Ni se renier, ni se répéter : le défi d’Emmanuel Macron pour 2022<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron, lors d'un déplacement officiel. Guillaume Tabard publie "Macron, la révolution inachevée" aux éditions Robert Laffont.
Emmanuel Macron, lors d'un déplacement officiel. Guillaume Tabard publie "Macron, la révolution inachevée" aux éditions Robert Laffont.
©STEPHANE MAHE / POOL / AFP

Bonnes feuilles

Guillaume Tabard publie "Macron, la révolution inachevée" aux éditions Robert Laffont. La "Révolution" n'a pas eu lieu. C'était pourtant le titre du livre par lequel le presque inconnu devenu président était monté sur le ring politique. Au terme de son mandat, le bilan d'Emmanuel Macron sera vanté par les uns, dénoncé par les autres. Guillaume Tabard a suivi au jour le jour l'émergence, la campagne, la victoire puis la présidence d'Emmanuel Macron. Extrait 2/2.

Guillaume Tabard

Guillaume Tabard

Guillaume Tabard est rédacteur en chef et éditorialiste au Figaro. 

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10 septembre 2021

Les macronistes réfléchissent à l’entrée en campagne de leur champion.

Un des ministres les plus macronistes le reconnaît : « Jacques Chirac a supprimé le service militaire, François Hollande a fait le mariage pour tous. Quel grand marqueur irréversible restera du quinquennat d’Emmanuel Macron ? » L’interrogation est cruelle car elle oppose deux mandats réputés peu audacieux sur le plan des réformes à un mandat qui se targuait d’opérer une véritable « transformation » du pays.

Pour le chef de l’État, l’enjeu de la prochaine présidentielle dépasse largement la question du bilan. Des réformes, il en a lancé. Des résultats, il peut en afficher. Des crises, il en a affronté. Et comme pour chaque président sortant, son action a fait des satisfaits et des mécontents ; parfois des très mécontents. Mais en 2022, Macron ne sera pas uniquement confronté à ses résultats, il sera tout autant renvoyé à sa promesse originelle. Celle du mouvement, du « dépassement » et de la « Révolution », mot crânement choisi en titre de son livre programme. Certes, les turbulences nationales des « gilets jaunes » et le séisme mondial du Covid l’ont obligé à s’adapter, à corriger le tir, presque à se « réinventer ».

Dans un premier temps, la consigne donnée aux différents acteurs de la majorité est de faire l’inventaire de ce bilan et de le revendiquer. Mais à l’heure de la confrontation, le président sait que, dans une campagne de réélection, le scrutin n’est pas uniquement un test comparatif entre prétendants ‒ auquel cas le statut et l’expérience sont des avantages ‒, mais d’abord un référendum sur le sortant : le garder ou le remplacer ? La première tâche du futur candidat sera donc de convaincre les Français que leur pays a été transformé et que leur vie a véritablement changé ; et en bien. Ce qui, compte tenu du poids de la réalité et des limites de toute action publique, ne sera pas le plus simple.

De cette première difficulté en découle une seconde : la manière de justifier une nouvelle candidature. Macron devra concilier un double impératif : ni se renier ni se répéter. L’ADN fondateur, le fameux libérer-protéger, doit donc se retrouver dans le projet 2022. Mais la frontière est étroite entre le besoin de cohérence dans l’action et le sentiment que les cinq nouvelles années demandées ne serviront qu’à achever ou reprendre ce qui, par manque de temps, par renoncement ou du fait de contraintes extérieures, n’a pas été mené à son terme durant le premier quinquennat.

Interrogés sur les thèmes à mettre en avant, les proches du chef de l’État citent ainsi la fameuse réforme des retraites, dont l’évocation sous forme d’annonces et de démentis permanents vire au feuilleton lassant. Ou encore les chantiers institutionnels censés réoxygéner la démocratie, mais dont la proclamation ne fait que souligner l’incapacité de l’exécutif à les mener durant le premier mandat. Il y aura donc, sur ces sujets et tant d’autres, non seulement des engagements à reprendre mais aussi un dis‑ cours de la méthode à écrire afin de les rendre crédibles.

Ces mois de transition sont aussi pour Emmanuel Macron l’occasion de réfléchir au cadre politique qu’il entend mettre en place pour l’avenir. S’il a réussi la déflagration de la bipolarisation ancienne, il a en grande partie échoué dans son opération de recomposition, LREM n’étant pas devenu un pôle d’attraction durable. Le chantier d’une nouvelle « maison commune » est lui aussi lancé. Mais la future architecture dépendra beaucoup de la physionomie du second tour, laquelle n’est pas la moindre des inconnues de la prochaine présidentielle.

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Mesures d’urgence et réformes de long terme

15 septembre 2021

À Roubaix, le chef de l’État présente les conclusions du Beauvau de la sécurité.

Les derniers mois d’une présidence sont toujours d’un manie‑ ment délicat. Emmanuel Macron aujourd’hui, comme ses prédécesseurs hier, s’expose à deux procès contraires. Qu’il lève le crayon et mette toute action en veilleuse, et on lui reprochera de ne plus rien faire, de renoncer à agir jusqu’au bout, de céder à l’immobilisme par excès de prudence électorale. Mais qu’il ouvre des chantiers et lance des réformes, on lui reprochera alors de faire de l’électoralisme ou, pire encore, d’avoir attendu plus de quatre ans pour découvrir la réalité d’un problème.

Les conclusions du « Beauvau de la sécurité », présentées ce mardi à Roubaix, illustrent la manière dont le chef de l’État entend conjurer ce piège. D’abord, présenter et défendre un bilan. Ce fut une partie substantielle de son discours, histoire de prouver qu’il n’y a pas de sa part une conversion tardive aux enjeux régaliens. Le rappel est nécessaire, mais insuffisant tant l’idée s’est installée dans l’opinion que la sécurité était l’angle mort de ce quinquennat. En particulier à droite, où l’on mise sur un avantage comparatif en la matière. Défié sur ses terres des Hauts-de-France, Xavier Bertrand a par exemple riposté sur le thème : trop tard et trop peu.

Mais le problème est plus profond encore ; et le défi est lancé aux sortants autant qu’aux prétendants. Comme naguère face au chômage, les Français sont échaudés par des plans successifs qui, quels que soient les moyens mis sur la table, ne produisent jamais les effets escomptés.

Face à ce double scepticisme ‒ sur le moment et sur l’efficacité ‒, Emmanuel Macron tente d’apporter une double réponse. D’abord en termes de calendrier en enjambant l’élection présidentielle. Une nouvelle loi de programmation sera ainsi présentée dès la fin de cette année, même si elle ne sera votée au Parlement qu’après les prochaines législatives. Une manière de dire : voyez, on n’attend pas pour décider, mais réélisez-moi pour passer aux actes. Cette manière d’installer un continuum sera la marque de fabrique de la fin du quinquennat. Même s’il ne va pas au bout de sa logique sur une autre réforme également décisive, celle des retraites. Mais, à tout le moins, Macron veut convaincre qu’il ne fait pas des contingences de la durée un alibi de l’inaction.

La seconde réponse consiste à conjuguer mesures financières de court terme et réformes structurelles de long terme. Des millions tout de suite pour répondre à des besoins d’urgence ; des transformations de fonctionnement pour apporter la garantie qu’il ne s’en tient pas à la seule politique du carnet de chèques, mais qu’il s’agit d’une reconsidération globale des politiques publiques. En un mot, Macron jongle entre la hâte de la fin de mandat, pour obtenir au plus vite ‒ c’est-à-dire avant avril ‒ des résultats concrets, et le souci de revenir à l’ADN fondateur de sa démarche : la « transformation » du pays. Sur la sécurité, le chef de l’État reprend donc l’approche déjà rodée il y a moins de deux semaines à Marseille. Urgence et long terme à la fois : la pierre philosophale de la campagne macronienne ?

A lire aussi : Emmanuel Macron, un président sur le terrain médiatique de la droite

Extrait du livre de Guillaume Tabard, "Macron, la révolution inachevée", publié aux éditions Robert Laffont.

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