Municipales à Marseille : une analyse par bureaux de vote pour comprendre la contre-performance du PS au 1er tour<!-- --> | Atlantico.fr
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La ville de Marseille
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©Reuters

Géographie de l'échec

Le parti socialiste a rencontré des difficultés partout en France lors de ce premier tour des élections municipales. Le paroxysme est atteint à Marseille, où les affaires Guérini n'ont fait qu'accentuer l'impopularité de la gauche et démobiliser son électorat traditionnel.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Atlantico : Troisième derrière l’UMP et le Front national au premier tour des municipales à Marseille, le Parti socialiste n’a pas rempli ses objectifs. Dans quelle mesure le terme de contre-performance est-il justifié ?

Jérôme Fourquet : Alors qu’ils envisageaient de prendre la ville de Marseille, les socialistes ont indiscutablement échoué. Avec à peine 20%, ils sont devancés de quasiment deux points par le FN. Ajoutons que Patrick Menucci avait noué une alliance avec les écologistes. Même à deux, ils n’ont pas fait le poids. Le fameux troisième secteur, qui devait faire bascule, est resté hors de portée de la gauche, et même dans le sien, Patrick Menucci est en grande difficulté. Pire qu’une contre-performance, on peut parler de déroute. Dimanche nous dira si le PS parvient à mobiliser les foules.

Comment expliquer la débâcle socialiste du premier tour à Marseille ?

Nous distinguons deux facteurs principaux. A Marseille, plus qu’ailleurs en France, l’électorat socialiste s’est très massivement abstenu. Plus François Hollande faisait des scores importants dans un bureau de vote (premier graphique),  plus celui-ci a eu tendance à s’abstenir massivement dimanche dernier.

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On relève à peine 40% d’abstention dans les bureaux de vote les moins socialistes, et 60 % voire davantage dans ceux qui ont le plus voté pour François Hollande. Ce qui a prévalu un peu partout en France s’est avéré particulièrement marqué à Marseille : une démobilisation à gauche, et une belle mobilisation à droite. On le voit bien dans les quartiers populaires du nord, la gauche a eu du mal à mobiliser son électorat traditionnel.

Deuxièmement, les socialistes ont du faire face à la concurrence imprévue de l’ancien président de l’OM, Pape Diouf. Il a fait 6%, ce qui ne l’a pas mis en position de faiseur de roi, néanmoins il a pesé dans le mauvais résultat de la gauche puisqu’il a essentiellement capté des voix socialistes. Plus François Hollande a fait un bon résultat dans un bureau de vote, plus Pape Diouf a fait des scores importants dans ce bureau. Moins de 4 % dans les bureaux les moins socialistes, et 13 % en moyenne dans les bureaux les plus favorables à Hollande en 2012. C’est autant de voix en moins pour Menucci.

Comment expliquer cette tendance ?

Pape Diouf se revendique ni de gauche, ni de droite. Mais en raison de son image, son parcours, son programme et ses colistiers, c’est d’abord dans l’électorat de gauche que sa candidature a rencontré un écho. Ceux qui pensaient que son « image OM » l’affranchirait de toute étiquette ont été détrompés.

Pour aller plus loin, nous avons comparé le score de Patrick Menucci ce dimanche avec le total des voix de Hollande avec celles d’Eva Joly. Il n’était pas illogique de faire cette comparaison, puisque Menucci s’est allié aux Verts. On voit une corrélation très nette entre l’ampleur du recul de Patrick Menucci par rapport à son potentiel (le résultat des deux partis aux présidentielles) et la progression de l’abstention entre la présidentielle et les municipales.

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Nous avons aussi regardé l’évolution du score de Pape Diouf et de celle des autres listes sans étiquette. Leur score est marginal, mais on voit qu’à l’instar de Pape Diouf, plus Menucci est en retrait par rapport à ce qu’il pouvait espérer, plus les sans étiquettes ont fait de bons scores. La concurrence a fait des dégâts au PS. Le clan Guérini ne serait pas totalement étranger à cette concurrence. Et même si cette concurrence est à la marge, les listes en questions font des scores non négligeables aux alentours de 6 %.

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Nous nous sommes demandé si une partie de l’électorat traditionnel de gauche n’a pas voté pour Jean-Claude Gaudin ou pour le FN, qui a tout de même fait de bons résultats. Or on ne constate pas de corrélation, ou seulement à la marge, entre l’ampleur des pertes de Menucci par rapport à son capital de départ, et la progression de la droite (Gaudin par rapport à Sarkozy) et du FN (comparé à Marine Le Pen il y a deux ans). La victoire de Gaudin et du FN s’explique donc d’abord par leur capacité à mobiliser les électeurs. Dans le même temps Menucci devait faire face à l’impopularité du gouvernement, aux affaires locales, et aux listes sans étiquettes qui ont ponctionné le PS. Des problèmes que ne rencontre pas l’UMP.

Marseille est-il le cas paroxystique de la gauche minée par ses défauts ?

C’est un des exemples où les difficultés locales se combinent aux difficultés nationales. Là où la chose est frappante, c’est que la sociologie de la ville, qui est populaire, ne laissait pas augurer un tel résultat.

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