Pourquoi voter sert (parfois) à quelque chose : un département bien géré, ça existe, voilà à quoi ça ressemble <!-- --> | Atlantico.fr
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Le vote n'est pas inutile
Le vote n'est pas inutile
©Reuters

Bons et mauvais élèves

A quarante-huit heures du second tour des élections départementales, la question de la gestion des départements est d'actualité. Si les classements sur le sujet se sont multipliés ces dernières semaines, analyser les indicateurs déterminants peut permettre d'évaluer la bonne santé du territoire.

Michel Godet

Michel Godet

Michel Godet est économiste, professeur et membre de l'Académie des technologies.

Il est l'auteur de Le Courage du bon sens (Odile Jacob, 2009), Bonnes nouvelles des conspirateurs du futur (Odile Jacob, mars 2011), de La France des bonnes nouvelles (Odile Jacob, septembre 2012) et de Libérez l'emploi pour sauver les retraites (Odile Jacob, janvier 2014) Il anime également le site laprospective.fr.

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Atlantico : BFM Business a élaboré un classement reposant sur sept critères qui permettraient de savoir si un département est bien géré ou pas : dépenses de fonctionnement, de personnel, fiscalité, investissements, dépenses pour les collèges, pour les routes, et l’endettement. Que pensez-vous de ces indicateurs ?

Michel Godet : C'est un peu une ratatouille que l’on fait en mêlant ces indices… Il faut regarder de plus près chacun d'entre eux, les agréger n'a guère de sens. Par exemple, la dette peut être une bonne chose, à condition qu'elle ne soit pas démesurée par rapport aux moyens du territoire. Tout dépend de l'investissement que l'on cherche à financer et également de la qualité de l'emprunt qui ne doit pas être toxique, les Cours des comptes régionales devraient jouer là leur rôle. On pourrait même reprocher à certains territoires de ne s'être pas suffisamment endettés et donc de ne pas préparer l'avenir !

Le critère des dépenses de personnel n'est pas forcément pertinent car tout dépend du nombre de personnes âgés etc. Quant aux dépenses de fonctionnement, tout dépend de leur financement. Si elles sont financées par des impôts locaux trop élevés, il est certain qu'elles feront fuir les gens.

La fiscalité est le principal indicateur à prendre en compte pour expliquer la dynamique et l'attractivité des territoires.

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Quels critères sont à prendre en compte afin de déterminer la bonne gestion ou pas d'un département ?

Les résultats attendus sont souvent oubliés dans ces classements c'est-à-dire l'emploi et le chômage notamment. Les départements dans le grand ouest de la France ont le taux de chômage plus faible que dans le reste du pays et c'est aussi eux qui présentent les impôts locaux les plus faibles. On observe donc souvent que moins l'impôt est fort, moins le chômage est élevé. Ainsi le département de la Haute-Loire connait un taux de chômage faible et ses impôts ne sont pas les moins élevés. En Ille-et-Vilaine, où le taux de chômage se situe à 5%, on est "business friendly" comme on dit ; grâce à une fiscalité faible, le département est accueillant à l'égard des entreprises. Quand on taxe les entreprises, elles fuient donc chômage se développe. Et face au chômage, les besoins en action sociale augmente, ce qui nécessite plus de fonctionnaires. Le cercle peut-être vertueux ou vicieux. De ce point de vue Cosne-sur-Loire avec plus de 12% de chômeurs est l’opposé de Vitré : à force d’être trop taxées les entreprises sont parties.

Attention corrélation n'est pas causalité naturellement et ces phénomènes ne sont pas mécaniques. Il y a toujours des exceptions. Par exemple, en Savoie les impôts sont élevés et pourtant le taux de chômage n'est pas très fort. Un département peut connaitre un taux de chômage élevé et une création d'emplois forte. Par exemple, l'Hérault est très demandé en terme de mobilité géographique ; les individus obtiennent leur mutation, s'installent avec leur conjoint et cela peut faire un chômeur de plus.

Autre indicateur à prendre en compte : le taux de fécondité. Si le territoire est vieux, l'investissement du département sera faible. Dans un territoire qui se meurt, le seul entretien est celui des cimetières ! La dynamique démographique est essentielle. La Mayenne a le deuxième taux de fécondité de France. Le taux de construction des habitations n'est pas négligeable non plus. Les individus s'implantent et fondent une famille dans un territoire où ils se sentent bien.

Justement dans quels coins du pays les Français ont tendance à s'implanter ? 

La mobilité des Français est différente selon leur profil. Le choix d'implantation des retraités est d'ailleurs aussi un indicateur de l'attractivité des départements. La ville la plus vieille aujourd'hui est les Sables-d'Olonnes et non Menton. Le grand ouest attire et est abordable, le Pays Basque séduit aussi mais reste cher… Les Français moyens vont plutôt vers le grand ouest, les plus pauvres se dirigent vers le centre ou dans le massif central où le foncier est accessible. Et les plus riches s'installent dans le sud-est, en Provence. De manière générale, le nord est fécond, mais le sud se repeuple.

Comment déterminer qu'un département est bien géré ?

Vous l'aurez compris, le département idéal est attractif, comme la Vendée, son taux de chômage est faible. Les gens viennent s'y installer, la fiscalité n'est pas élevée et son taux de croissance est fort.

Les départements présentant des situations peu équivalentes, il serait plus judicieux, si l'on veut établir des classements, de concentrer l'analyse et les comparaisons sur la bonne gestion des communes par exemple.

Michel Godet s'appuie sur les données de l'Argus des départements de Contribuables Associés

Propos recueillis par Rachel Binhas

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