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Pourquoi la super-terre découverte par les astronomes est moins intéressante en soi que les méthodes qui ont permis de la repérer
©L. Calçada / EUROPEAN SOUTHERN OBSERVATORY / AFP

nouvelle exoplanète k2-18B

Les astronomes l’ont découverte en allant dans les archives de Hubble et ont donc utilisé le data mining, une première dans le domaine de l’astronomie.

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy est spécialiste de l’astronautique et rédacteur en chef du site d’actualités spatiales de la Cité de l’espace à Toulouse.

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Atlantico : L’existence de l’exoplanete k2-18b vient d’être découverte. En quoi cette découverte est-elle significative ?

Olivier Sanguy : En fait, K2-18b a été découverte en 2015 par le télescope spatial Kepler de la NASA. La lettre K au début de K2-18b vient d’ailleurs de Kepler. Il faut bien comprendre qu’on ne dispose pas d’une image de cette exoplanète. Les visuels montrés sont des illustrations d’artiste. K2-18b, comme toutes les exoplanètres découvertes avec Kepler, a été détectée lorsqu’elle passait devant l’étoile autour de laquelle elle tourne, causant une baisse de luminosité de cette dernière. C’est ce qu’on appelle la méthode du transit.

Plus que la planète en elle-même  la manière dont les astronomes ont découvert son existence représenterait une avancée à part entière. Pourquoi? En quoi cette découverte diverge des précédentes ?


L’avancée n’est pas dans la découverte de l’exoplanète, mais plutôt dans celle de la présence de vapeur d’eau dans son atmosphère. Comment procède-t-on ? Avec le télescope spatial Hubble, la lumière de l’étoile filtrée par l’atmosphère de K2-18b a été analysée par spectroscopie. En gros on décompose la lumière en un arc-en-ciel et on détecte alors la signature des éléments présents dans l’atmosphère de l’exoplanète. Là encore, cette méthode n’est pas vraiment nouvelle puisqu’elle a été appliquée à d’autres exoplanètes. Ce qui est nouveau, est le fait que c’est la première exoplanète dont l’atmosphère comprend de la vapeur d’eau et qui en plus orbite dans la zone habitable de son étoile. Cette zone est la distance qui n’est ni trop loin et ni trop proche pour que l’eau liquide puisse exister à la surface si d’autres critères sont réunis comme l’existence d’une surface et une pression atmosphérique suffisante (critères que pour le moment on ne peut pas vérifier). Attention toutefois, il ne s’agit pas d’un monde comparable à la Terre. K2-18b est bien plus grosse, environ 8 fois : c’est donc soit une super-Terre, soit une mini-Neptune. De plus, son étoile est une naine rouge, différente de notre Soleil et elle émet beaucoup plus de radiations. Mais revenons à la nouveauté de la découverte. Tout d’abord, l’équipe du Center for Space Exochemistry Data à l’University College London au Royaume-Uni a travaillé sur des observations du télescope spatial Hubble réalisées en 2016 et 2017. En effet, les données des observations sont archivées et disponibles pour des équipes de recherche. Les scientifiques font alors du «data-mining», fouillant des données archivées. Ensuite, pour extraire la signature de la vapeur d’eau, l’équipe a appliqué un algorithme mathématique «open-source» (il faut comprendre que le signal est très faible et demande donc une analyse mathématique de pointe). On a donc une découverte qui fait appel à la fois à du data-mining (fouille de données) et de l’open-source collaboratif. C’est une tendance qui se développe et qui permet d’exploiter les archives de plusieurs observatoires pour en extraire des découvertes parfois inattendues. C’est une véritable valorisation des acquis observationnels. Bien évidemment, ça ne va pas dire qu’il faut cesser d’observer ou de construire de nouveaux instruments pour se contenter d’exploiter ce qu’on a déjà : cette logique ne fonctionne que si constamment de nouvelles observations avec de nouvelles technologies renforcent les données disponibles pour ce genre de travail.

Enfin, pourquoi les astronomes semblent-ils se concentrer sur la découverte d’exoplanètes ces dernières années ? A-t-on vraiment espoir de trouver de l’eau à l’état liquide ou une forme de vie sur l’une d’entre elles ?

La première exoplanète confirmée a été découverte en 1995 par les astronomes Michel Mayor et Didier Queloz de l’observatoire de Genève. Depuis, les techniques pour détecter ces mondes autour d’autres étoiles que la nôtre n’ont cessé de s’affiner. Au départ, on ne détectait que les exoplanètes les plus «faciles», c’est-à-dire les plus grosses et les plus proches de leur soleil. Désormais, on s’approche de la capacité à trouver des jumelles de la Terre, donc des mondes d’une taille comparable à la Terre qui suivent une orbite en zone habitable d’une étoile semblable au Soleil. La question est de déterminer si un monde comme le nôtre favorable à l’émergence du vivant est plutôt courant ou s’il s’agit au contraire d’une exception. Le débat n’est pas encore tranché, mais avec l’évolution des technologies et la mise en service prochaine d’une nouvelle génération de télescopes, au sol ou dans l’espace, on sera capable de déterminer avec plus de précision la composition de l’atmosphère des exoplanètes. Par exemple, si on trouve un jour un monde de taille similaire à la Terre situé en zone habitable d’une étoile et qu’on détecte dans son atmosphère de la vapeur d’eau, du méthane et d’autres gaz considérés comme des biomarqueurs, alors on aura une piste sérieuse pour la logique qui veut que les conditions favorables à l’émergence du vivant ne soient pas si rares que ça.

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