thermique renouvelable (géothermie comprise). Dans quelle mesure ces chiffres sont-ils envisageables ? 

Détaillons ces chiffres :

63% d'éolien : actuellement seuls 3% de l'électricité utilisée est d'origine éolienne. Selon ce rapport, il faudrait donc multiplier ce pourcentage par 15. Or cela semble impossible au vu des problèmes que créer l'éolien. On a déjà des difficultés à trouver des endroits pour créer des sites éoliens, car les habitants et les responsables politiques n'en veulent pas, il y a eu une multiplication des procès ces dernières années, alors multiplier cette énergie par 15 cela semble déraisonnable.

De plus, il y a une question de coût, les sites les plus propices à l'éolien sont déjà utilisés. Donc si on multiplie les sites, on va se trouver avec des sites éoliens de moins en moins rentables car peu traversés par des courants venteux.

13% hydraulique : c'est actuellement le cas, mais personne n'envisage qu'on puisse en créer davantage, car tous les cours d'eau sont exploités pour l'énergie hydraulique, il n'y a plus de ressource possible de ce côté là.

17% de solaire : en France 1 à 2% de l'électricité est solaire, encore une fois il faudrait multiplier par 10! Cela coûterait des sommes extravagantes, il faudrait tout relier au réseau… Il n'existe aucun pays au monde où l'éolien et la photovoltaïque représentent plus de 25 % ou 30% de la production d'électricité. Il y a bien des pays, comme la Norvège ou la Suisse où les "renouvelables" assurent beaucoup plus. Mais l'essentiel de ces renouvelables consiste en bonne vieille électricité hydraulique.

Maintenir un parc nucléaire important semble très coûteux. Serait-il plus intéressant d'investir dans le renouvelable ? Pourquoi ? 

La remise à niveau des centrales nucléaires coûte en effet fort cher: environ 1 milliard par centrale. Mais rapporte beaucoup. Une centrale produit environ 10 millions de MWh par an, soit sur 20 ans 200 millions de MWh. 1000 millions d'euros pour produire 200 millions de MWh, cela fait 5 euros par MWh, pour des MWh qui seront disponibles lorsqu'on en aua besoin. A comparer aux 217 € par MWh du coût de l'éolien en mer, pour des MWh qui seront peut-être en vacances lorsqu'on en aura besoin. C'est ce qu'on appelle une bonne affaire.
* Cet article est une version corrigée du 14 avril. La version initiale faisait état d'un prix actuel du nucléaire à 91 euros par MegaWatt heure alors que ce chiffre fait référence au prix futur de l'électricité dans le rapport de l'Ademe. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !