Les Ponts de Mai… tout le monde dit que ça coûte cher à la société mais ce n’est pas vrai<!-- --> | Atlantico.fr
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Un restaurant à Paris, photo d'illustration - Dimitar DILKOFF / AFP
Un restaurant à Paris, photo d'illustration - Dimitar DILKOFF / AFP
©Dimitar DILKOFF / AFP

Faux débat

Pour l'Insee, la succession de jours fériés en mai va coûter 6 milliards d’euros à l’économie française. Des pertes sèches liées à la succession de ponts que prennent les Français. Mais la vérité est un peu différente.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Que les Français soient accros aux jours de congés, aux semaines de 35 heures, au non-travail, et même au télétravail…  c’est une évidence. 

Notre culture est plus une culture de rentiers que d'aventuriers. Le problème, c’est que nous n’avons pas les moyens de percevoir une rente perpétuelle et notamment d’origine sociale. 

Si nous avions des réserves en pétrole, tout serait différent, mais ce n’est pas le cas… Il faut bien que le travail des uns finance le non-travail des autres. Ou alors qu'on fasse des réserves, de l'épargne. 

Le sujet qui consiste à débattre pour savoir qui travaille et qui ne travaille pas est inépuisable surtout en mai où la succession des jours fériés et/ou chômés (il y a quatre qui tombent en milieu de semaine) permet au plus grand nombre de prendre une ou deux semaines de vacances supplémentaires.

Le sujet connexe, qui est préempté par tous ceux qui ont lu « L'économie pour les nuls », est de savoir combien coûtent les jours fériés à l'économie toute entière. Les organisations patronales ne sont d’ailleurs pas les dernières à se plaindre. Elles nous expliquent que la France a une telle addiction au non-travail que nous battons tous les records des jours fériés.

En corollaire, elles ajoutent que cette habitude entraîne une perte de richesse colossale, l'Insee a chiffré le coût d'un jour férié à 1,5 milliard d’euros en manque à gagner sur le PIB. Comme il y a 11 jours fériés au calendrier, cette fantaisie nous coûterait donc près de 16, 5 milliards d'euros, soit 0,4 point de croissance. 

Pour les gardiens du temple budgétaire, ce n’est pas rien, Rachida Dati dirait 12 milliards c’est presque 4 fois le budget de la culture… sauf que ce type d'estimation et de comparaison n’a pas grand sens. 

Dans ce débat bien français du coût des ponts suspendus en mai, nous faisons deux erreurs :

La première est de dire que la France est parmi les champions du monde des jours fériés et chômés et des ponts à rallonge. C’est faux. Avec nos 11 jours fériés dans l'année, nous sommes dans le bas de la moyenne européenne, où les jours non travaillés pour cause de jours fériés vont de 8 à 15. Les moins bien lotis sont les Anglais et les Hollandais qui n'ont que 8 jours fériés, les Allemands et les Irlandais ont 9 jours. La France, la Suède et l'Italie bénéficient de 11 jours dans l'année. Les plus vernis sont Chypre, la Slovaquie avec 15 jours, Malte et l'Espagne avec 14 jours. Alors tous les Français ne sont pas traités de la même façon. Parce que certaines régions ont leurs propres fêtes, l’Alsace et la Moselle ont certains jours communs avec l'Allemagne (le 26 décembre par exemple). Aux Antilles, en Guadeloupe et en Martinique, on commémore en mai l'abolition de l'esclavage. 

La deuxième erreur est de penser que ça coûte très cher à l'économie française. Oui mais ! La réalité est très différente parce que l'économie française réussit à compenser par des excédents de production et de création de richesses , les pertes entraînées par ceux qui ne travaillent pas les jours fériés. 

D'abord, l'économie moderne fait que certains services travaillent tous les jours et 24 heures par jour, les hôpitaux, les services de sécurité, etc. Ensuite, depuis que la France a déménagé ses usines dans les « émergents », le développement des activités de services et notamment la digitalisation fait que beaucoup de secteurs restent en activité et qu’en plus grâce au covid, le mois de mai fait des pointes annuelles de télétravail. 

Enfin, les vacances des uns donnent du travail aux autres. Dans le commerce, le tourisme, l'hôtellerie, la restauration, le transport, personne ne se plaindra des ponts du mois de mai. Et beaucoup reconnaissent qu’ils font en mai le plus gros chiffre d'affaires de leur année… En 2023, l'hôtellerie avait déjà enregistré une hausse de fréquentation de 20%… ne parlons pas des chiffres du « Airbnb… ».

Moralité , il faut parfois prendre les chiffres avec des pincettes surtout que pendant un week-end très prolongé on en a le temps… 

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