Quand la gauche se méfie tellement du succès individuel qu’elle en arrive à ne plus aimer le mérite<!-- --> | Atlantico.fr
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Le gouvernement a tenté de supprimer l’aide au mérite.
Le gouvernement a tenté de supprimer l’aide au mérite.
©REUTERS/Stephane Mahe

Editorial

Le gouvernement a tenté de supprimer en plein cœur de l’été l’aide au mérite attribuée aux meilleurs bacheliers, mais le Conseil d’État a décidé vendredi 17 octobre dernier de suspendre la circulaire.

Pierre Guyot

Pierre Guyot

Pierre Guyot est journaliste, producteur et réalisateur de documentaires. Il est l’un des fondateurs et actionnaires d’Atlantico.

 

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Pour toute une partie de la gauche, la simple évocation d’une réforme du régime d’assurance-chômage est une atteinte insupportable aux acquis sociaux. Etrangement, ces mêmes défenseurs des opprimés n’ont guère moufté lorsque le gouvernement a choisi de supprimer, discrètement puisqu’en plein cœur de l’été, l’aide au mérite attribuée aux meilleurs bacheliers.

Etrangement, parce cette aide octroyée aux lycéens ayant obtenu une mention "très bien" à l’examen du baccalauréat et aux meilleurs étudiants de master (bac+4) ne concerne que les jeunes boursiers qui assurément ont besoin de ce coup de pouce du pays pour pouvoir aller à la fac sans cumuler un job à temps plein à leurs études. Etrangement aussi, parce que cette aide d’un montant de 1 800 euros annuels, renouvelable pendant deux ans, concerne environ 7000 bacheliers chaque année et coûte donc 25 millions d’euros. La somme n’est certes pas négligeable mais ne pèse pas lourd face aux milliards d’euros d’économie que la France doit faire et apparait même ridicule face à bien des gabegies administratives. Etrangement encore, parce qu’un peu de cohérence ne fait jamais de mal et que ni la ministre de l’Education nationale Najat Vallaud-Belkacem, ni sa secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur et à la recherche, Geneviève Fioraso, n’ont semblé se souvenir que cette aide avait été créée il y a quinze ans sous le gouvernement Jospin. 

Heureusement l’histoire se termine bien (pour l’instant) : le Conseil d'Etat, saisi par une association de lycéens et d’étudiants boursiers, a décidé vendredi dernier de suspendre la circulaire du gouvernement. La plus haute juridiction administrative statuera définitivement plus tard. La date n’est pas encore fixée. En attendant, les meilleurs des bacheliers boursiers toucheront donc leur pécule qui leur permettra de payer leur chambre d’étudiant, les frais de transport pour aller à l’Université ou parfois même de se nourrir correctement.

Mais quelles peuvent bien être les motivations d’un gouvernement de gauche pour tenter de donner de tels coups de canifs au principe de la méritocratie républicaine ? Najat Vallaud-Belkacem estime que ce dispositif d’aide est "moins efficace" pour "la réussite du plus grand nombre" qu'une augmentation du nombre de boursiers. L’inefficacité de cette récompense de l’excellence n’est nullement démontrée, pas plus que les modalités du nouveau système de gratification envisagé n’ont été détaillées. Simplement une fois encore, entre les deux concepts qui constituent notre méritocratie républicaine - le mérite d’un côté et l’égalité des citoyens de l’autre - la bien-pensance a penché du côté d’un nivellement par le bas. Peu importe le constat que le système d’éducation à la française fonctionne de plus en plus mal. Peu importe que quarante ans après l’avènement du collège unique, l’Education nationale laisse chaque année 150 000 adolescents sortir du système scolaire sans aucun diplôme. Une partie de la gauche laisse sa méfiance du succès individuel la conduire à ne plus aimer le mérite.

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