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Prix du pétrole : la tentative d'alliance russo-saoudienne fait long feu
©MARWAN NAAMANI / AFP

OPEP

Objectif : rétablir le courant du pétrole sur un marché étouffé. Mais les conflits au sein de l'OPEP rendent, aujourd'hui, difficiles toutes discussions sur l'avenir de la production mondiale de l'or noir.

Stephan Silvestre

Stephan Silvestre

Stephan Silvestre est ingénieur en optique physique et docteur en sciences économiques. Il est professeur à la Paris School of Business, membre de la chaire des risques énergétiques.

Il est le co-auteur de Perspectives énergétiques (2013, Ellipses) et de Gaz naturel : la nouvelle donne ?(2016, PUF).

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Atlantico : Russie et Arabie saoudite semblent s'accorder sur leur volonté de faire "tout leur possible" pour réduire les stockos pétroliers, et ainsi provoquer une hausse des prix. Un tel accord a t il des chances d'être suivi d'effets ? Comment expliquer l'incapacité des pays producteurs à s'entendre efficacement depuis le début de la crise pétrolière ?

Stephan Sylvestre : Certes, l’Arabie Saoudite et la Russie se sont accordées sur un objectif commun, contenir la production en vue de soutenir le cours du baril. Cette entente produit un certain écho sur les marchés financiers, ces deux pays étant, de loin, les deux premiers exportateurs mondiaux de pétrole (respectivement 20% et 10% des exportations mondiales). Cependant, leur pari est loin d’être gagné. L’OPEP reste divisée et nombre de ses membres n’entendent pas réduire leur production, à commencer par l’Irak, l’Iran, le Nigeria, la Libye ou encore l’Algérie. Ces pays ont le sentiment que leurs efforts n’ont pas d’impact sur le marché et qu’il est préférable de produire et de livrer leur brut. Face à eux, les USA et le Canada sollicitent à plein leur outil de production en hydrocarbures non conventionnel. Dans la perspective d’une remontée des cours, les petits producteurs américains ont déjà réactivé les pompes. Il est donc peu probable que les stocks se dégonflent durant les prochains mois ; au mieux, ils se stabiliseront. 

Que pourrait permettre une coopération efficace entre les grands pays producteurs face au déséquilibre provoqué par les nouvelles productions américaines ? Les Etats Unis ont ils déjà gagné la partie, sur la base de la division des autres pays ?

Une coopération renforcée au sein de l’OPEP permettrait au mieux une limitation de la production des pays du Conseil de Coopération du Golfe (Arabie Saoudite, Koweït, Qatar, Bahreïn). Les autres pays resteront réticents à signer des réductions de quotas et à les respecter. C’est pourquoi l’Arabie Saoudite cherche à fédérer d’autres producteurs à sa politique. Mais pour le moment, seule la Russie a répondu à cet appel. À cet égard, les États-Unis ont indéniablement gagné l’actuelle bataille. En réduisant leurs importations depuis dix ans, ils ont attisé la concurrence entre les pays exportateurs, y compris au sein de l’OPEP. 

Dans le cas ou ou coopération voyait effectivement le jour, pourrait elle seulement être efficace ? Le poids des Etats Unis n'est il déjà pas trop important pour faire face ?

Les pays de l’OPEP se trouvent maintenant dans un piège : même s’ils s’entendaient pour bloquer leur production et faire remonter les prix, non seulement la production américaine repartirait à la hausse, mais en plus les pays non membres de l’OPEP en profiteraient pour capter des parts de marché. Pire, l’industrie américaine ne cesse de baisser ses coûts de production, ce qui lui permet de réagir de plus en plus tôt à la moindre remontée des cours. À plus long terme, les pays du Golfe et la Russie misent sur leurs importantes réserves pour regagner leurs parts de marché. Mais l’avenir est incertain : d’une part, les États-Unis, mais aussi les autres producteurs, pourront encore améliorer leurs technologies pour accroître encore leurs capacités de production, et d’autre part, la consommation mondiale pourrait commencer à se stabiliser durant la prochaine décennie. Le capital noir des pétromonarchie pourrait bien rester séquestré dans ses réservoirs. 

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