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Nouveau monde ou pas, la France retombe dans ses pires travers en matière de finances publiques
©Reuters

Atlantico Business

Les bons chiffres du déficit budgétaire en cachent de mauvais. Ceux de la dette, de la pression fiscale et des dépenses publiques sont désastreux.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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On peut toujours se réjouir de la baisse annoncée du déficit budgétaire sous le plafond de 3%, on peut l’expliquer mais on n’a pas le droit de s’exonérer de la vérité. Or, la vérité en matière de finances publiques est toujours difficile à reconnaître parce qu’elle révèle souvent l’ampleur de nos lâchetés ou de notre manque d’expertise.

1er point : le déficit budgétaire est tombé sous la barre des 3%, à 2,6%. C’est évidemment une bonne nouvelle. C’est la première fois, et cette performance va nous permettre de sortir de la zone de contrôle et de surveillance honteuse et couteuse de Bruxelles. Cela dit, ce n’est pas pour autant que ce déficit va nous permettre d’accéder à une zone de confort.

2e point : cela dit, les autres chiffres budgétaires sont désastreux. Le montant de la dette a encore augmenté, proche de la barre de 100% du PIB, les dépenses publiques approchent les 56% et du coup, la pression fiscale touche les 45%.

3e point :le gouvernement a raison de ne pas crier victoire trop vite. La baisse du déficit nous libère un peu du joug de Bruxelles, mais ne nous affranchit absolument pas des autres contraintes. Le déficit a baissé parce que le total des recettes fiscales a augmenté avec la croissance.

4e point : les dépenses publiques ont continué de grossir au point d’approcher les 56% du PIB. Ce qui veut dire que la maison France a continué de dépenser de l’argent que nous avons trouvé dans les impôts, gonflés par l’activité, et dans la dette. Nous avons une mécanique fiscale qui tourne merveilleusement bien. Cela dit, ce résultat ne règle absolument aucun de nos problèmes structurels.  

5e point : On peut toujours se lamenter de la pression fiscale, c’est vrai que globalement la recette fiscale étant indexée sur l'activité a augmenté, mais comme l'impôt est aussi progressif, il a augmenté plus vite que l’activité.  D’où la requête lancinante qui consiste à penser qu’on a constitué une cagnotte qu’il faudra bien distribuer, donc diminuer la pression fiscale. Logique ? Oui, sauf que le seul problème, c’est que cette bonne fortune n’est pas durable. Si l’activité économique retombe, la recette fiscale se rétrécit et le déficit augmente

6e point :la situation actuelle dont le monde se félicite avec des yeux gourmands n’est donc pas sécurisée. Et pour la sécuriser, le seul moyen serait de baisser la dépense publique. Si on baisse la dépense publique, on baisse notre déficit, on diminue les besoins de financement, donc la dette. Dans ce cas-là, on peut commencer à baisser l’impôt. 

7e point : la question des dépenses publiques est taboue en France. Et pourtant, on devrait essayer de comprendre pourquoi la France bat le record de la dépense publique en Europe. Pourquoi l’Allemagne affiche un taux de dépense publique de 44% du PIB, ce qui la ramène à 13 points de moins que la France. Les allemands vivent tout aussi bien que nous avec des services publics qui marchent en moyenne plutôt mieux que les nôtres. La santé des allemands est bonne, leur système d’éducation est bien meilleur que le nôtre. Et l’Allemagne dépense 100 milliards de moins que nous. Alors, l’Allemagne a une démographie moins couteuse que la nôtre parce que sa population est moins jeune, donc moins de frais généraux et sociaux. Encore que les retraites soient plus lourdes, avec des dépenses régaliennes sur la défense moins lourdes.

Globalement, c’est dans l’organisation et le management de son administration que l’Allemagne gagne. Ainsi que dans son périmètre.

Nous avons en France un problème d’efficacité de la dépense publique et une incapacité à se remettre en cause. Le moindre projet de réorganisation ou de mise en concurrence se transforme en drame national.

Conclusion, aujourd’hui encore, la France toutes classes confondues se félicite du retour de la croissance, mais se met au bord de la colère à propos de la pression fiscale. Si jamais un analyste de base et de bons sens rappelle que si nous dépensions moins (en dépenses publiques et sociales), on pourrait commencer à baisser le poids des impôts, il est immédiatement voué aux gémonies. Courage fuyons.

Ce refus de considérer que l’argent consacré à la dépense publique constitue l’essentiel des revenus de redistribution pour tous ceux qui les actionnent où en bénéficient.

Or, les revenus de redistribution se nourrissent des revenus de production ou de l’emprunt (revenus à venir), mais ils sont aussi en concurrence avec les revenus de production. Ce qui a forcément un impact politique.

Mais attention, si la dépense publique (en gros les revenus de redistribution) dépasse les 50%¨du PIB, cela veut dire que les agents économiques normalement rationnels ont plus d’intérêt à chercher des revenus de redistribution (agents de la fonction publique, bénéficiaires de prestations diverses et multiples) que des revenus de production dans les entreprises de marchés.

« Voilà pourquoi votre fille est muette » disait Molière, voilà pourquoi la France va s’étouffer tranquillement sous la dette et les impôts, si elle ne réduit pas la dépense publique. 

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