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Prime exceptionnelle de fin d’année : comment Emmanuel à Macron a (nettement) privilégié son électorat sans le vouloir
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Sondage

L’Ifop pour Salaire-Brut-En-Net.fr a interrogé les salariés du privé sur leurs salaires, leurs aspirations et l'impact de la "prime Macron". Et les résultats ne sont pas brillants (sauf si vous êtes un électeur de Macron).

François Kraus

François Kraus

François Kraus est Directeur des études politiques au département Opinion de l'Ifop.

 

 

 

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Atlantico : Votre sondage IFOP pour le site "salaire brut en net" (https://www.salaire-brut-en-net.fr/enquete-ifop-salaire/) révèle que la prime Macron n'aurait bénéficié qu'à une minorité de salariés. Quels sont les profils qui ont pu bénéficier de cette prime ? 

François Kraus : La première question est d’abord de savoir combien de personnes ont touché cette prime. On voit que l’on est loin d’être sur un dispositif qui a bénéficié à l’ensemble des Français puisqu’à peine 3 salariés d’entreprises sur 10 (publiques ou privées) ont touché cette prime, qui pouvait être versée jusqu’au 31 mars. L’intérêt de cette enquête était de faire un bilan et on voit que seuls 29% des salariés en ont bénéficié. On peut aussi expliquer ce chiffre par le fait que les personnes gagnant plus de trois SMIC nets ne pouvaient prétendre à cette prime. Pourtant, on voit dans cette enquête que ce ne sont pas les plus pauvres qui en ont bénéficié puisque ce sont plutôt les personnes qui touchent un salaire moyen / moyen élevé qui en ont profité (entre 1500 et 3000 euros nets par mois) alors que les personnes touchant un salaire net inférieur à 1500 euros n’en ont pas profité. Cela peut s’expliquer notamment parce qu’il s’agit, dans de nombreux cas, de contrats précaires qui ne sont pas forcément rattachés aux accords d’entreprises.

Une autre explication de ce phénomène est la taille des entreprises, on voit dans cette enquête que 38% des personnes employées dans les  grandes entreprises de plus de 500 salariés ont touché la prime alors que le chiffre tombe à 15% pour les PME ou les micro entreprises de moins de 10 personnes .

Comment juger du niveau de satisfaction des Français concernant leurs salaires ? Comment ce sentiment s'inscrit-il dans la crise politique que traverse le pays actuellement ? 

La question qui se pose au gouvernement est de savoir quels sont les leviers pour augmenter le pouvoir d’achat. Une des solutions que Emmanuel Macron souhaite mettre en avant est la pérennisation de la “prime Macron” qui tomberait chaque année. Avec un risque de cannibalisation, d’effet d’aubaine de la part des chefs d’entreprises qui renonceraient ou baisseraient les augmentations de salaires au profit de cette prime défiscalisée qui leur coûte peu. C’est un risque qui peut se produire dans un contexte de fort mécontentement des salariés du secteur privé au sens large à l’égard de leurs salaires. Parce que la majorité des salariés ne sont pas satisfaits de leurs salaires à l’heure actuelle. C’est un contexte de forte insatisfaction des Français qui s’inscrit dans un climat de stagnation des revenus. 55% des Français sont insatisfaits, et seul un quart d’entre eux a pu bénéficier d’une augmentation en ce début d’année 2019 (24%). Ce qui est peut être également la conséquence de la prime Macron. Cela ne reflète pas un marché de l’emploi qui serait en tension avec des entreprises qui rencontreraient des difficultés de recrutement. On retrouve ce schéma d’une polarisation de l’emploi en France, entre des cadres, des dirigeants salariés, des fonctions spécialisées, qui bénéficient d’augmentations alors que le reste de la population, et notamment les personnes peu diplômées sont fortement insatisfaites en termes de rémunération. On voit ici un clivage socio politique que l’on retrouve, entre les gagnants et les perdants de la mondialisation, entre les cadres des centres-villes, et les zones périurbaines avec les ouvriers et les chômeurs. Le mouvement des Gilets jaunes, qui est la cause de la mise en place de la prime Macron, montre le mécontentement global des Français à l’égard de leur pouvoir d’achat, et en premier lieu à l’égard de leur salaire.   

Comment ce clivage se diffuse-t-il au niveau politique ? 

C’est une variable lourde. On voit très clairement que le niveau de vie, et en premier lieu, le niveau de salaire est un critère fort du vote. L’électorat d’Emmanuel Macron représente ceux qui sont satisfaits à l’égard de leur niveau actuel de rémunération, alors que les électorats “proches”, comme le PS ou les LR seront plus partagés, tandis que les électorats extrêmes, France Insoumise et Rassemblement national, sont aussi ceux qui sont les plus mécontents. On voit que le salaire et le réussite professionnelle est un élément essentiel de la structuration des électorats en France.    

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