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Pourquoi le procès fait au Vatican par l'ONU ignore largement ce que Benoît XVI avait entrepris pour lutter contre la pédophilie
©Reuters

Faux procès

Le Comité des droits de l'enfant des Nations unies a enjoint le Vatican "de relever immédiatement de leur fonction toute personne suspectée d'abus sexuel et de déférer leur cas aux autorités judiciaires compétentes à des fins d'enquête et de poursuites", critiquant au passage l'attitude du Saint-Siège dans le passé.

Gérard Leclerc

Gérard Leclerc

Gérard Leclerc est un philosophe, journaliste et essayiste catholique. 

Il est éditorialiste de France catholique et de Radio Notre-Dame.

Il est l'auteur de l'Abécédaire du temps présent (chroniques de la modernité ambiante), (L'œuvre éditions, 2011). 

 

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Atlantico : Le comité des Nations unies sur les droits de l’enfant (CRC) a demandé au Vatican dans un rapport publié le 5 février de renvoyer immédiatement tous les membres du clergé coupables ou soupçonnés d’actes de pédophilie pour qu’ils comparaissent devant la justice. Le comité va jusqu’à accuser le Saint-Siège d’avoir violé la Convention aux droits de l’enfant, signée en 1990. Cette attaque de l’ONU est-elle raisonnable et justifiée ? Pourquoi ?

Gérard Leclerc : Cette attaque n’est pas justifiée, elle est même absurde, car il faudrait déjà savoir ce qu’est le Vatican. Il s’agit certes d’un État, mais les personnes qui relèvent de sa souveraineté ne sont que quelques centaines. Tous les catholiques du monde ne relèvent pas de la souveraineté du Vatican. Il est absurde de s’en prendre à ce dernier comme s’il exerçait un pouvoir judiciaire sur tous les catholiques.

Par ailleurs, lorsque dans les années 2000 les affaires de pédophilie ont surgi sur la scène médiatique et judiciaire, l’Église a été surprise, si ce n’est décontenancée, par ce phénomène nouveau. La question pédophile est apparue à cette période, ce qui ne veut pas dire pour autant qu’elle n’existait pas avant. Et comme par hasard l’Église a été la principale cible dans cette affaire. 

Ce document polémique de l’ONU n'est pas innocent, car il s'en prend à l’Église sur un sujet particulier, qui a déjà abondamment servi contre elle, mais pas contre d’autres institutions, dont la responsabilité est au moins aussi importante que la sienne. A titre d’exemple, des cas d’agressions sexuelles sont de plus en plus rapportés dans le monde sportif en France. Je sais de source judiciaire que toutes les catégories de la population sont représentées. Il est singulier de dénoncer uniquement les prêtres, puisqu'il s'agit d'une pathologie sociale largement répandue. De plus, la principale catégorie qui est en cause dans les questions d’atteintes sexuelles à l’enfance, est celle des familles. Alors pourquoi s'en est-on pris au clergé ? Car si on regarde les statistiques américaines, on s'aperçoit que le nombre d’agressions reprochées aux prêtres américains est quasiment insignifiant en pourcentage par rapport au total d’agressions comptabilisées. L’église catholique n’est pas indemne, certes, mais l'affaire est biaisée puisqu’elle n’est pas la principale concernée.

D’après le Vatican des mesures ont déjà été prises pour traiter les cas de pédophilie au sein de l’Église, notamment sous Benoît XVI. Quelles sont-elles, et sont-elles suffisantes ?

Les cas signalés à l'autorité ecclésiale sont systématiquement transmis à la justice civile. Il n’est plus question de dissimulation, mais de totale transparence. Tout "prédateur" est signalé, ce qui est un progrès. Si la hiérarchie catholique n’a pas réagi ainsi il y a 20 ans, c'est parce qu'elle a été surprise et décontenancée par le phénomène. Mais précisons que dans toutes les administrations, la même chose s’est produite, notamment au sein de l’Éducation nationale, où le phénomène a été considérable. L’Église a pris conscience de la gravité de la chose, il n’est aujourd’hui pas du tout question de chercher à soustraire les prêtres prédateurs sexuels à la justice civile.

Depuis Benoît XVI, les prêtre reconnus coupables sont irrémédiablement sanctionnés et exclus du sacerdoce. En France plus particulièrement, il est impossible qu'un prêtre reconnu par sa hiérarchie comme prédateur sexuel puisse garder sa fonction. Sous le pontificat de Benoît XVI, en 2011-2012 ce sont d’ailleurs environ 400 prêtres qui ont été révoqués.

"La pratique de la mobilité des auteurs de sévices a permis à de nombreux prêtres de rester en contact avec des enfants et de continuer à les abuser", a notamment déclaré le CRC. Est-ce à dire qu’une forte tendance à enfouir les affaires de pédophilie persiste encore aujourd’hui ?

Cela recouvre à mon sens une réalité ancienne. En ce qui concerne la France, les États-Unis ou l’Irlande, de tels cas de dissimulation ne sont aujourd’hui plus possibles. Il est largement permis de se montrer dubitatif quant au caractère objectif de ce genre de déclaration. Pourquoi est-ce toujours l’Église qui est ciblée, alors que le scandale est universel ? Certainement parce que, par définition, elle est une institution prescriptive de morale. Dès que son irréprochabilité est mise à mal, son magister moral est mis en cause. En ce sens, la vigilance est légitime, mais il est difficile en même temps de ne pas être interloqué par le caractère partisan et idéologique de l’initiative du CRC, qui participe d’une campagne menée contre l’Église catholique.

L’ONU, qui a utilisé des propos assez virulents, donne l’impression de ne pas traiter le Vatican comme un État à proprement parler. Peut-on parler à la fois de manque de respect, et d’ingérence ?

Le Saint-Siège a très bien répondu sur ce point : l'ONU se permet d'intervenir dans l'enseignement moral de l’Église, en décrétant qu’elle n’aurait pas la liberté – notamment sur l’IVG - d’avoir ses propres conceptions de la morale et de la vie en général.  Cela est très grave, car c'est un déni de liberté de conscience et de liberté religieuse. Au final l’Église est contestée dans son existence même.

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