Nouvelles mesures Covid-19 : une grosse dose de com’ politique, une petite dose de sanitaire<!-- --> | Atlantico.fr
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Le ministre de la Santé, Olivier Véran, lors d'une conférence de presse le jeudi 25 novembre, a annoncé de nouvelles mesures pour lutter contre la Covid-19.
Le ministre de la Santé, Olivier Véran, lors d'une conférence de presse le jeudi 25 novembre, a annoncé de nouvelles mesures pour lutter contre la Covid-19.
©Thomas COEX / POOL / AFP

Lutte contre la cinquième vague

Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a présenté de nouvelles mesures ce jeudi pour lutter contre la pandémie de Covid-19 cet hiver. Les mesures comme le port du masque, la troisième dose et le protocole dans les écoles sont-elles susceptibles de réellement enrayer la vague épidémique ?

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Jérôme Marty

Jérôme Marty

Président de l'Union française pour une médecine libre, Jérôme Marty, est médecin généraliste et gériatre à Fronton, près de Toulouse.

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Atlantico : Quel regard portez-vous sur les annonces du gouvernement pour enrayer la cinquième vague ?

Antoine Flahault : Les mesures annoncées par le gouvernement montrent qu’il mise essentiellement sur la troisième dose du vaccin chez les adultes et sur l’obligation du port du masque à l’intérieur pour espérer reprendre la main sur la vague automnale. La vaccination des enfants de moins de 12 ans commencera probablement après le pic de cette vague, donc ne contribuera pas à sa reprise en main.

Jérôme Marty : Les annonces étaient assez attendues certaines sont bonnes d’autres moins. Certaines relèvent réellement du sanitaire et de la science, d’autres sont plutôt liées à un intérêt structurel et politique. Raccourcir le délai entre la deuxième dose et la troisième n’a aucune justification sanitaire, c’est une décision structurelle pour aller plus vite. Modifier le pass sanitaire et déterminer qu’il ne sera plus valable au bout de sept mois, c’est aussi une décision politique. Ces décisions sont une façon de rendre obligatoire la troisième dose. 

Certaines mesures vous semblent-elles susceptibles de réellement enrayer la vague épidémique ? Y a-t-il des mesures qui ne vont pas dans le bon sens selon vous ?

Antoine Flahault : Le gouvernement dispose d’un temps très court, deux ou trois semaines, pour espérer enrayer un phénomène épidémique qui prend une ampleur considérable dans les pays voisins. À part le rappel du port du masque en milieu intérieur et la préconisation d’une meilleure aération des lieux clos, aucune des mesures annoncées ne peut laisser espérer qu’elles serviront à lutter avec vigueur contre la vague actuelle.

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La mesure concernant les écoles ne visent en rien la réduction de la transmission chez les enfants.

Jérôme Marty : On peut considérer que recommencer à porter le masque à l’intérieur est une bonne chose, à l’extérieur ça ne sert pas à grand-chose sinon à montrer qu’il y a une circulation virale importante. En revanche, le protocole à l’école visant à dire que plus aucune école ne va fermer est complètement aberrant. Cela va à l’opposée de ce qu’il faudrait faire. Ce qu’il faut comprendre c’est qu’un enfant positif à J0, il est contaminant au moins depuis J-2 et il a potentiellement contaminé autour de lui. Si l’on teste les élèves à ce moment-là, ils seront négatifs même s’ils sont contaminés. Cela va contribuer à diffuser l’infection. Cette décision nous a surpris mais elle suit toujours le même crédo : école ouverte. Or, on a un gros problème avec les écoles aujourd’hui, plus de 8500 classes sont fermées et l’Education nationale a un comportement d’autruche. A la place de couper le flux, on va l’augmenter. Si on avait rajouté cette mesure en plus de fermer les écoles, ça aurait été la mesure intelligente. Le problème est qu’on prend cette décision pour laisser les écoles ouvertes, en particulier les maternelles, car on les considère comme des garderies pendant cette crise. Concernant les PCR qui ne seront valables que 24h, c’est une nouvelle manière d’inciter à la vaccination. Mais ce qui va vraiment inciter les gens, c’est la fin de la validité du pass sanitaire sept mois après la deuxième dose.

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Jérôme Marty : Si le médicament est suffisamment efficace, cela peut suffire à tenir. Il sera réservé aux formes graves car le traitement coûte plus de 700 euros. Le but est évidemment d’avoir le moins de cas graves possibles pour avoir le moins d’impact sur les hôpitaux possible et prendre en charge tous les patients sans créer des pertes de chance pour les autres patients.

Quels sont les sujets qui demeurent selon vous les angles morts de la politique du gouvernement ?

Antoine Flahault : Il y a deux angles morts dans ces annonces.

La ventilation efficace des lieux clos recevant du public qui aurait nécessité des mesures réglementaires contraignantes que le gouvernement semble avoir écartées aujourd’hui.
Le positionnement des nouveaux médicaments antiviraux qui aurait demandé une mission d’expertise indépendante rapide et qui n’a pas été initiée pour envisager de traiter largement des personnes qui pourraient en bénéficier, visant à réduire les formes graves de Covid-19, conduisant à l’hospitalisation et au décès.

Jérôme Marty : La communication gouvernementale ne met toujours pas l’accent sur l’aération, sur les détecteurs de CO2, sur l’équipement scolaire, sur la communication autour du fonctionnement du vaccin, etc. On impose ce vaccin aux gens qui pour certains le font contraints et forcés alors que si on leur expliquait clairement et simplement comment il fonctionnait, on ferait tomber un certain nombre de doutes. Et ce sont des mesures qui ne coûtent pas grand-chose.

Rappelons aussi que nous devons à nouveau vacciner presque 20 millions de personnes. Auparavant, nous comptions sur les vaccinodromes, les centres, etc. Or beaucoup de centres ont fermé, on va tout faire reposer sur la médecine de ville. C’est envisageable mais il nous faudrait des monodoses, sinon, cela implique de dégager des plages horaires pour faire de la vaccination. Mais nous avons des bronchiolites, des gastros, des rhinopharyngites, des grippes, etc. autant de maladies saisonnières qu’il faut gérer.

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Qu’auraient-ils pu annoncer de plus pour agir efficacement, et idéalement à moindre coût, sur la pandémie ?

Antoine Flahault : On ne voit pas de véritable plan de bataille, destiné à lutter contre cette vague pandémique automnale qui s’annonce pourtant d’une force inédite dans tous les pays voisins où elle déferle actuellement. Le gouvernement semble plutôt enclin à attendre la tempête qu’à se montrer décidé à tout faire pour en atténuer les effets potentiels. Comme un peu partout en Europe, une fois de plus c’est une politique réactive certes mais qui ne se montre pas proactive qui est choisie par le gouvernement français.

Jérôme Marty : Il aurait fallu rétablir la gratuité des tests. Quand le virus circule beaucoup il faut mettre toutes les chances de son côté. On enregistre environ 32.000 cas mais c’est très sous-évalué car beaucoup de gens ne se testent pas.

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