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Les taxis partent en guerre contre les VTC : et si on partait en guerre contre les taxis ?
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A l'attaque !

Le rapport Attali de 2008 préconise de développer l'entrée des VTC sur le marché "afin de favoriser l'émergence de gammes de véhicules adaptées aux budgets de différentes clientèles".

Florian  Silnicki

Florian Silnicki

Florian Silnicki est Expert en communication et Président Fondateur de l'agence de communication de crise LaFrenchCom (https://www.lafrenchcom.fr)

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A l'heure où de belles startup sont prêtes à pouvoir grandir et utiliser le digital et les appli mobiles (concept du SOLOMO Social Local Mobile), le puissant mais déplacé lobbying de G7 les en empêche et les met en danger. C'est refuser la modernité, le digital et la satisfaction d'un besoin du marché et des consommateurs. II semble difficile de comprendre cette conception des affaires publiques ou de la communication d'influence...

Bien que le groupe G7 soit accompagné Image7, il ne faut pas oublier que le premier des lobbyistes des Taxis G7 est Jean-Jacques Augier qui en fut le DG pendant une dizaine d’années. Inutile de s’attarder sur sa proximité pour ne pas dire intimité avec le Président Hollande, le gouvernement et la majorité actuelle .

Vous le savez, le PDG de Snapcar a publié une lettre ouverte à Rousselet qui n’a pas répondu sur les conseils de ses lobbyistes et pour ne pas s’exposer personnellement ni mettre en danger leur marque, G7 a préféré pousser le Président de la Fédération Nationale des Taxis Didier Hogrel à répondre à cette lettre ouverte qui ne lui était pas adressée. A cet égard, les conseils de Rousselet ont tiré les leçons du passé. On se souvient en effet de l’épisode né des attaques proférées par Nicolas Sarkozy contre Mitterrand « avocat des taxis G7 et ami de Rousselet » ce à quoi Rousselet avait à l’époque tenté de répondre maladroitement. .

Ils ont par ailleurs entamé un intense lobbying en poussant les députés à poser des questions écrites téléguidées. On sait par exemple que l’UMP Pierre Morel-A-L'Huissier en fut l’un des grands ordonnateurs. Il a ainsi été l’un des premiers à écrire à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation sur le développement des voitures de tourisme avec chauffeur (VTC) écrivant ainsi que « Ce type de service apparaît proche de celui proposé par les taxis. Aussi apparaît-il nécessaire de définir un encadrement adapté à chacun de ces secteurs pour assurer leur pérennité. Il lui demande de lui préciser ses intentions à ce sujet. »

Au fond, les taxis G7 ont profité de la situation juridique incertaine des voitures de tourisme avec chauffeur. Les taxis, voyant dans les VTC une concurrence frontale, ils ont cherché à contrecarrer leur émergence par l'imposition de nouveaux textes juridiques toujours plus contraignants (obligation d'avoir des véhicules d'une longueur minimale de 4,5m contre 4,4m à l'origine, obligation d'être équipés de voitures avec une motorisation supérieure à 120 CV, les 15 minutes dans le projet de loi conso, blocage de la mise en concurrence du transport de malade conventionné, qui coûte 1 Milliard d’Euros à la Sécurité Sociale etc…). L’incarnation évidente d’un conservatisme déplacé à l’heure du digital et de la démocratisation des TIC, d’une vision médiévale ridicule de la concurrence… qui quelle que soit sa position idéologique ne peut pas à ce point paraître malsaine… .

Pour comprendre le poids de ce lobby constitué par G7, il faut aussi ne pas oublier que le cabinet de Benoit Hamon avait affirmé publiquement que la colère des VTC n'a pas lieu d'être car "le projet de loi sur la consommation n'inclura aucun délai de ce type". Renversement de situation… après cette déclaration du cabinet de Sylvia Pinel, la ministre du commerce et du tourisme "l'objectif est de lever les éléments permettant d'entretenir la confusion entre taxi et VTC, de bien séparer les activités" à l’issu d’un RDV avec Serge Metz, le PDG de G7... sous entendu... nous allons limiter l'activité des VTC en adoptant la législation la plus stricte possible... .

Pourtant, chacun mesure à quel point les deux approches sont fondamentalement opposées. Taxis et VTC offrent en effet des services complémentaires sur le créneau du transport de personnes. .

L'exploitation de voitures de tourisme avec chauffeur s'adresse exclusivement à un marché particulier, ciblé sur le créneau du tourisme d'affaires, des services évènementiels et personnalisés à la demande et c’est un succès économique et plus globalement… social puisque le deal gagnant-gagnant de cette offre aboudée par les parisiens est claire. .

Le fonctionnement de cette activité est aussi particulièrement différent puisque chacun sait que les taxis bénéficient de très nombreux avantages qui ne sont pas accordés aux voitures de tourisme avec chauffeur, notamment l'occupation du domaine public, la possibilité de stationner dans des espaces réservés et l'utilisation des voies dédiées aux bus par les taxis. .

Enfin, il faut rappeler également que cette activité est strictement limitée par l'obligation d'une réservation préalable.

Comment dès lors ne pas admettre que les conditions de concurrence entre les deux activités sont donc clairement encadrées ? .

Qui, mis à part en étant d’une mauvaise foi particulière, peut dès lors ne pas constater que parallèlement, l'inadéquation entre l'offre des taxis, jugée chère et insuffisante, et un besoin toujours croissant en matière de transport de personnes, explique et justifie l'émergence des VTC ? .

A cet égard, les chiffres sont particulièrement édifiants. La densité taxi/habitant est en effet extrêmement faible en France : 3 taxis pour 1 000 habitants à Paris et 1 pour 1 000 en province, contre à 9 pour 1 000 à Londres et 12 pour 1 000 à New York. .

Ainsi, un rapport de l'OCDE datant de 2007 sur le marché des taxis préconisait-il de développer, à défaut d'une modification de l'offre de taxis, le nombre de VTC ce qui déjà à l’époque avait suscité l’ire de G7.

De la même façon, le rapport Attali de 2008, dans sa décision 210, préconisait-il de développer l'entrée des VTC sur le marché « afin de favoriser l'émergence de gammes de véhicules adaptées aux budgets de différentes clientèles ». 

C'est pourquoi tout justifie aujourd’hui une véritable stabilisation du régime juridique des VTC afin de ne pas voir ce secteur être soumis à des modifications néfastes à l'emploi. .

Enfin, après m’être renseigné, en club affaires, G7 prend 30% du montant des courses des chauffeurs pour la mise en relation ce qui est particulièrement élevé. Le club affaires est la seule offre qui permette d’avoir un taxi en heure de pointe, le seul moment de la journée au fond où tous les parisiens ont besoin d’un taxi et où personne n’en trouve. Tout simplement. Le prix de l’abonnement ? 2000 euros par an… En plus de constituer une véritable rente de situation, c’est un chantage absolument insupportable. Voilà au fond ce qui est mis en danger par les VTC pour mon plus grand plaisir .

Notons enfin avec regret qu’il faut aujourd’hui plus de 8 mois pour avoir une carte professionnelle VTC… la préfecture de police, qui délivre les cartes professionnelles ayant donné instruction à ses services d’en ralentir la délivrance. .

Dernière anecdote, il a fallu attendre que les VTC propose du WIFI à bord pour que G7 lance son offre Maxicab. Reste que malgré toutes ces évolutions, tous les VTC revendiquent une qualité de service bien largement supérieure à celle délivrée par les taxis : bouteilles d’eau à bord, Wi-Fi, chargeur pour portable… .

Dès lors, entendre Gilles Boulin, le secrétaire général du Syndicat des sociétés coopératives de taxis affirmer qu’il voulait un délai de deux heures, c’est juste absolument inacceptable. .

Au fond, il me semble utile de dire bravo à fleur pellerin et à benoit hamon pour avoir réussi à brider l'innovation pour protéger un lobby. Les VTC ont su innover en qualité de service, c'est bon pour le client. Freiner leur développement n'est pas orienté client. Or, quelle économie du monde pense avant tout à protéger un lobby avant de protéger les intérêts du consommateur ? .

Instaurer un délai d'attente de 15 minutes entre la réservation préalable et la prise en charge effective d'un client par un VTC, c’est menacer au moins 1.000 emplois rien qu’à Paris, est-ce juste ? Cela va également empêcher la création de milliers d'autres postes dans un secteur dont la croissance continue ne s’est pas démentie, est-ce normal ? Est-il vraiment possible de s’en priver ? .

Il est aussi intéressant d’analyser le processus de gestion de la communication du gouvernement dans ce cas d’espèce. En effet, le Gouvernement qui a peur de voir les taxis se mobiliser a tout mis en œuvre pour tenter de faire apparaître cette réforme comme une victoire des taxis afin que ne se reproduisent plus les blocages de Paris et des grandes villes de province comme en janvier dernier. .

Il faut rappeler que les voitures avec chauffeurs n’ont été légalisées en France que par une loi de 2009. C’est déjà très tard comparé aux Etats voisins… et en 2013, nous décidons à rebours de ce qui se fait partout en Europe d’en durcir les conditions d'exercice. .

Cette décision de réglementer est un coup de massue pour les startups, pour le numérique, pour l’innovation et la création d’emplois. Le Gouvernement se soumet à la communication d’influence des fédérations de taxis. La décision du Gouvernement est de ménager les taxis qui n’auront ainsi pas à se remettre en question. Cela pourrait s’entendre mais devient injustifiable quand cela se fait au détriment des VTC. On étouffe les uns pour sauver les autres qui ne répondent pas aux besoins du marché. est-ce économiquement cohérent? A t on bien mesuré les enjeux? .

Les VTC font un tabac dans les grandes villes au point de menacer les taxis. Il faut rappeler que les VTC sont une véritable alternative aux taxis. Ils ne sont pas des taxis bis. Leur offre, leur stratégie, leur marketing, leur communication et leur image sont différentes. Ce sont des voitures banalisées et souvent haut de gamme .

Jusqu'à quand le législateur va t il pouvoir tenter de lutter contre l’innovation numérique ? Comment légitimement imposer un délai de 15 minutes quand plus de" la motiéi des commandes sont traitées en moins de 10 minutes sur le lieu de prise en charge et la quasi intégralité en moins de 15 minutes .

Le manque d’accompagnement des fédérations de VTC en matière d’influence, leur communication inadaptée et le manque d’actions en matière d’affaires publiques a aboutit à ce que le gouvernement préfère sauvegarder les intérêts de G7 et Taxis Bleux qui dominent le marché mais qui ont complètement loupé le tournant du numérique. .

Les start-up qui sont lancées sur ce marché, comme Uber, SnapCar, Club Chauffeur, ou LeCab, répondent aux besoins insatisfaits des habitants des grandes villes. Comment dès lors se réjouir alors que rien qu’à Paris, chacun sait qu'il y roule entre trois et cinq fois moins de taxis qu'à New York ou Londres. Autolib' enregistre ses pics de fréquentation le samedi soir avec jusqu’à plus de 10000 locations en quelques heures à certains moments. C’est non seulement le signe d’une défaillance majeure de l’offre des taxis mais surtout l'illustration d'un besoin non satisfait à Paris. .

Le scénario de la libéralisation est idéal mais c’est le moins probable à mes yeux… à moins que les VTC se réveillent… C’est sans doute le sens de leur initiative avec le lancement d’une communication PIGEONSTVC en s’appuyant sur le réseau social twitter. Cela est il vraiment à la hauteur des enjeux règlementaires, sociaux, fiscaux et économiques ? Pas sûr… surtout face aux moyens engagés par le camps d’en face. .

A terme, je suis convaincu que le numérique va conduire le Gouvernement à déréglementer toutes ces professions jusqu'à présent protégées de la concurrence et qui n’ont pas su profiter de cette protection pour se réinventer et s’adapter au monde digital. Cette mutation digitale n’a pas à être encadrée. C’est aux taxis de s’adapter pas au gouvernement d’empêcher la satisfaction des besoins des consommateurs. Il en va de la vitalité du secteur du numérique en France. .

Les pharmaciens, les opticiens, les agences matrimoniales, tout évolue, et il faudrait que les taxis échappent à ce phénomène… mais au nom de quoi ? Internet impose une nouvelle donne.

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