Pollution : Coca-Cola, numéro 1 des pollueurs, Danone se classe en huitième position<!-- --> | Atlantico.fr
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Un site de recyclage de bouteilles en plastique.
Un site de recyclage de bouteilles en plastique.
©AFP

Bonnes feuilles

Yvan Stefanovtich publie « La mafia du recyclage Entre monopoles, gaspillages et conflits d'intérêts » aux Editions du Rocher. Depuis trente ans, les Français trient et paient pour que leurs déchets ménagers soient recyclés pour lutter contre les dangers du plastique qui pollue nos rues et routes avant de tapisser le fond des océans. Pourtant, le recyclage n'est pas vraiment efficace dans notre pays, lanterne rouge en Europe. Extrait 1/2.

Yvan Stefanovitch

Yvan Stefanovitch

Yvan Stefanovitch, journaliste, s’est spécialisé dans les enquêtes sur les gaspillages français. i l est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages, dont Aux frais de la princesse (2007), Le Sénat : Enquête sur les super-privilégiés de la République (2008), La Caste des 500 (2010), Enquête sur les faiblesses de l’armée et les milliards gaspillés par l’État (éditions du Moment, 2013) et Histoire secrète de la corruption sous la Ve (Nouveau Monde, 2014).

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La fabrication du plastique entraîne 6 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Son premier secteur d’activité reste les emballages (soit 40% de l’industrie du plastique) qui ont une durée de vie extrêmement courte et donc un bilan environnemental catastrophique. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la pétrochimie est devenue le principal facteur de la croissance du pétrole devant les transports. Un autre chiffre terrible: 250 kg de plastique sont rejetés chaque seconde dans les mers et océans, où ils entrent dans la chaîne alimentaire. Inutile d’insister ici sur les dangers du plastique en matière de gaz à effet de serre, de pollution des eaux et du sol lors de l’extraction du pétrole, de sa transformation en plastique et enfin sur la santé humaine.

Mais qui a fabriqué les bouteilles, flacons, bidons en plastique qui jonchaient, en 2020, les plages, les rues, les routes et les forêts du monde entier? Ce sont des groupes internationaux de boissons non alcoolisées, dont les filiales françaises sont les principaux et plus importants actionnaires de Citeo. En tête de ce hit-parade peu reluisant arrive Coca-Cola (pour la 4e année consécutive); ensuite, loin derrière, PepsiCo, puis Unilever, selon le podium de l’ONG américaine Break Free From Plastic. Cette ONG envoie ses bénévoles chaque année identifier les entreprises les plus polluantes, en ramassant les déchets plastiques dans la nature. C’était la quatrième année qu’ils collectaient des déchets plastiques aux quatre coins de la planète. En 2020, plus de 11 000 volontaires ont sillonné 45 pays sur six continents. Au total, près de 20 000 morceaux de plastique, appartenant à la firme américaine, ont été mis au jour dans 39 pays différents.

Loin derrière, à la deuxième place sur le podium, PepsiCo avec 8 231 déchets plastiques, puis Unilever qui figure pour la première fois dans ce classement après avoir succédé à Nestlé.

Si Coca-Cola est l’entreprise qui génère le plus d’emballages plastiques, selon un autre rapport de l’ONG Fondation Ellen MacArthur, Danone n’est pas en reste. Le Français a fait une entrée remarquée, en 2020, dans le Top 10 des plus gros pollueurs plastiques de cette fondation, en se hissant à la huitième place. « L’addiction du monde au plastique à usage unique est une grave contribution à la crise climatique », remarque Break Free From Plastic.

À la lecture de ces chiffres, qui restent tout aussi inquiétants depuis des années, on comprend que les « Intouchables » puissent craindre, redouter même, la mise en place d’une réglementation européenne interdisant les emballages en plastique à usage unique à une échéance plus ou moins rapprochée. C’est-à-dire essentiellement les bouteilles et les emballages alimentaires. Et en effet, un projet de modification du droit européen sur les emballages à usage unique était déjà dans les tuyaux, à Bruxelles, depuis 2015. Le but était de prévenir et de réduire l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement, notamment aquatique, la santé humaine et de promouvoir la transition vers une économie circulaire reposant sur des modèles d’entreprise, des produits, des matériaux innovants et durables.

En 2015, les « Intouchables » n’en savaient pas plus… La seule certitude: ils voulaient sauver leur business. Le risque majeur pour eux était de se voir imposer certaines interdictions dans la réglementation française ou européenne. Pire, de subir des actions de boycott menées par des associations de consommateurs. Les bouteilles en plastique dans les mers et océans ne sont clairement pas l’avenir. Des voix s’élèvent même pour qu’elles aient complètement disparu d’ici 2040. Pas question pour les « Intouchables » d’accepter que les Français soient obligés de boire un peu moins d’eau minérale et de sodas au bénéfice de l’eau du robinet! Difficile pour eux de voir la fin de l’économie linéaire et son trinôme: acheter, consommer, jeter…

Mais ils n’ont pas eu le choix… Pour défendre leurs divines bouteilles, ils sont devenus des écologistes de choc, des partisans acharnés de l’économie circulaire. Pris d’une véritable frénésie verte, d’une passion immodérée pour le recyclage, leurs groupes industriels ont alors multiplié les engagements solennels au niveau mondial avec nombre d’ONG. Le meilleur exemple: l’Alliance pour en finir avec les déchets plastiques a été lancée, en 2019, au forum de Davos. Les plus gros pollueurs du monde en matière d’emballages en sont membres : Coca-Cola, Nestlé, PepsiCo, Danone… À un niveau plus modeste, EDF comme L’Oréal ont longtemps donné 100 000 euros par an à la fondation Nicolas Hulot, Veolia un peu plus avec 200 000 euros.

Face à cette marée de mauvais chiffres, chacune de ces grandes marques a promis d’éliminer totalement ses émissions de gaz à effet de serre. Coca-Cola, Danone et Nestlé ont ainsi investi, en France, des dizaines de millions d’euros qu’ils ne se sont pas fait rembourser cette fois par le consommateur. Les « Intouchables » ont ainsi financé l’allègement de leurs bouteilles, l’aptitude au recyclage des mêmes bouteilles, la conversion de leurs usines aux énergies renouvelables et de leurs moyens de transport à l’électricité, des camionnettes aux poids lourds en passant par les chariots élévateurs. Dans le même élan, les grandes marques ont promis d’incorporer de plus en plus de PET recyclé pour fabriquer leurs bouteilles.

Mais cela a tourné quelquefois au simple effet d’annonce frisant le ridicule… Ainsi, 300 bouteilles de Coca-Cola ont été fabriquées à partir de 25 % de déchets marins récupérés sur les plages méditerranéennes. Cette annonce a été faite à Londres, le 1er octobre 2019, par le président de The Coca-Cola Company pour l’Europe de l’Ouest, Tim Bret. Depuis, on est sans nouvelle de cette prouesse technologique qui devait être validée à grande échelle…

Extrait du livre d’Yvan Stefanovtich, « La mafia du recyclage Entre monopoles, gaspillages et conflits d'intérêts », publié aux Editions du Rocher

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