Logement : ces solutions pour désamorcer la bombe sociale<!-- --> | Atlantico.fr
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Un couple regarde les annonces d'une agence immobilière.
Un couple regarde les annonces d'une agence immobilière.
©AFP / Gaizka IROZ

Mesures adaptées

Face à la crise du marché de l'immobilier, l'application de certaines mesures ou des modèles venus de l'étranger pourraient permettre de trouver des solutions.

Robin Rivaton

Robin Rivaton

Robin Rivaton est chargé de mission d'un groupe dans le domaine des infrastructures. Il a connu plusieurs expériences en conseil financier, juridique et stratégique à Paris et à Londres.

Impliqué dans vie des idées, il écrit régulièrement dans plusieurs journaux et collabore avec des organismes de recherche sur les questions économiques et politiques. Il siège au Conseil scientifique du think-tank Fondapol où il a publié différents travaux sur la compétitivité, l'industrie ou les nouvelles technologies. Il est diplômé de l’ESCP Europe et de Sciences Po.

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Atlantico : Suite aux hausses successives des taux décidées par la BCE, les prix de l'immobilier ont commencé à baisser. Est-ce une bonne ou une mauvaise nouvelle ? Cette baisse des prix va-t-elle aggraver les problèmes de logement en France ou les alléger ?

Robin Rivaton : Il serait bénéfique que les prix baissent en raison d'une augmentation de l'offre. Actuellement, la baisse des prix ne profite pas aux ménages modestes ni aux primo-accédants, car ils ont été exclus du marché en raison des difficultés à obtenir un crédit.

Cette baisse est trompeuse, car elle survient après de larges hausses au cours des dernières années. Dès qu'il y aura une amélioration des taux, la demande reprendra et les prix augmenteront à nouveau. La crise du logement n'affecte pas tout le monde de la même manière. En France, 38% des propriétaires de résidences principales ont remboursé leur crédit et ne ressentent pas la crise du logement. Ils ont bénéficié d'une augmentation continue de la valeur de leur bien. 25% des Français sont en phase d'acquisition, mais ils ont souvent des crédits à taux très faible et à long terme. En revanche, les locataires du parc social voient la crise, car ils restent bloqués sans voir d'amélioration de leurs revenus. Les locataires du secteur privé sont encore plus touchés : malgré les dispositifs de plafonnement, leurs loyers augmentent. En résumé, la crise du logement est vécue de manière différente par chaque individu.

De quoi le poids de l'immobilier dans l'économie française est-il le symptôme ?

Dans les économies matures, le secteur immobilier a tendance à voir son poids augmenter. C'est ce que l'économiste appelle la "Loi de Baumol" : les services peu productifs ont tendance à occuper une part de plus en plus importante dans l'économie, au détriment des services très productifs. L'industrie diminue en raison de la délocalisation et de la baisse des coûts des biens. L'immobilier est fortement impacté par la maladie de Baumol, ce qui entraîne une augmentation des prix.

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Comment éviter un krach immobilier et quels pourraient être les effets économiques désastreux d'un tel krach ? Sait-on définir ce qui serait un niveau sain des prix de l'immobilier en France ?

Il n'y aura pas de krach. La demande est très forte, les gens ont besoin de se loger. Actuellement, ils ne peuvent pas accéder au crédit bancaire mais le marché compte tout de même 850 000 transactions immobilières, un chiffre élevé. Comme il y aura toujours des personnes cherchant à se loger, il y aura toujours des projets immobiliers qui se concrétiseront.

Il est impossible de définir un niveau "sain" des prix de l'immobilier. Pour y parvenir, il faudrait produire autant que nécessaire jusqu'à ce que les prix baissent. La stabilité des prix est déjà un objectif en soi. En effet, si les prix augmentent plus rapidement que la création de richesse provenant des actifs, cela entraîne des transferts de richesse à l'intérieur de la population entre ceux qui étaient déjà propriétaires et ceux qui ne l’étaient pas encore.

La « méthode tokyoïte », ou « méthode japonaise » porte son nom d'après la ville de Tokyo, souvent érigée en exemple pour sa gestion de son parc immobilier. De quoi s’agit-il ?

Le Japon a connu une grave crise immobilière au milieu des années 1990. Cela s’est traduit par de nombreux programmes et chantiers laissés à l’abandon. Une proposition, en 2002, a été de dire que des petits secteurs, des « macros-lots », doivent être laissés à l’initiative privée. Le pouvoir d’urbanisme doit être laissé aux individus, qui peuvent choisir ce qu’ils veulent faire de leur terrain. Une vingtaine d’années plus tard, on se rend compte que cette loi, associée à une plus faible contestabilité du droit de l’urbanisme, a très largement participé à avoir une production de logement dans les grandes métropoles, ce qui a contribué à maintenir des prix bas. 

On entend souvent parler de l’exemple de Minneapolis. Encore une fois, un programme de construction massif est-il la solution ? 

Les prix du logement dépendent de nombreux facteurs. À Minneapolis, les prix ont très peu augmenté, illustrant un mouvement qui se répand aux États-Unis : la densification des centres urbains. Comme peu de logements - notamment collectifs - ont été construits, plusieurs États ont pris des mesures pour densifier les villes, permettant par exemple la construction de 3 ou 4 logements sur une parcelle de maison, ou la construction d'annexes sans permis de construire. Minneapolis est allée très loin dans cette logique et a prouvé une chose très simple : plus on augmente l’offre, moins les prix augmentent.

Peut-on s’inspirer de ces méthodes en France ?

L'immobilier a ses propres contraintes et spécificités locales, ce qui rend difficile la reproduction de méthodes qui ont fonctionné ailleurs. En France, je propose de recréer un alignement d’intérêts avec les communes. Il faut inciter à construire sans menaces ni contraintes, car de telles mesures ne passeront pas les cadres législatifs de l’Assemblée Nationale ou du Sénat. Mon idée est de permettre aux collectivités de devenir actionnaires des projets, touchant ainsi une partie de la valeur libérée lors des opérations de construction ou de réhabilitation. Cela donne un atout au Maire pour convaincre les riverains, souvent opposés à de nouvelles constructions près de chez eux. Si on leur explique que ce procédé va générer des millions d’euros pour reconstruire la piscine du village, ils peuvent être amenés à changer d’avis. En somme, il suffit de permettre aux collectivités locales de devenir actionnaires des sociétés civiles et immobilières de construction et de vente. Cette mesure sera adoptée facilement, avec des effets relativement rapides.

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