Orange mécanique aux Ulis le 14 juillet : deux nuits de violence hors de contrôle à 35 minutes de Paris<!-- --> | Atlantico.fr
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Une photo de la ville des Ulis, en 2004.
Une photo de la ville des Ulis, en 2004.
©Christophe Jacquet / Wikipedia

Célébration de quartier

Deux nuits de suite, celles des 13 et 14 juillet, des affrontements violents, d’une durée inhabituelle- 4 à 5 heures pour la première- ont opposé des jeunes des Ulis, dans l'Essonne, aux forces de police. La commissaire de police des Ulis a demandé du renfort.

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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  • Aux Ulis, des affrontements d’une intense violence ont opposé des jeunes aux forces de l’ordre  dans les nuits des 13 et 14 juillet. Ils ont duré plusieurs heures.
  • Sévèrement attaquée par des bandes de jeunes armés de pierres et de mortiers, la police a répliqué en lançant, dans la nuit du 13 au 14,  38 grenades lacrymogènes et en tirant 41 "lanceurs 40", des flash-ball nouveau modèle.
  • Cette nouvelle flambée de violences, en pleine période de vacances, a de quoi inquiéter. L’année dernière, toujours lors de la Fête nationale, une autre ville de l’Essonne, Evry, avait connu une nuit d’émeute.
  • Le pouvoir politique, plus que jamais, doit s’interroger sur les causes du mal vivre de ces jeunes délinquants – souvent âgés de 14-15 ans- qui considèrent la police comme illégitime.

Aux Ulis, (Essonne) on fête d’une drôle de façon le 14 juillet ! C’est très simple : vers minuit, une cinquantaine de jeunes se mettent à caillasser le commissariat de police dans lequel se trouvent  une demi-douzaine de fonctionnaires… Les renforts arrivent. Tout a commencé par des tirs de mortiers effectué par des adolescents contre des immeubles. Une façon de "chercher" la police et de provoquer l’affrontement. Qui peut durer des heures et des heures.

C’est ce qui s’est passé dans la nuit du 13 au 14 juillet. Une authentique bataille rangée s’est déroulée jusqu’à 4 heures du matin. Face à face, des policiers, notamment de la BAC, de l’Unité canine légère, de la compagnie de sécurisation, et des jeunes souvent âgés de 14 -15 ans, pour la plupart déscolarisés, se livrant au trafic de stupéfiants et laissés à l’abandon par des parents qui ont baissé les bras….

Hier, pour la première fois depuis des années, aux Ulis, commune réputée pour la soudaineté de ses soubresauts, les heurts ont été d’une violence inhabituelle, si l’on en juge par les moyens de riposte utilisés par les forces de l’ordre face aux bandes de jeunes armées de pierres et de mortiers : 38 grenades lacrymogènes, 5 grenades de désencerclement, 5 tirs de flash-ball et 41 tirs de lanceurs 40 (flash –ball nouveau modèle, beaucoup plus précis)…

Ce qui frappe aussi, phénomène nouveau, c’est la durée de l’affrontement : quatre voire cinq heures, alors qu’en général au bout de cinq à dix minutés, tout est réglé. Bis repetita dans la nuit du 14 au 15 juillet. Mais d’une moins grande intensité, les affrontements durant environ deux heures. Toujours violents. Ce qui a conduit les forces de l’ordre à avoir recours à dix tirs de "Lance 40", à lancer 23 grenades lacrymogènes et 4 grenades de désencerclement. 

Ce 15 juillet, la commissaire de police des Ulis, inquiète devant une situation qui peut s’avérer explosive, a demandé du renfort. Elle a même sollicité des volontaires pour renforcer les effectifs.  

La commune des Ulis n’est pas la seule à être secouée par des violences urbaines lors de la Fête nationale : l’année dernière, elles avaient eu lieu à Evry et à Grigny II en 2013… Au-delà de cette situation tendue, qui peut dégénérer à tout moment- souvenons-nous des émeutes des banlieues de 2005- les pouvoirs publics doivent se pencher de toute urgence sur les travaux de sécurisation à effectuer au commissariat  de police des Ulis : création d’une sortie de secours, protection de la baie vitrée, réparation des caméras de surveillance des gardes à vue… C’est le moins qu’on puisse faire ! Et c’est ce que réclament les représentants  de l’UNSA –Police qui, le 7 juillet dernier, ont rencontré, à ce sujet, le directeur départemental de la sécurité publique. 

Seulement voilà : il faut des sous ! On n’attend plus que la décision conjointe du préfet de police et du préfet de Paris, car les travaux ont été validés…Demeure une question –toute bête- : quelle idée a-t-on eu d’installer un commissariat de police au cœur d’une zone sensible ?  Sans doute pour calmer les esprits d’une jeunesse perdue, qui préfère le trafic de stupéfiants à la poursuite des études, -beaucoup plus rentable-, délaissée par des parents, eux aussi perdus ? Sans doute aussi pour renforcer le lien police- nation, comme jadis existait le lien armée-nation ?  Eh bien, c’est loupé…Totalement. Car désormais, ici, la police est considérée, par beaucoup, comme une force illégitime de la République alors qu’contraire elle devrait être perçue comme un rempart contre l’illégalité.

Aujourd’hui, le pouvoir politique doit s’interroger  sur les causes qui ont fait que cette ville nouvelle( 25 000 habitants), surgie de terre il y a quarante ans, aux immeubles conçus sur les préceptes de Le Corbusier, destinée à accueillir des cadres et des chercheurs, s’est au fil des ans paupérisée, pour devenir, au sein du département, l’une des communes les plus touchées par un mal vivre inquiétant et une délinquance de plus en plus difficile à endiguer…

Or, il y a déjà un précédent, celui de Grigny,(30 000 habitants) où la cité de la Grande Borne,(15 000 habitants) construite dans les années 70  par un autre célèbre architecte, Emile Aillaud,  avait pour vocation de devenir  "une ville civilisée à l’échelle d’affinités humaines". Espoir déçu : elle  s’est transformée, en quelques années en haut lieu du trafic de drogue et d’agressions en tout genre  de l’Ile-de-France. Prête à tout moment à exploser.

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