Pourquoi il faut continuer d'enseigner les classiques de la littérature<!-- --> | Atlantico.fr
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Victor Hugo.
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Rien de tel qu'un bon livre...

Y a-t-il toujours une utilité à enseigner les classiques de la littérature ? Une question d’actualité alors que s'est ouvert à Paris la 33e édition du Salon du livre.

Catherine Marle-Guyon

Catherine Marle-Guyon

Catherine Marle-Guyon est certifiée de Lettres classique, et a enseigné les Lettres en collège et lycée pendant 33 ans.

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Atlantico : A l'occasion du 33e Salon du livre qui s'ouvre à Paris, Cecile Ladjadi, écrivain et professeure de lettres dans le secondaire,vient de publier une tribune dans Le Monde, affirmant la nécessité de l'enseignement des classiques à l'école. Partagez-vous son avis ? Quel est le but visé par l'enseignement de ces oeuvre ? La littérature classique a-t-elle vocation à "former les esprits" ?  

Catherine Marle-Guyon : Bien sûr, l'enseignement des classiques à l'école permet la cohérence de cet enseignement, quelle que soit l'école qui le dispense: les élèves auront eu accès à une culture commune qui leur sera utile pour la suite de leurs études, quelles qu'elles soient, et pour vivre en société.

Outre le fait de dispenser une culture, la fréquentation des classiques, le fait de les étudier en classe, permet aux élèves de se confronter à des problématiques qui régissent la vie humaine: Alceste dans Le Misanthrope, ou le héros éponyme dans  Dom Juan, par exemple, ou le docteur Rieux, personnage central de La Peste, sont des types humains que l'on peut croiser au cours de sa vie; l'étude de ces deux textes de Molière, l'étude de l'oeuvre d'Albert Camus offrent aux élèves, futurs adultes, une compréhension fine de comportements humains universels, comme la séduction, l'ambition ou l'altruisme héroïque. C'est en cela que l'étude de la littérature classique, parce que ses sujets confinent à l'universel, forme les esprits, oui, en effet.

Ont-ils encore un intérêt à être enseignés en classe ?  La langue n'a-t-elle pas trop évolué ? Ne sont-ils pas devenus trop difficiles d'accès pour la majorité des élèves ? 

On objectera, il est vrai, que la langue a évolué, mais la langue évolue en permanence, elle avait déjà évolué il y a cinquante ans et on n'en a pas argué pour ne plus enseigner les classiques, pourquoi la question se poserait-elle aujourd'hui ? On dit aussi que la diversité des publics scolaires empêche l'accès aux grands textes, mais les élèves des générations qui ont précédé ne sortaient pas tous de la cuisse de Jupiter, les enfants des classes moyennes des années 50 ont eu accès à ces textes, pourquoi pas les élèves d'aujourd'hui? De leur part, il y a une vraie demande d'insertion sociale, de compréhension de la langue des prescripteurs. Peut-être, aussi,  faut-il prendre le temps de les leur enseigner, ces textes.

Plus qu'une culture générale, qu'est-ce que la lecture de classiques peut amener de plus ?  

On redécouvre aujourd'hui les classiques latins et grecs : les propos sur le bonheur de Sénèque, la doctrine d’Épicure  nos contemporains sont allés les rechercher pour accomplir leurs démarches de "développement personnel", si à la mode aujourd'hui et on ne compte plus les nouvelles traductions, dans un souci de vulgarisation de ces langues anciennes, de L'Odyssée d'Homère ou de l'Enéide de Virgile. Et puis, la langue littéraire dite classique est poétique et en tant que telle est une forme artistique, un travail sur la langue. Les élèves peuvent prendre plaisir à s'approprier ce langage codé à priori si éloigné de celui qu'ils utilisent tous les jours dans leurs échanges entre eux, c'est ce que montre le beau film d'Abdellatif Quéchiche, L'Esquive dans lequel des élèves d'une cité mettent en scène Le jeu de L'amour et du hasard de Marivaux, c'est une révélation pour certains d'entre eux, le film montre qu'ils ne seront plus jamais les mêmes après cette expérience.

Y-a-t-il des indispensables à avoir lu ? Peut-on sélectionner un nombre d’œuvres classiques incontournables ?  Lesquels ? 

Il est difficile de donner des titres. Ceux qui ont été cités ci-dessus n'engagent que celui qui répond à ces questions: les classiques sont innombrables, ils forment une manne dans laquelle chacun peut glaner ce qu'il lui convient de lire à un moment de sa vie, pour retrouver dans les personnages  quelqu'un qui lui ressemble ou qui ressemble à quelqu'un qu'il connaît ou pour y trouver  une réflexion sur une question qu'il se pose. C'est au professeur de voir ce qui intrigue la classe qu'il a devant lui, c'est au professeur de choisir le texte qu'il pourra transmettre avec passion à ses élèves.

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