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On refait le match ! 
Les 10 moments qu'il fallait retenir 
du face à face Sarkozy/Fabius
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"Des paroles et des actes"

Invité de l'émission "Des paroles et des actes", mardi soir, Nicolas Sarkozy a répondu aux questions des journalistes puis affronté un Laurent Fabius qui n'a pas su mettre en avant le programme de François Hollande.

Roger Célestin

Roger Célestin

Roger Célestin est journaliste.

Il écrit pour Atlantico sous pseudonyme.

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1. Laurent Fabius n’a été pas été à la hauteur. C’est regrettable car il est parmi les hommes politiques les plus intelligents, brillants et capables. Mais hier soir, il n’a pas tenu la route face à Nicolas Sarkozy. Son choix d’attaquer le débat en répondant aux attaques du candidat de l’UMP sur François Hollande a été désastreux, Sarkozy ayant beau jeu de lire le florilège préparé par ses conseillers et intitulé, comme tous les téléspectateurs ont pu le voir lors d’un gros plan « petites phrases de Laurent Fabius sur François Hollande ». Et il y en avait beaucoup, et des méchantes !

2. Il faut rappeler que dans la même émission la prestation d'Alain Juppé (le symétrique de Fabius à droite par le talent) face à François Hollande avait été tout aussi décevante. Peut-être une conséquence de cette idée d'opposer à ces candidats des numéros deux  ? Une sorte de difficulté quasi ontologique de positionnement ?

3. A part la question sur la fiscalisation des nouveaux revenus pour les bas salaires, à laquelle n’a pas répondu Nicolas Sarkozy, Laurent Fabius s’est contenté d’une formule, plutôt faible d’ailleurs (« votre bilan, c’est votre boulet ») en comparaison de ce que sa créativité habituelle lui permet de trouver.

4. Fabius n’a pas su montrer en quoi le programme de François Hollande pouvait représenter une alternative crédible et attrayante. Il a donné une image molle, confite, comme s’il s’était « flambysé ». On n’avait pas du tout l’impression d’un homme prêt à exercer le pouvoir, ni qu’il en avait la moindre envie... Des généralités sur le chômage et le pouvoir d'achat. Pas de perspective, pas d'élan. Où était le projet ?

5. Du coup, Sarkozy est apparu affûté, au fait de ses dossiers, débordant d’énergie et de convictions, avec une dose de recul et d’auto dérision. Il a au moins pu marteler son message : "Je me suis trompé, je pourrai d'ailleurs continuer à me tromper, qui ne s'est jamais trompé ? Mais mon crédit est d'avoir agi et je continuerai à le faire car telle est ma responsabilité : effectuer les changements dont la France a besoin, quitte à bousculer les conservatismes de tout poil". Je ne dis pas qu'il a raison sur tout, loin de là, je ne sais pas s'il est totalement honnête, je suis certain que des logiques intéressées s'activent aussi en coulisse, mais ce positionnement a eu, hier soir, le mérite de la clarté.

6. Et quand Franz-Olivier Giesbert, en fin d'émission, a cru lire de la tristesse dans ses yeux, c’était peut-être de l’abattement face à la pauvreté des questions qu’il avait subies.

7. Marre de cette approche socio psycho pipo des journalistes de télé et de leurs pseudo analyses ne reposant que leurs perceptions personnelles ! Quel décalage avec la réalité et les enjeux ! A l’heure de la crise, la faiblesse de leurs questions était déconcertante. Surtout sur une chaîne du service public, on attend davantage de professionnalisme. Ils pensent qu'un harcèlement stérile de leur interlocuteur sur sa personnalité prouve leur indépendance. Mais cette espèce d'introspection télévisée n’apporte rien au citoyen pour l’aider à faire son choix. Ce qui honorerait la télévision, c’est de produire des questions solides, avec des chiffres, des faits, des arguments. On en était très loin hier soir. L’émission s’appelle "des paroles et des actes". Elle ne traite que des paroles, et encore de manière voyeuriste, indécente parfois, superficielle tout le temps, et donc sans aucun intérêt. Point de journalistes, mais des sortes de confesseurs psychologues mondains autosatisfaits !

8. Sauf François Lenglet, un vrai journaliste, qui connaît ses dossiers. Il a tiré nettement son épingle du jeu, tout comme, dans un autre registre, Franz-Olivier Giesbert. Le patron du Point a d’ailleurs remarqué que le sujet, majeur, central, de la dette avait été sous-traité pendant l’émission. Le temps passé sur le Fouquet’s et sur le yacht de Bolloré était totalement disproportionné !

9. Les journalistes auraient pu faire remarquer à Nicolas Sarkozy (comme a commencé à le faire FOG) qu'il a des responsabilités dans la dette. Ainsi l'accord signé en 2004 avec les policiers quand il était ministre de l’Intérieur coûte très cher aux finances publiques. D’ailleurs, de ce point de vue, ce qu'il présente comme une évidence logique, affecter 50% des économies générées par le non-remplacement du « un fonctionnaire sur deux », est discutable. Ce choix diminue fortement le bénéfice de la mesure. La contrepartie de la faiblesse des salaires des fonctionnaires (encore qu’il ne faut pas généraliser), c’est la sécurité de l’emploi et un temps de travail très raisonnable. Il aurait été courageux et efficace de reporter à la sortie de la crise budgétaire la politique d’augmentation des traitements.

10. Au-delà de l’émission, certains ont pu dire que Sarkozy avait une approche « avocat d’affaires » des sujets publics, plus qu’une approche « homme politique » classique, en ce sens qu’il négocie tout de suite, en cherchant une solution « gagnant - gagnant » pour faire bouger les sujets. En tout cas, concernant sa proposition d'augmenter le temps de présence des enseignants du secondaire dans les collèges et lycées, qu’il a bien défendue hier soir, je peux vous dire qu’un avocat d’affaires débutant n’aurait jamais, comme l'a fait le candidat Sarkozy, mis sur la table simultanément l'effort demandé et sa contrepartie. Il aurait procédé en deux temps, comme dans toute négociation. Sa méthode provoque un refus, automatique, de l'ensemble, et le met donc en position de faiblesse pour négocier.

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