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Les travailleurs indépendants : photo de famille d'hier et d'aujourd'hui
©Reuters

Bonnes feuilles

La France est l'un des pays du monde qui comptent le moins de travailleurs indépendants. Pourtant, plus de 50 % des Français veulent tenter l'aventure de l'indépendance. À la clef, ce sont 1 million d'emplois qui peuvent être créés à l'horizon 2025. Véritable eldorado ou miroir aux alouettes ? C'est ce portrait d'une France entreprenante, intrépide et talentueuse que l'auteur a choisi de dresser sans concession. Une France qui sait marier les paradoxes, refusant l'uberisation tout en surfant sur les vagues de la nouvelle économie.Extrait de "Tous indépendants", de Guillaume Cairou, aux éditions du Cherche-Midi. 1/2.

Guillaume Cairou

Guillaume Cairou

Guillaume Cairou est président du Club des entrepreneurs.

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Publiée en décembre 2016, une étude de l’Insee donne un aperçu assez complet du travail indépendant. Si les statistiques datent de 2014, elles apportent néanmoins un éclairage intéressant sur le phénomène. Fin 2014, en France, 2,7 millions de personnes exerçaient une activité non salariée dans l’ensemble des secteurs non agricoles, en tant qu’entrepreneurs individuels, y compris les autoentrepreneurs (requalifiés «microentrepreneurs » depuis le 19 décembre 2014) et les gérants majoritaires de société. Soit 10% de la population active. 

À la même époque, le «Rapport sur la protection sociale des non-salariés et son financement», réalisé par le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFIPS), conforte les chiffres de l’Insee, car il estime à 2,8 millions le nombre d’indépendants en France, soit 600000 de plus qu’en 2003. 

Ces chiffres ne sont intéressants que si on les compare. Au début des années 1970, comme le rappelle le rapport du HCFIPS, le travail indépendant comptait 4,5 millions de personnes dans ses rangs. Il n’a donc cessé de reculer jusqu’au début des années 2000, pour atteindre environ 2,2 millions d’individus avant de redémarrer, stimulé par les mesures facilitant la création d’entreprise, à partir de 2003. 

« Sur longue période, c’est la diminution de l’emploi agricole, sous l’effet d’importants gains de productivité, mais aussi d’une plus forte propension à exercer sous le statut de salarié, qui explique cette forte décrue de l’emploi non salarié: celui-ci a été divisé par cinq dans l’agriculture, qui ne regroupe plus que 15% de l’emploi non salarié total, contre près de la moitié un quart de siècle plus tôt. Dans le même temps, la modernisation et l’expansion rapide du tertiaire marchand se sont accompagnées d’une salarisation des emplois », précise le HCFIPS. 

En 2014, toujours selon l’Insee, le travail indépendant représente l’activité principale de 89 % des personnes observées. Pour les autres, qui tirent l’essentiel de leurs revenus professionnels d’une activité salariée, le travail indépendant apporte donc un complément de revenus. Sur le plan sectoriel, la moitié des non-salariés se concentre sur 3 secteurs : le commerce et l’artisanat commercial (21%), la santé (17%) et la construction (14%). En comparaison, ces 3 secteurs ne rassemblent qu’un tiers des salariés du privé. 

Dans les services, 13 % des indépendants exercent dans les activités spécialisées scientifiques et techniques (professions juridiques, comptables, conseil de gestion, architecture, ingénierie, publicité, design, etc.) et 21% dans les services destinés aux particuliers tels que la restauration, l’hébergement, les activités artistiques et récréatives, l’enseignement, la coiffure, les soins de beauté ou les autres services personnels. L’industrie est loin de se tailler la part du lion puisque moins de 5% des non-salariés travaillent dans ce secteur, soit 3 fois moins que les salariés du privé. 

À quel rythme progresse cette population de travailleurs indépendants ? Après avoir augmenté de 5,4 % entre 2011 et 2012, puis de 5,1 % entre 2012 et 2013, les effectifs n’ont augmenté que de 0,5% entre 2013 et 2014. 

Il faut faire une distinction entre les non-salariés « classiques » et les autoentrepreneurs, devenus microentrepreneurs depuis la réforme votée en 2014 et complétée en 2016. Ainsi, entre 2013 et 2014, le nombre de microentrepreneurs a reculé de 2,2% quand celui des indépendants classiques bondissait de 8,3%. 

Toujours selon cette vaste enquête de l’Insee, les non-salariés classiques – qui ne sont pas autoentrepreneurs – représentaient 1,9 million de personnes fin 2014, répartis entre 58 % d’entrepreneurs individuels et 42 % de gérants majoritaires de société. « Le recul de 2,2% par rapport à 2013 résulte d’une forte diminution du nombre d’entrepreneurs individuels (– 6,6 %, contre – 0,3 % en 2013), tandis que la croissance du nombre de gérants de société se poursuit (+ 4,6 %, après + 5,1 % en 2013). Avec 43200 personnes en moins, la baisse du nombre de non-salariés “classiques” interrompt la hausse des 3 années précédentes (+ 71 800 personnes entre 2010 et 2013)», précise l’Institut. Ce repli se retrouve dans la plupart des secteurs, excepté ceux des professions paramédicales, des activités juridiques et comptables et du commerce pharmaceutique. Comme l’observe l’Insee, il est particulièrement marqué dans la construction (– 5,3%), l’industrie (– 4,6%), et le commerce et l’artisanat commercial (– 4,2%). 

Quant au nombre de microentrepreneurs, il progresse à nouveau après un ralentissement lié aux incertitudes sur l’avenir du régime entre 2013 et 2015. Au deuxième trimestre 2016, l’Acoss, la banque de la Sécurité sociale, estimait à 1,1 million le nombre de microentreprises, un nombre en hausse de 4,8% sur un an. 

Que peut-on retenir de ces statistiques ? Si les microentrepreneurs stimulent l’entrepreneuriat, ils ne sont pas encore majoritaires au sein des indépendants. Pas encore? L’avenir le dira. 

Quel est l’enseignement principal? Les indépendants non-salariés ne représentent donc que 1 personne en activité sur 10.

De fait, c’est un nombre assez faible. Affaire classée ? Mon ouvrage s’arrête ici? 

Vous aurez remarqué que tous ces chiffres datent de 2014. Or, depuis lors, la numérisation de l’économie est montée d’un cran. Pas une semaine, pas un jour ne se passe sans que l’on parle dans les médias du lancement d’une application numérique qui propose la mise à disposition quasi immédiate d’un nouveau service, d’un nouvel usage, d’un nouveau produit, le plus souvent connectés. 

En attendant un nouveau recensement plus précis pour mesurer la montée en puissance du travail indépendant – un travail que seul l’Insee est techniquement capable de réaliser –, il est néanmoins possible de constater son essor à travers ces chiffres des créations d’entreprises. Fortement stimulé par le lancement du régime de l’autoentreprise, le 1er janvier 2009, le nombre de créations d’entreprises a explosé avant de marquer un coup d’arrêt au début du quinquennat précédent. Les entrepreneurs en herbe ont été refroidis par les hésitations du gouvernement sur l’avenir de ce régime. Depuis 2015, la dynamique entrepreneuriale est à nouveau visible et palpable. 

Selon une étude de l’Insee, incontournable sur le sujet, publiée en janvier 2017, 554 000 entreprises ont été créées en 2016, soit 6% de plus qu’en 2015. Dans le détail, ces créations ont fait un bond de 10% pour atteindre 188 800 inscriptions en 2016, contre 172 000 en 2015. Elles signent leur plus importante hausse depuis 2009. Quant aux créations d’entreprises individuelles classiques, elles ont également augmenté de 10 %, pour atteindre 142400 inscriptions en 2016, contre 129700 en 2015. «Le nombre total de créations d’entreprises classiques retrouve ainsi son niveau de 2008», indique l’Insee. 

En revanche, les immatriculations sous le régime de microentrepreneur ont légèrement diminué de 0,3%. Elles s’élèvent à 222800 en 2016, contre 223400 en 2015, c’est leur plus bas niveau depuis 2009. «Cependant, ce repli est beaucoup moins marqué qu’en 2015 (– 21%)», relativise l’Institut.

Extrait de "Tous indépendants", de Guillaume Cairou, aux éditions du Cherche-Midi. 

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