Pétrole : qui sont les pays qui mènent aujourd’hui la danse ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les Etats-Unis importent de moins en moins de pétrole au profit de leur production intérieure.
Les Etats-Unis importent de moins en moins de pétrole au profit de leur production intérieure.
©Reuters

Décod’Eco

Rififi à l'OPEP : les anciennes puissances sont en train de céder la place à un nouvel ordre pétrolier... et le prix du baril s'en ressent.

Florent Detroy

Florent Detroy

"Florent Detroy est journaliste économique, spécialisé notamment sur les questions énergétiques, environnementales et industrielles. Voir son site."
 
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Un premier trimestre "mort pour nous"

C'est par cette expression qu'un responsable matières premières d'une banque d'investissement cité par le Financial Times le 25 avril 2013 a décrit le marché du Brent au premier trimestre.

Depuis le début d'année, les évolutions des cours du Brent nous avaient effectivement habitués à un faux rythme. Ce marché autrefois si volatil évoluait dans un canal 110-115 $ le baril depuis l'été 2012. Au mieux avions-nous vu une approche des 120 $ en février dernier, sur fond de tensions avec l'Iran. Le baril était très vite revenu vers les 115 $.

Et puis la Chine a publié sa croissance du premier trimestre 2013, en baisse de 0,3% comparé aux attentes. Toute de suite, les salles de marchés ont vendu à découvert le contrat Brent sur l'InterContinental Exchange, pour le faire s'effondrer sous les 100 $. Ce premier coup de feu la semaine du 15 a entraîné une riposte tout aussi vigoureuse, avec un record d'échange sur le marché du Brent la semaine dernière. Résultat, le Brent est repassé au-dessus des 100 $ aussi vite qu'il était descendu.

La torpeur dans laquelle étaient plongés les marchés depuis six mois s'est d'un coup évanouie. Pourquoi le Brent est-il remonté si vite ? A-t-il réellement une direction ? La réaction de l'OPEP a donné les premiers indices.

Fusillade tragique à Londres, un mort : le Venezuela

Le ministre vénézuélien de l'Energie et du Pétrole Rafael Ramírez a, dès la chute des prix, plaidé pour une réunion extraordinaire des pays de l'OPEP afin de faire remonter les prix au-dessus des 100 $. En pleine campagne, alors que la production de pétrole décline depuis 10 ans, Caracas a senti le sol se dérober sous ses pieds devant la chute des prix.

La demande affolée du Venezuela a toutefois été vite écartée par les autres membres de l'OPEP. "Le marché est équilibré", lui a rétorqué le ministre de l'Energie émirati Suhail Mohammed Al Mazrouei. Même l'Iran, considéré comme un des faucons du marché partisan de prix pétroliers toujours plus hauts, et qui partage d'ailleurs avec le Venezuela ses difficultés à vendre son or noir, n'a pas suivi Caracas. Le ministre du Pétrole iranien a rappelé que "les prix du pétrole ne sont pas passés sous les 100 $ pour longtemps".

Une alliance Venezuela-Iran n'aurait eu aucun impact, sachant que seule l'Arabie Saoudite, et plus modestement le Koweït et Abu Dhabi, sont capables de réduire leur production grâce à leur budget équilibré et leurs réserves monétaires. Or plusieurs raisons expliquent pourquoi l'Arabie Saoudite est restée inflexible.

L'Arabie Saoudite gère le pétrole d'une main de maître

Ryad a démontré ces dernières années son pouvoir sur le marché du pétrole. En 2012, l'Arabie Saoudite avait augmenté sa production au-dessus des 10 millions de barils par jour, afin de compenser la baisse des exportations de l'Iran et les troubles dans le monde arabe. En début d'année, le royaume a réduit sa production, afin de compenser la baisse de la consommation américaine. C'est cette politique qui a assuré la stabilité du Brent.

Pourquoi l'Arabie Saoudite n'a-t-elle pas décidé de réduire à nouveau sa production afin de compenser la baisse des prix ?

D'abord, une explication très technique a été avancée par plusieurs officiels de pays du Golfe. Plusieurs importantes raffineries asiatiques, notamment chinoises et sud-coréennes, ont effectué des travaux de maintenance, réduisant les achats de brut. "D'ici l'été, la demande mondiale de pétrole sera remontée", a pronostiqué un délégué de l'OPEP.

Au-delà de cet épiphénomène, trois autres explications peuvent expliquer la sérénité de la quasi-totalité des membres de l'OPEP :

  • L'OPEP vit très bien avec un baril à 100 $

Le maintien de prix à "trois chiffres" suffit aux membres de l'OPEP pour équilibrer leur budget. Ils n'interviendront qu'en cas de baisse durable sous les 100 $.

  • L'OPEP a trop peur d'une réaction de Washington

Washington a publié plusieurs indicateurs négatifs la même semaine que la publication chinoise. Ce n'est pas le moment de renchérir le pétrole alors que la reprise américaine cale.

  •  L'OPEP joue le long terme

L'organisation pétrolière connaît les équilibres du marché, et ne croit pas à un passage durable sous les 100 $.

Ces trois propositions sont bien évidemment conciliables. Toutefois la dernière supposition mérite qu'on s'y arrête quelques instants tant elle déterminera notre futur.

Qui sont les nouveaux acteurs du marché du pétrole ?

Notre expérience des marchés nous fait dire que le ralentissement de l'activité économique américaine pourrait aussi expliquer la chute du pétrole de ces derniers jours. C'est peut-être là qu'il est bon de revoir nos vieux schémas classiques.

Les Etats-Unis ne sont plus l'alpha et l'oméga du pétrole, et encore moins dans le Golfe. Ce n'est pas un hasard si l'armée américaine a décidé cette année de réduire le nombre de porte-avions dans le Golfe. Les Etats-Unis importent de moins en moins de pétrole, au profit de leur production intérieure.

Un autre pays en revanche accéléré ses importations, la Chine. Elles sont tellement fortes que pour la première fois, en décembre dernier, l'Empire du Milieu a importé davantage de pétrole que les Etats-Unis. Ses importations se sont élevées à 6,12 millions de barils par jour, contre 5,98 côté américain. Cela intervient dans un marché global où, selon l'Agence internationale de l'énergie, les pays émergents consommeront plus de pétrole que les pays de l'OCDE au prochain trimestre. Elle s'élèvera à 44,9 millions de barils par jour contre 44,7 côté pays développés.

Ainsi sur les trois propositions ci-dessus, une reste en suspens, une est infirmée et une est probable. Si l'on ne sait pas ce que ferait l'Arabie Saoudite en cas de chute des prix durable sous les 100 $, il est avéré que le poids de Washington dans la région va s'alléger dans les années à venir. Surtout, l'OPEP s'attend à un rebond rapide des prix du fait de la demande asiatique.

[Pour en savoir plus sur le marché du pétrole, ses enjeux et sa place dans l'économie mondiale, continuez votre lecture...]

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