Pépère, Flamby, Fraise des bois, Guimauve le Conquérant : scanner des surnoms du président<!-- --> | Atlantico.fr
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"Les Français aiment toujours autant à se divertir au détriment des puissants ou de ceux qui les gouvernent."
"Les Français aiment toujours autant à se divertir au détriment des puissants ou de ceux qui les gouvernent."
©Reuters

Pingouin

Après "Flamby", François Hollande se voit attribuer un nouveau sobriquet : "Hollandouille Ier", qui circule depuis la dernière intervention du président français au JT de France 2.

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot est l'auteur de Trônes en majesté, l’Autorité et son symbole (Édition du Cerf), et commissaire de l'exposition Trésors du Saint-Sépulcre. Présents des cours royales européennes qui fut présentée au château de Versailles jusqu’au 14 juillet 2013.

 

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Sous le règne de Trajan, Juvénal avait fait fort dans ses fameuses Satires en brocardant copieusement les pontes de la société impériale de son temps, n’épargnantni leurs maîtresses, ni leurs gitons, ni même la sacro-sainte figure impériale !

L’ouvrage, inlassablement reproduit, connut un succès durable pendant des siècles. Aux pays des Gaulois comme à Rome, il figure dans les bibliothèques des meilleurs humanistes de la Renaissance.

Depuis, les Français aiment toujours autant à se divertir au détriment des puissants ou de ceux qui les gouvernent. L’avènement de la IIIe République leur en offre de nouvelles occasions. Que l’on songe au sobriquet de « nabot monstrueux » forgé par Karl Marx pour désigner le président Adolphe Thiers !

De nos jours, l’exercice semble connaître un formidable regain autour de la personne de François Hollande. Mais à l’examen, la grande majorité des surnoms donnés à l’actuel président de la République, dont certains remontent à l’époque où il se trouvait à la tête du Parti socialiste, n’émane nullement de ses adversaires politiques naturels, à droite, mais de ses vieux compagnons qui le côtoient depuis des lustres et qui laissent entendre parfaitement le connaître. Comme l’abbé de Vilecourt (Bernard Gireaudeau) en fait la cuisante expérience dans le film Ridicule, pour être percutant un mot d’esprit s’appuie sur la faiblesse d’un trait de caractère pour toucher, dans une formule condensée qui fait mouche, l’inconscient plus ou moins refoulé d’un auditoire, déjouant ainsi toute forme de censure en provoquant le rire. L’attribution d’un sobriquet utilise des procédés identiques.

Si le bon peuple a su reprendre à son compte d’ingénieuses trouvailles en y ajoutant celles de sa propre création à l’instar de Mimolette et son dérivé le faux mage de Hollande, le grand art appartient en la circonstance aux intimes familiers du président et à ses plus proches collaborateurs.

Ces saillies peuvent se classer en différentes catégories qui, selon leurs auteurs et leurs diverses références, visent des publics bien distincts.

Le grand genre, celui de la connotation historique :

Sans être dupes sur leur milieu et sur l’héritage de François Mitterrand qui souhaitait entrer dans la postérité par la grande porte de l’Histoire, certains socialistes comme Guillaume Bachelay, lieutenant de Laurent Fabius, farouchement anti-Hollande devenu par la force des choses un soutien du président, s’amusent d’une aspiration aussi grotesque à laquelle beaucoup de leurs amis politiques succombent même s’ils n’en meurent pas tous. Ce conseiller est l’auteur du savoureux Guimauve le Conquérant qui fait merveilleusement écho au Bertrand Du Déclin forgé dès l’élection, moment historique s’il en est dans les annales de la capitale, de Bertrand Delanoë à la Mairie de Paris et dont l’avènement devait marquer l’aube d’une nouvelle ère. « Non Lucette l’autobus ne vas pas à Corinthe ! » pourraient s’exclamer le titi parisien et tous les Gavroche de l’hexagone pour paraphraser le proverbe latin.

L’univers des bisounours :

Pour les plus naïfs qui espèrent toujours, contre vents et marrées, en des lendemains qui chantent, Fraise des bois est sans doute le surnom le plus connu, corroyé pour eux par Laurent Fabius en 2003. "A-t-on jamais caché un éléphant derrière une fraise des bois ?" interroge l'ancien plus jeune Premier ministre en visant le patron du PS. Fabius contemple le successeur de Jospin de toute la hauteur de son impérial mépris. Hollande est, depuis la défaite du 21 avril 2002, le « leader » naturel du Parti socialiste. La comparaison avec une replète fraise des bois souligne la petitesse et la timidité de jeune fille du sujet devant la majesté écrasante des éléphants menacés par nul prédateur. Le sobriquet s’est décliné par la suite en autant de gourmandises saturées de colorant propres à assouvir les caprices des enfants des meilleurs quartiers : Fraise Tagada, pour le côté sucré, Fraise flagada, pour son manque supposé de fermeté...

Flamby est une création prêtée à d’Arnaud Montebourg lancée dans les couloirs de l’Assemblée nationale également en 2003. Renversée au fond d’une assiette, cette crème dessert gélatineuse un instant vacille tout en dégoulinant de caramel avant de se stabiliser et reprendre sa couleur naturelle indéfinissable. Les plus gloutons la gobent parfois d’un trait, sans discernement. N’offrant aucune résistance au palais, elle se déglutit selon l’appétit propre à chaque gosier.

Depuis mars dernier, sous l’effet d’une révélation offerte par le Carnard enchaîné à ses lecteurs, on sait que les proches de l’actuel locataire de l’Elysée le désignent sous le respectueux vocable de Pépère qui rappelle celui d’Edredon dont il avait été qualifié lorsqu’il présidait aux destinées de la rue de Solférino. Tout ceci sonne impeccablement : au pays des Calinours, on s’aime avec effusion en se pourléchant les babines au rappel de si suaves douceurs !

Aux côtés du renard, de la grenouille ou du crapaud,  la présence d’un pingouin sur le chemin de l’école suivi par Calinours ne saurait faire mauvaise figure ! Si Carla réfute à qui veut l’entendre l’allusion à François Hollande dans une chanson de son dernier album, les clins d’œil restent nombreux dans le cours des paroles : "Les bras ballants, le pingouin, les bras ballants mais l'oeil hautain" (on songe à la photo officielle du président de la République), et plus loin : "Si un jour tu recroises mon chemin, je t'apprendrai, le pingouin, je t'apprendrai à faire le baisemain" (on se souvient du manque de courtoisie de François Hollande à l’égard de que Carla Bruni-Sarkozy lors de la passation des pouvoirs à l'Élysée).

Les évocations régaliennes :

Mais arrivent d’autres circonlocutions plus magistrales encore puisqu’elles visent l’aptitude de celui qui s’apprête à détenir entre ses mains les rênes de l’Etat ! La « gentillesse » de Jean-Luc Mélenchon qualifiant, dans « une saison de tempête », le candidat socialiste de capitaine de pédalo présente une  incontestable valeur symbolique à laquelle Claude Allègre ajoute sa petite formule : « ce n’est pas un pilote de grand vent » ! Mais voilà, alors que tous ces beaux accords étaient retombés, Flanby avec « sa boîte à outils » se présente le 11 avril dernier à la France entière comme Monsieur Bricolage : il en dégaine un tournevis-contrat de génération, une clé-BPI ou encore un marteau-contrat d'avenir. Nicolas Baverez, dans son analyse du Point, en kiosque le 11 avril 2013, perfectionne encore ce surnom et voit dans le président "le petit bricoleur du marché de Tulle". 

 Quels trésors d’ingéniosité et d’humour déploieront à l’avenir les amis socialistes du président ? Pas question de réprimandes de la part de Monsieur petites blagues, comme l’appelle aussi Laurent Fabius, à l’encontre des auteurs de ces si brillantes saillies : on est entre camarades, quoi ! … sous l’autorité du chef de l’Etat ? Pas entre nous, voyons !

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