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Non, les liquidités de la BCE ne seront pas un moyen déguisé de racheter de la dette souveraine
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Trêve de fantasme !

523 banques de la zone euro se sont pressées jeudi pour obtenir 500 milliards d'euros de prêt par la BCE. Des liquidités bienvenues pour leur consolidation, qui pourraient remettre la machine européenne sur les rails. Reste que rien n'assure les États ou les entreprises d'une mise à disposition de futurs crédits bancaires.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Difficile de plaire à tout le monde, on le sait. Mais on peut désormais se demander s’il est à possible à la BCE de plaire à quelqu’un. Avec le ralentissement en vu, qui conduit à une récession en ce début d’année, voilà la BCE qui dit préparer un refinancement long et illimité des banques européennes. Bien ? Pas bien ?

Avec ce qu’elle voit de la situation économique et bancaire, la voilà qui se dit préoccupée et qui entend parler aux régulateurs de Bâle, eux si préoccupés par une future crise qu’ils empêchent qu’on sorte de celle-ci. Bien ? Pas bien ? Quelques temps avant de soutenir les banques commerciales, la voilà qui indique de manière claire qu’elle n’est pas le "financier en dernier ressort" des États. Elle n’est pas la Fed (réserve fédérale américaine), pas la Bank of England. Bien ? Pas bien ?

En réalité, les banques ressentent le ralentissement de l’économie dans le ralentissement de la demande de crédit. Inutile d’inquiéter avec un credit crunch (pénurie de crédit) qui accentuerait la récession : nous sommes dans une période où les ménages sont plus inquiets, et les entrepreneurs encore plus. Ces derniers stockent au plus juste, investissent peu et arrêtent les embauches. Certes on peut toujours craindre que les banques soient plus dures avec eux mais il leur sera surtout difficile de refuser un crédit qu’on ne leur demande pas ! Le refinancement en cours par la BCE est donc une avance, évidemment destinée à ne pas tendre la situation et à ne pas noircir les anticipations. C’est un amortisseur. C’est donc bien.

Dans le même temps, on comprend que cette liquidité bancaire européenne vient compenser la fuite quasi organisée des dépôts en dollars par les autorités américaines en août. Ces dernières s’inquiétaient en effet de la "qualité", alias de la stabilité, du financement en dollars des banques européennes. Elles ont été "entendues" puisque ce financement s’est évanoui, obligeant les banques européennes à accorder moins de crédit en dollars et à réduire leur activité et leurs effectifs dans les zones dollar. C’est donc bien ce que fait la BCE, pas bien ce qu’a fait la Fed.

Ce n’est pas pour autant que l'argent de la BCE va permettre aux banques européennes d’acheter des obligations publiques européennes, la BCE complétant en cachette ce qu’elle fait au grand jour par ses interventions sur le marché secondaire (marché où se négocient et s'échangent les titres en bourse). Les analystes le verraient vite, les régulateurs aussi, les marchés immédiatement. C’est donc bien d’éclairer la différence : liquidité oui, refinancement public non.

Au fond, cette intervention de la BCE est une pièce à la structure qui se met en place pour tenir le choc de début 2012. La récession doit absolument être faible. Pour qu’elle soit faible, il faut qu’entreprises et ménages se le disent et préparent des projets que les banques financeront tandis que ces banques se remplument et se consolident grâce à une liquidité plus stable et moins chère. Puis viendra le FESF (fonds européen de stabilité financière) qui se mettra à fonctionner. Enfin… non pas les eurobonds (obligations européennes) mais des eurobills (obligations à court terme, à un taux d'intérêt moins élevé).

Avant de repartir, il faut d’abord amortir la chute, dire que les États doivent dépenser moins et surtout aider les entreprises pour qu’elles innovent et avancent plus. Bien ? Pas bien ? Réponse : très bien.

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