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Qui sont les handicapés qui travaillent en France ?
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Bilan

La semaine pour l'emploi des personnes handicapées commence ce lundi à Toulouse. Selon la loi de 1987, toute entreprise de plus de 20 employés doit compter au moins 6% de travailleurs handicapés. 25 ans plus tard, où en est cette législation ?

Gwenaëlle Leray

Gwenaëlle Leray

Gwenaëlle Leray est juriste en droit, spécialisée dans l'insertion au travail. Elle est l'auteur de plusieurs essais dont « Le contrat de travail », « Droits du travail, droits des parents » (Gereso). Ses travaux sur « l'emploi et les travailleurs handicapés » sont d'ici peu republiés aux éditions Gereso
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Atlantico : Selon la loi de 1987, toute entreprise de plus de 20 employés doit compter au moins 6% de travailleurs handicapés. 25 ans plus tard, où en est cette législation ?

Gwenaëlle Leray : L'obligation légale d'emploi de travailleurs handicapés existe depuis les années 70 et a été régulièrement remaniée, précisée par le législateur, en particuliers en 1987, 2005, 2008. L'embauche des personnes handicapées, et le respect de cette obligation légale d'emploi est une priorité des différentes politiques d'emploi mises en œuvre aujourd'hui. Depuis 2008, les méthodes pour s'acquitter des quotas handicapés se sont diversifiées : si auparavant, le versement d'une contribution à l'AGEFIPH (structure aidant à l'insertion des handicapés NDLR) était la plus répandue, il existe maintenant de nouvelles dispositions légales mettant l'accent sur la sous-traitance ou sur la négociation entre syndicats de salariés et employeurs. En 2011, la loi du 28 juillet limite par un plafond la contribution Agefiph  possible et crée un montant minimun pour les contrats de sous-traitance afin de limiter ces contournements.

La législation ne semble pas répondre aux attentes, mais son objectif affiché est plus large : améliorer la prise en compte du handicap, et pas seulement dans le monde du travail. Par exemple, le Premier ministre a adressé aux ministres, le 4 septembre 2012, une circulaire interministérielle relative à la prise en compte du handicap dans tous les projets de loi. Le défenseur des droits chargé de la lutte contre les discriminations, qui a succédé à la Halde, peut également aider sur le terrain à dénoncer les entreprises qui contournent l’obligation d’emploi ou abusent des stagiaires handicapés.

Le travail en milieu ordinaire (que l'on oppose au "milieu protégé") semble être une solution porteuse et plus économique pour l'insertion des handicapés. Quels dispositifs (législatifs et structurels) existent actuellement ?

Distinguons d’abord le milieu ordinaire, c'est à dire le monde de l’entreprise,  et le milieu protégé : ce dernier est constitué d'établissements spécialisés chargés d'insertion professionnelle et sociale des personnes handicapées : les établissements ou service d’aide par le travail comme les ESAT (Etablissement ou Service d''Aide pour le Travail), accueillent des personnes handicapées dont les capacités de travail ne  permettent ni d'opérer dans une entreprise ordinaire ou dans une entreprise adaptée, ni d'exercer une activité professionnelle indépendante. Les entreprises adaptées (anciennement « ateliers protégés ») ou les centres de distribution de travail à domicile (CDTD) sont des entreprises du milieu ordinaire du travail, leur spécificité résidant dans le fait qu'elles emploient au moins 80 % de travailleurs handicapés et bénéficient d’aides spécifiques de l’Etat.

Les dispositifs législatifs et structurels existent depuis 2005, pour favoriser le travail en milieu ordinaire : A titre d’exemples législatifs, citons le principe d’égalité de traitement avec les autres salariés, en milieu ordinaire,  rappelé par la loi et les accords collectifs de travail. L’employeur a également l’obligation de prendre des mesures appropriées pour permettre aux personnes handicapées d'accéder à un emploi, une promotion, une formation, ou de conserver leur emploi. Les travailleurs handicapés sont aussi souvent un public prioritaire pour les contrats dits « aidés », c'est-à-dire assortis d'exonération de charges sociales. L'État peut aussi allouer à l'employeur une aide financière pour les charges supplémentaires d'encadrement et le paiement du salaire du travailleur handicapé, ou pour compenser la lourdeur du handicap évaluée en situation de travail.

En ce qui concerne les dispositifs structurels, il existe depuis 2005  les Maisons Départementales des personnes handicapées (MDPH), qui sont sensées être les lieux de ressources où la personne handicapée peut trouver un accompagnement social et professionnel. On peut toutefois regretter le manque de travail en partenariat, l’insuffisance des structures spécialisées et  l’absence de cohésion ou de complémentarité entre des dispositifs nationaux (branche invalidité de la Sécurité sociale) et les dispositifs locaux (MDPH, CARSAT, ARS etc.).

Des associations évoquent la mise en place de dispositifs fiscaux avantageux pour les entreprises qui jouent le jeu. Une législation incitative est elle plus efficace qu'une législation dissuasive ?

Les deux caractères (incitatif et dissuasif) sont nécessaires pour améliorer les chances d’emploi des travailleurs handicapés.  Et c’est déjà l’esprit de la loi dans ses régulières évolutions depuis 2005 : renforcer les sanctions des entreprises qui ne jouent pas le jeu, mais aussi donner plus de moyens aux différents acteurs institutionnels, sur le plan technique et financier et encourager une évolution des mentalités vers une meilleure insertion. Ainsi,  une loi du 28 juillet 2011 prévoit le renforcement de la coopération entre le Département, la Région et l’Etat, par le biais de conventions pluriannuelles d’objectifs et de moyens (financiers et techniques). L’Agefiph, cité plus haut, mène des actions de mobilisation auprès des entreprises et  a initié en 2010 une démarche évaluative de ces actions. Elle étudie au cas par cas les demandes de subventions en fonction de la situation individuelle du travailleur handicapé et des besoins réels de son employeur. En outre, les critères d’éligibilité peuvent varier d’une région à une autre, ces priorités répondant à des réalités régionales distinctes.

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