Paulin Dementhon - Drivy : "Solitaire et fermé sur mon idée, je suis resté isolé dans mon coin"

J’ai commencé ma carrière professionnelle dans un monde complètement différent de celui dans lequel j’évolue aujourd’hui, à savoir le transport maritime. Ce fut pour moi une première erreur, ce milieu étant trop spécialisé et trop peu innovant pour quelqu’un qui entendait depuis toujours devenir entrepreneur. Peu incité par un contexte défavorable à la sortie de mes études en 2002 - la crise des dot.com - j’ai fait ce choix qui par la suite ne m’a pas permis de développer les connaissances et compétences qu’il me fallait dans le secteur de l’Internet.

J’ai pourtant décidé de me lancer dans un premier projet qui était de développer un système de mise en relation entre auto-stoppeurs et chauffeurs via les téléphones GPS. Je souhaitais me servir de la position des gens en temps réel pour leur proposer un service de covoiturage de dernière minute et pour courtes distances. La création de cette première entreprise, appelée Quivaoù, bien qu’elle fut par la suite riche en apprentissages, s’est révélée en réalité pleine d’échecs. 

"J'ai été aveuglé par une idée qui paraissait géniale"

Ma principale erreur a été de vouloir créer un site web bien trop complexe et ambitieux. Pensant son développement simple et rapide, et confirmé dans cette idée par les dizaines de développeurs peu professionnels que j’avais contactés, je me suis retrouvé à devoir attendre plus d’un an avant que mon site voit le jour, et avec des exigences largement revues à la baisse. La raison de cet échec, c’est que j’ai été aveuglé par une idée qui paraissait géniale, mais qui nécessitait une connaissance technique que je n’avais pas.

Solitaire et fermé sur mon idée, je suis resté isolé dans mon coin, complètement déconnecté des milieux tech stimulants qui grandissaient à l’époque, et qui auraient pu rapidement me faire réaliser que mon projet, tel qu’il était formulé au début, était totalement irréaliste. Il me paraît aujourd’hui impensable de ne pas discuter, développer ses relations, rencontrer des entrepreneurs et s’insérer dans des incubateurs ou dans des accélérateurs pour confronter son avis et tester son modèle économique. Ce cadre indispensable pour faire rebondir ses idées, je ne l’ai obtenu qu’au moment où j’ai déménagé mes bureaux à Paris, accueilli dans les locaux de mes amis de Blablacar.

"Pour 5 000€, j'ai demandé à une agence de me faire un site très basique"

C’est là que j’ai pris conscience de l’importance de prototyper son produit de la manière la plus basique possible. Commencer au départ par des étapes intermédiaires, nombreuses et rapides, mais qui simplifient considérablement la conception du site internet, avant de progressivement y ajouter de nouvelles fonctionnalités. C’est une dimension qui semble inimaginable dans le secteur de la construction automobile, par exemple, dans la mesure où le produit ne marche que s’il est le plus complet possible. 

J’ai appliqué à Drivy l’inverse de ce que j’avais fait pour Quivaoù : pour 5 000€, j’ai demandé à une agence de me faire un site très basique. L’idée était simplement de permettre de mettre en ligne des annonces de location de voitures, sans fonctionnalités de paiement, d’assurance, de référencement… C’est comme ça que j’ai rapidement pu tester l’appétit des gens pour le concept et de me faire connaître. À partir de là, notre base d’utilisateurs est née. Aujourd’hui une dizaine d’ingénieurs spécialisés travaillent sur notre site pour innover et le rendre toujours plus complet.

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