Politique de l'enfant unique : la Chine est-elle sur le point d'en payer le prix fort ?<!-- --> | Atlantico.fr
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La politique du planning familial a été mise en place en 1979.
La politique du planning familial a été mise en place en 1979.
©Reuters

Un milliard de Chinois...

Une étude australienne affirme que les Chinois nés de la politique de l'enfant unique ont moins d'aptitudes à prendre des risques et à devenir entrepreneurs. Ils auraient aussi moins confiance en eux et auraient moins l'esprit de compétition que les enfants nés avant 1980.

Pierre  Picquart

Pierre Picquart

Pierre Picquart est docteur en Géopolitique de l’Université de Paris-VIII, spécialiste en Géographie humaine, expert international, et spécialiste de la Chine.

Il a rédigé notamment La Chine dans vingt ans et le reste du monde. Demain, tous chinois ? en 2011.

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Atlantico : Une étude australienne affirme que les enfants nés de la politique de l'enfant unique auraient moins d'aptitudes à prendre des risques et à devenir entrepreneurs. Ils seraient aussi moins confiants, moins sociables et auraient moins l'esprit de compétition que les enfants nés avant 1980. La Chine est-elle en train de payer le prix fort de sa politique de natalité ?

Pierre Picquart : Il y a eu un double mouvement de politiques de contrôle des naissances en Chine. Le premier que l’on a appelé le "mariage tardif". Le second est la politique du planning familial, mise en place en 1979. Cette politique ne concerne directement qu’une seule ethnie, les familles Han, qui représentent environ 90 % de la population. Ne sont concernées ni les autres ethnies minoritaires, ni la population paysanne chinoise. Depuis quelques temps, au regard des chiffres sur la démographie, on observe une tendance à accorder un deuxième enfant, notamment à Shanghai.

Est-ce que cette étude me paraît conforme ? Oui et non. Non parce que du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, et que ce soit dans les campagnes ou dans les villes, on observe un fantastique entrepreneuriat de la part des Chinois et des Chinoises, y compris parmi les plus jeunes de vingt, trente ou quarante ans. Et donc parmi cette génération d’ "enfants uniques", aussi appelés les "petits empereurs". Les Chinois ont chaque jour de nouvelles idées afin de créer quelque chose. En même temps, il est vrai que la politique de l’enfant unique a rendu les jeunes chinois un peu moins ouverts au regard de la société. Ce sont des "enfants-rois" comme on les rencontre au Canada, en France, aux Etats-Unis. Les jeunes ont même tendance à oublier les efforts faits par leurs grands-parents et leurs parents pour vivre et surtout pour survivre. Ils leur doivent beaucoup sur leur niveau de vie.

L'étude souligne les conséquences néfastes que ces comportements pourraient avoir sur l'économie. Qu'en est-il ?

Ces jeunes sont moins réalistes quant aux impératifs du "bien vivre ensemble" et notamment sur la sévérité. La jeunesse chinoise devient assez égoïste. Cela étant dit, ils sont bien formés et au contraire, sont culturellement très favorables à l'entrepreneuriat et à la liberté d’entreprise. Les enfants chinois, même uniques, sont élevés dans une logique de réussite : les études, les loisirs, le mariage, et pourquoi pas encourager à reprendre l’entreprise familiale pour continuer de la faire prospérer. Les parents investissent beaucoup sur leur enfant. On a donc des jeunes qui ont de nombreux atouts notamment en matière de culture ou de langues étrangères. Les jeunes des campagnes, eux, n’ont pas encore pu profiter de ces progrès. Un jeune citadin sera plus indépendant mais aussi plus individualiste. Il sera moins solidaire vis-à-vis de sa famille et de sa patrie. Tandis qu’un jeune des campagnes ou des montagnes n’aura pas les moyens d’apprendre comment fonder une entreprise mais sera plus solidaire et dynamique. Pour la plupart des enfants de la génération post-1979, ce qui compte c'est l’argent, l’argent, l’argent.

Quelle est la position du gouvernement chinois sur cette politique de la natalité ?

D’une façon générale, la Chine allie deux méthodes : la stabilité et les réformes. C’est ce qui permet sa réussite économique. Et cela concerne aussi bien la politique sociale, avec cette régulation de la natalité, que l’industrie, l’environnement ou l’agriculture. En effet, la Chine lorsqu’elle se réforme, fait des tests. D’où l’assouplissement de la politique de natalité. Par la suite, si les résultats sont satisfaisants, elle s’adapte. Et c’est là toute l’ambiguïté de leur politique.

L’autre explication à cette régulation, c’est la démographie qui doit également être contrôlée. On encourage de plus en plus les familles à avoir un deuxième enfant, ne serait-ce que pour assurer un futur équilibre des retraites. Car la Chine compte près de 1,4 milliard d’habitants. Face à ces assouplissements de la politique de natalité, les citadins, principalement de Shangaï se réjouissent de rejoindre le modèle occidental. La classe moyenne, ayant des revenus plus importants, est de plus en plus réceptive à l'idée d'agrandir ses foyers. Mais la majeure partie des Chinois estiment tout de même qu’il vaut mieux se concentrer sur l’éducation d’un seul enfant afin que celui-ci ait les meilleures chances de réussite. 

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