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Une manifestante lors d'un rassemblement contre les violences faites aux femmes avec des slogans des mouvements MeToo et balancetonporc inscrits sur sa main.
Une manifestante lors d'un rassemblement contre les violences faites aux femmes avec des slogans des mouvements MeToo et balancetonporc inscrits sur sa main.
©BERTRAND GUAY / AFP

Société

Grand est le mal-être du mâle contemporain.

Je suis un homme (blanc). Je suis cet être honni, responsable du malheur du monde, coupable par le seul fait qu’il existe. Du moins c’est ainsi que je suis désormais décrit. Pourtant je ne me reconnais dans aucun des portraits que des Torquemada brossent désormais sur les plateaux. Je ne suis pas harceleur. Je tiens la porte aux gens, il est vrai avec plus d’empressement devant les dames. Je n’ai pas l’impression d’être un oppresseur en étant galant. Oui, j’ai cherché dans ma vie, surtout quand j’étais plus jeune, à séduire des demoiselles. Mais en respectant toujours les règles subtiles du jeu de l’amour. Je n’ai jamais eu l’audace d’arrêter quiconque dans la rue. Et l’idée d’insulter une fille pour un refus me paraît aussi inimaginable que celle de commettre un vol à main armée. Question d’éducation sans doute, cette valeur dont il n’est plus permis de parler tant elle suggère en creux la triste vérité qu’il existe en effet une catégorie d’hommes qui sont d’authentiques porcs.

Mais c’est là tout le problème : il ne semble plus possible de dire que nous n’en faisons pas tous partie. Les gens comme moi sont nés au mauvais moment. Celui où ils doivent payer pour un ordre du monde révolu dont ils n’ont pas profité et auquel ils n’ont jamais prêté la main.

La vérité, c’est que la charge mentale dans le couple, quand vous êtes un homme moderne, c’est vous qui l’avez. Depuis toujours, on a attendu de moi que je fasse les meilleures études, que je sois solide, que je ne pleure pas et que je gagne l’argent du ménage. Mon épouse a toujours trouvé parfaitement normal que je sois responsable en dernier ressort de notre compte en banque. Malgré tous mes efforts, elle n’a jamais voulu considérer que l’argent pouvait être un problème. C’est aussi moi qui bricole répare, et réponds aux urgences du quotidien. Dans le même temps, on a exigé que je sois un père moderne, m’occupant autant de mes enfants qu’elle. La puériculture n’a plus de secret pour moi. Je l’ai fait avec bonheur, mais en me chargeant ainsi d’une pression immense supplémentaire qui m’a obligé à sacrifier bien des vacances pour travailler afin d’arrondir les fins de mois malgré l’immense fatigue liée aux nuits difficiles.

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L’homme moderne cumule les contraintes du Pater familias et ceux de la femme d’hier. Il a perdu la liberté du premier mais en conserve les contraintes. Et il s’est chargé d’une partie du fardeau de la seconde.

Mais ce n’est pas tout. Alors que nous faisons encore tourner le monde, on nous demande de faire pénitence.

Nous sommes nombreux à baisser la tête et à nous taire, à serrer les dents devant les outrances progressistes contres lesquelles la moindre remise en cause équivaut à un arrêt de mort sociale. Comment pourrais-je m’exprimer à visage découvert ? La liste des vérités qui ne sont pas bonnes à dire ne cesse de s’allonger. Je subirais les foudres de la bienpensance si je donnais mon identité, et pourrais y perdre mon travail. Les meutes des réseaux sociaux s’abattraient sur moi et me dépèceraient comme un cerf à l’hallali.

La peur a changé de camp. Mais l’injustice aussi. Qui dira celle subie par les hommes qui, comme cela m’est plusieurs fois arrivé, perdent un poste ou une opportunité au profit d’un autre candidat moins compétent au seul motif que dernier appartient à telle ou telle minorité ? Il nous est interdit de dire le scandale absolu que représente cette perte de chance pour ceux qui sont, selon tous les critères objectifs, meilleurs que la personne choisie.

Nous avons dévoyé l’égalité homme-femme en la fiction malsaine d’une absence totale de différence entre les deux. Il n’est plus possible de s’opposer publiquement aux mythologies contemporaines de l’indifférence des sexes. Du moins pas si vous voulez éviter le bannissement.

Qui aura le front de dire ce que tout le monde sait : la parité en politique a eu pour effet de propulser quantité de nulles dans des fonctions où elles ne contribuent guère à redonner sa crédibilité à la fonction d’élue ? Certains élus masculins s’en sont servi avec cynisme, y voyant un moyen d’éloigner des rivaux gênants tout en donnant les apparences d’une promotion vertueuse de la diversité. Nous avons pu constater que l’incompétence n’était pas un privilège masculin.

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Qui aura le courage de dire que les femmes et les hommes n’ont pas naturellement les mêmes inclinations professionnelles[1] ? Que la recherche du pouvoir est par exemple plus rare chez les femmes que chez les hommes[2] ? Qu’il existe des différences indubitables entre nous qui rendent certains métiers plus féminins ou masculins et que la parité absolue est une stupidité ?

Comment dire tout haut aujourd’hui qu’il n’y a pour l’écrasante majorité des gens que deux sexes, masculin et féminin, et que les discours sur la « fluidité » sont des lubies d’une frange infime de la population qui ne s’imposent que par une sorte de terrorisme intellectuel ? Comment dire tout haut ce que la science sait : non, la différence des sexes n’est pas entièrement un construit culturel[3]. Loin de là.

Les évidences ne peuvent plus se dire à visage découvert. Pire : certains savoirs scientifiques se passent désormais sous le manteau.

Qui pourra dire aussi ce que les études ont prouvé : si l’intelligence moyenne des femmes est celle de l’homme, la variance de celle des hommes est plus forte pour les aptitudes numériques et mathématiques[4] ? Cela fait que les personnalités les plus exceptionnelles relativement à ces compétences (et à celles qui les mobilisent) se retrouvent en plus grande quantité parmi les hommes. Le très faible nombre de femmes parmi les meilleurs joueurs d’échec en semble une illustration. Ce qui n’enlève rien aux qualités féminines et aux authentiques génies femmes.

Grand est le mal-être du mâle contemporain. Les vérités sont condamnées à être tues. Continuons donc à ne pas dire tout cela. Observons le silence, et sous la contrainte mentons même, pour nous protéger, en prononçant les paroles de soumission qu’on attend de nous. C’est l’heure du crépuscule. L’aube viendra bien pour qui sait attendre.

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[1] Les études établissent de façon indubitable qu’en moyenne les femmes sont plus attirés par les métiers liés aux gens, et les garçons par les métiers liées aux choses (Murray Charles, Human diversity, Twelve, 2020, p.91).

Illustration frappante : La sous-représentation des filles dans les matières scientifiques augmente quand les filles ont plus de liberté de choix, ce qui signifie que cette sous-représentation traduit des différences de préférences et n’est pas la conséquence des discriminations (Gijsbert Stoet, David C. Geary, « The gender-equality paradox in science, technology, engineering, and mathematics education », Psychological Science, 2018).

[2] Lorsqu’Emmanuel Macron avait fait un appel à candidature pour les législatives 2017, ce dernier avait fait un appel spécial aux femmes car elles ne représentaient que 15% des premières candidatures. Le peu d’appétence des femmes en moyenne pour la politique peut être renforcé par le fait que, « même chez les plus douées, les femmes ont des priorités de vie et de travail différentes de celles des hommes, ce qui affecte leur trajectoire de carrière et leurs réussites » Murray Charles, Human diversity, Twelve, 2020, p.75.

[3] Murray Charles, Human diversity, Twelve, 2020, p.19 sq.

[4] « Le seul domaine où il est prouvé de façon fiable et homogène que les sujets masculins présentent plus de variabilité que les sujets féminins (et où, par conséquent, ils sont plus nombreux avec des particulièrement élevés) a trait au raisonnement numérique et aux mathématiques. »  Mackintosh N.J., QI et intelligence humaine, De Boeck, 2004, p.227. Ou aussi « une plus grande variance chez les mâles concernant une grande variété de traits est une caractéristique biologique fondamentale des humains et plus généralement des espèces dimorphiques) », Murray Charles, Human diversity, Twelve, 2020, p.357.

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