Pourquoi il est si difficile de savoir vraiment ce qu’on mange en se fiant aux étiquettes des géants de l’agro-alimentaire<!-- --> | Atlantico.fr
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Il est si difficile de savoir vraiment ce qu’on mange.
Il est si difficile de savoir vraiment ce qu’on mange.
©Reuters

Langage biochimique

Readers' Digest vient de conduire une étude dans le but de savoir ce qui se cache réellement dans les plats que l'on achète.

Béatrice  de Reynal

Béatrice de Reynal

Béatrice de Reynal est nutritionniste Très gourmande, elle ne jette l'opprobre sur aucun aliment et tente de faire partager ses idées de nutrition inspirante. Elle est par ailleurs l'auteur du blog "MiamMiam".

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Atlantico : Dissimuler les aliments contenus dans de nombreux plats est-elle une pratique courante de l'industrie agro-alimentaire ?

Béatrice de Reynal : Les fraudes pratiquées par l’industrie alimentaire sont - heureusement extrêmement rares - D’ailleurs, le tout premier article de loi concernant le droit de la consommation évoque bien le fait qu’il soit interdit de tromper le consommateur : c’est passible de très lourdes peines.

C’est ce qu’il s’est produit lors du « horsegate », les lasagnes à la viande de cheval. Il s’agissait d’une volonté de vendre une viande de cheval (pas chère et dont peu de consommateurs veulent) en la faisant passer pour de la viande de boeuf (chère). La prison et de lourdes amendes sont à la clé de telles pratiques.

Or, ce qu’évoque le Reader’s Digest est tout autre : il s’agit de "faire croire" que ou ne pas détromper le "consommateur qui pense que". Par exemple, vous vendez un sirop "fraise" en illustrant la bouteille de très belles fraîches entières, fraîches, rouges.. .alors que le sirop ne contient que des arômes synthétiques qui évoquent la saveur d’une fraise naturelle. Le consommateur moyennement averti achète la bouteille en se fiant à son illustration, sans prendre le soin de lire l’étiquette.

S’il l’avait fait, il aurait lu deux informations importantes : la dénomination légale (il s’agit de la description précise du produit, contrôlée par la répression des fraudes). Elle précise qu’i s’agit d’un sirop de sucre aromatisé. Le mot "fraise "n’est pas présent.

La deuxièmee information importante est la liste des ingrédients, placée juste sous la dénomination légale. On peut y lire : eau, sucre, arômes, et colorants… Donc on peut avoir la certitude qu’il n’y a pas de fraises.

Y-a-til tromperie ? Oui, car l’habit faisant le moine, la bouteille avait toute apparence d’un "sirop fait avec des vraies fraises". Mais l’étiquetage est conforme à la loi. Pour moi nutritionniste, la loi qui précise qu’on ne doit pas tromper le consommateur est ici bafouée. En effet, le consommateur non expert, mais surtout, pressée, va porter attention essentiellement à l’apparence du produit, et peu aux informations essentielles. De fait, et le sachant, il serait préférable que la répression des fraudes prennent plus attention à ces apparences, souvent trompeuses.

Pour quels types d'aliments ou plats cuisinés ces pratiques sont-elles récurrentes ?

Le gros problème du business de l’alimentaire est que les consommateurs veulent tout avoir, la qualité mais aussi le petit prix. Ce qui n’est pas compatible. La qualité a un prix minimum en dessous duquel on ne peut aller sans porter préjudice à la qualité des ingrédients employés.

Or, les produits les plus populaires, ceux qui se vendent le plus et qui ont une forte pression concurrentielle, ont tendance à baisser les prix (mais pas forcément leurs marges) et à remplacer les ingrédients nobles et chers (viande, fromage, lait, fruits, beurre…) par des ingrédients bien moins chers : viande reconstituée, succédané de fromage, arômes de lait ou de fruits, margarines ou graisse de palme). Il faut être bien plus vigilant lorsqu’on fait ses choix !

 On sait que les étiquettes des produits allégés par exemples, ne sont pas toujours fiables (il peut y avoir du sucre par exemple), mais lorsqu'il s'agit de fromage par exemple, comment le dissimuler ? Le consommateur ne s'en rend-il pas compte au goût ?

On ne peut pas dire que les produits ne sont pas "fiables" : il faut savoir décrypter les étiquettes, qui sont parfois écrites en langage biochimique impénétrable. C’est vrai, un produit allégé en sucre peut très bien être plus gras (donc le bénéfice en calories n’y est plus), ou à l’inverse, un allègement en gras peut entraîner une utilisation plus importante de sucre. Regardez le chocolat "light", les yaourts "sans sucre" ou "sans gras"…

Pour ce qui est de l'huile d'olive, comment savoir si sa qualité est celle qui paraît sur l’étiquette ?

L’huile d’olive mérite un article à elle toute seule car elle usurpe très très exagérément ses atouts santé ou nutritionnelle.

Comment éviter les pièges de l'agro-alimentaire ?

Faites vos courses "à l’envers" : fermez les yeux sur la face principale des emballages et ne lisez que la dénomination légale et la liste des ingrédients : vous serez surpris… et même peut être écoeurés. Lorsque vous lirez que la célèbre pâte à tartiner est composée essentiellement de graisses végétales (= graisse de palme) et de sucre, avec 3 noisettes et une goutte de lait, un nuage de cacao, vous comprendrez pourquoi je me bats pour l’établissement d’un BVP spécial, le "bureau de vérification de la publicité nutrionelle". Tant que les industriels qui jouent de ces apparences restent en liberté dans les rayons, tout est à craindre !

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