Les experts avaient vu venir la pandémie de Covid-19. Voilà les autres menaces planétaires sur lesquelles ils nous alertent aussi (dans le vide ?)<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
Les experts avaient vu venir la pandémie de Covid-19. Voilà les autres menaces planétaires sur lesquelles ils nous alertent aussi (dans le vide ?)
©Flickr / Marmotte73

Avertissement

Comment se préparer à l’éventualité d’un nouvel incident biologique ? Est-on prêt à l’éventualité de risques sismiques ? De la réouverture des frontières au risque nucléaire, quels scénarios peut-on prévoir, au lendemain du Covid-19, pour enrayer ces phénomènes ?

Edouard Valensi

Edouard Valensi

Edouard Valensi est l'auteur de "La dissuasion nucléaire, les terrifiants outils de la paix" aux éditions de l'Harmattan

Il est resté pendant dix ans à la tête de la cellule qui a programmé la force de dissuasion française au sein de la Délégation générale pour l'armement.

Voir la bio »
Christopher Payan

Christopher Payan

Christopher Payan est virologue au CHU de Brest et professeur à la faculté de médecine de l'université de Bretagne Occidentale (Brest).

Il est l'un des auteurs de Mini manuel de microbiologie (Editions Dunod)

Voir la bio »
Natalie Maroun

Natalie Maroun

Natalie Maroun est directrice-conseil et analyste chez Heiderich Consultants, spécialisée dans la gestion et la communication de crise. Elle travaille également pour l'Observatoire international des crises (OIC). 

Voir la bio »
Yorik Baunay

Yorik Baunay

Consultant chez UBYRISK  et directeur de Catastrophes Naturelles.

Voir la bio »
Guillaume Bigot

Guillaume Bigot

Guillaume Bigot est membre des Orwéliens, essayiste, et est aussi le Directeur Général d'une grande école de commercel. Il est également chroniqueur sur C-News. Son huitième ouvrage,  La Populophobie, sort le 15 septembre 2020 aux éditions Plon.

Voir la bio »

Edouard Valensi : Pour qu’il n’y ait pas de malentendu, une remarque préalable : dès lors que le COVID 19 affecte toutes les grandes puissances détentrices d’armes nucléaires, et que toutes sont soumises, peu ou prou, à la maladie, ce virus ne peut pas être à l’origine de ruptures des équilibres stratégiques, et il n’affecte pas le risque nucléaire.

C’est ailleurs qu’il faut chercher la source de tensions, elle a un nom : « Donald Trump ». Non parce qu’il investit des milliards de dollars dans de nouveaux programmes nucléaires. Les Etats-Unis, tout comme la Russie sont déjà surarmés, et ils le seront encore plus, avec des armes sans autres utilité que la frime. Mais par les conséquences de ses actions sur les théâtres iranien et chinois.

  • L’Iran : En dénonçant unilatéralement fin à l’accord de Vienne sur le nucléaire qui pendant dix ans rendait impossible la réalisation par l’Iran d’un engin nucléaire faute d’uranium enrichi et en organisant l’isolement de l’Iran les Etats-Unis ne sont pas parvenus à déstabiliser le régime, alors que, ce faisant, ils rendaient leur liberté de travailler aux ingénieurs et aux techniciens nucléaires. Tout comme la Corée du Nord, frappée pendant vingt ans de sanctions inopérantes, l’Iran, à la barbe de la communauté internationale, va pouvoir se doter de la bombe.
  • La Chine : certes le régime chinois n’est pas exemplaire, il est peu respectueux des bons usages et parfois inquiétant, mais il n’empêche, les multiples agressions verbales, et les agaceries stratégiques, dont il a été l’objet de la part de l’Administration présidentielle américaine ont fini par produire leurs effets. Ce huit mai 2020 l’officieux quotidien chinois Global Time a pu titrer « La Chine doit augmenter jusqu’à mille le nombre de ses ogives nucléaires » La Chine serait alors la troisième puissance nucléaire mondiale (la France est dotée de moins de 300 têtes nucléaires).

C’est la conclusion inquiétante d’une évolution commencée en 2018, lorsqu’après des décennies d’immobilisme nucléaire, la Chine a annoncé qu’elle savait réaliser des têtes nucléaires dans l’état de l’art, comparables aux têtes nucléaires américaines, et que leurs missiles stratégiques pourraient désormais emporter, non pas une tête nucléaire de très forte puissance, mais jusqu’à dix têtes nucléaires. Voilà qui peut malheureusement advenir.

Et la France ? Pour le risque nucléaire, comme pour le coronavirus, dans les mois à venir, elle doit s’armer de patience, vivre avec et espérer que d’ici à 2021 les Etats-Unis trouvent un vaccin.

Christopher Payan : Que le risque existe, c'est possible, le risque zéro n'existant pas, cependant, le fonctionnement des structures protégées de niveau 3 et à fortioiri de niveau 4 pour la gestion des pathogènes les plus à risque est très surveillé (contrôle des flux, des autoclaves, des appareils, des protocoles techniques qui y sont appliqués), tout au moins en France, avec du personnel habilité à y travailler. Tout cela contribue à réduire au mieux le risque. Pour les pathogènes anciens comme le virus de la variole, à l'origine de grandes épidémies qui tuaient 1 personne infectée sur 5 après transmission aérienne ou par contact cutané, quand le virus avait disparu au niveau mondial dans les années 1980, tous les laboratoires en France et dans la plupart des pays ont du détruire leur stock, excluant le risque d'une résurgence à partir des laboratoires.

Si c'était le cas il faudrait produire à nouveau du vaccin contre le virus variolique (ou vaccine) qui a existé jusque dans les années 1970, période où les derniers cas de variole ont été rapportés dans le monde, il s'agit d'un des plus anciens vaccins appliqués chez l'homme depuis la fin du XVIIIème siècle. En cas de variole, toutes les personnes nés après 1980 devraient être vaccinées, les laboratoires pharmaceutiques sont-ils capable de reproduire aujourd'hui ce vaccin et en combien de temps? La réponse à cette question est essentielle pour anticiper les actions à mener en urgence en cas de résurgence de cette maladie. Cette réflexion à partir de cette exemple permet de répondre à des menaces potentielles et de s'y préparer sur la base de solutions ayant existé et à remettre en route.
Yorik Baunay : Bien que l'épidémie de Coronavirus ait occupé les médias depuis fin février, la planète n'a pas cessé de tourner ni de se réchauffer. Ainsi, une partie de la Russie a connu des températures records au 1er trimestre et, selon la National Oceanic and Atmospheric Administration américaine, il y a 75 % de chances que 2020 soit l’année la plus chaude depuis le début des mesures. Si l'on en croit les prévisions du GIEC cette évolution vers une planète plus chaude se traduira par une augmentation des catastrophes naturelles d'origine météorologiques et climatiques, même si à jour, le signal n'est pas clair (augmentation du nombre annuel de catastrophes naturelles d'origine atmosphérique / climatique mais baisse du nombre de victimes et augmentation des coûts économiques).
La France est bien évidement directement concernée par les conséquences néfastes de ses changements climatiques : augmentation des épisodes de fortes chaleurs estivales, accroissement de l'érosion côtière et recul du trait de côte, évolutions du régime des pluies conduisant tantôt à des risques accrus d'inondation tantôt à des sécheresses plus fréquentes et prononcées en fonction des régions, diminutions de l'enneigement des massifs montagneux. Mais, contrairement au Coronavirus qui a entrainé - à l'échelle d'une vie humaine -  une crise brutale, rapide mais qui sera vraisemblablement assez courte, les changements climatiques attendus sont des phénomènes qui courent sur le temps long (décennies voir siècles) et dont les conséquences sont et seront inégales en fonction des régions (n'oublions pas que pour certaines régions du globe le changement global représentera de réelles opportunités). Nous sommes donc face à une réalité du risque nettement plus diffuse à laquelle il est pour l'instant très difficile d'apporter des réponses car pour gérer un risque il faut parvenir à en identifier les caractéristiques (intensité, localisation, fréquences...) pour y apporter les réponses adéquates, ce qui est encore très difficile car la résolution des outils de prévisions à long terme dont nous disposons est encore trop grande et les incertitudes trop nombreuses. Et étant donné que les mesures à prendre seront forcément très coûteuses, longues à mettre en place et impactantes pour nos sociétés, nous procrastinons collectivement !
Notre pays comme de nombreuses autres régions du monde sont effectivement menacés par des catastrophes naturelles sur lesquels nous avons bien peu de prise. Les séismes illustrent parfaitement cette réalité : la Californie, Tokyo, Istanbul attendent leur "Big One", des secousses telluriques de très forte magnitude qui a de très forte probabilité de survenir d'ici à 50 ans et dont on sait déjà qu'elles causeront des milliers (voir dizaines de milliers) de victimes et des destructions massives dont les coûts économiques se chiffreront en point de PIB. La France est également, dans une moindre mesure, exposée au risque d'un séisme de forte magnitude : la région de Nice pourrait subir un tremblement de terre de magnitude 6,5 et la région de Pointe-à-Pitre une secousse de magnitude 7 qui, toutes deux, causeraient des milliers de victimes et des milliards d'euros de dégâts. Dans tous ces cas, des études de paléo-sismicité très documentées permettent de se faire une idée de l'ampleur de l'événement possible ainsi que d'avoir une fenêtre temporelle d'occurrence possible si bien que le risque est relativement bien géré (normes parasismiques, procédures de gestion de crise, information...). 
Que se soit pour le risque épidémique ou pour les risques naturels, il n'est pas toujours possible de dimensionner des mesures de gestion efficaces surtout si l'on ne connaît bien pas le phénomène en jeu. En revanche dans les deux cas, nous savons que ces risques existent et il est donc toujours possible de s'y préparer  en se dotant de procédures organisationnelles et surtout en effectuant des retours d'expériences afin d'améliorer notre préparation à la crise.
Guillaume Bigot :  Pour commencer, le lien entre Covid et immigration est, pour l’instant, des plus ténus. Le seul effet de cette pandémie consiste à rétablir les frontières, même si notre pays s’est singularisé par un jusqu’au-boutisme effarant dans ce domaine, en les maintenant ouvertes jusqu’au début de ce mois. Sauf cas isolés, la pandémie, même si elle est venue de Chine, n’a pas suscité de réactions xénophobes. Il n’y a guère qu’aux États-Unis où la pauvreté culturelle et la faiblesse intellectuelle de certains expliquent des agressions et des insultes antichinoises ou dans certains pays africains où des populations très jeunes donc peu touchées par le virus (90 % de ses victimes ont plus de 75 ans) s’en sont prises aux représentants de l’OMS assimilés à un confinement qui a parfois eu des effets dramatiques.

Qu’en sera-t-il demain ? Au risque de vous surprendre, je suis assez d’accord avec le professeur Raoult pour considérer que le vieux continent, pour la première fois depuis longtemps, a été le continent le plus vulnérable en termes sanitaires. Notre système de santé fait de moins en moins rêver même si plus d’un milliard d’euros sont engloutis chaque année dans l’aide médicale d’Etat.

Après la pandémie, les enjeux démographiques demeureront les mêmes avec au Nord de la Méditerrannée, une zone de basse pression démographique et au sud, notamment dans l’Afrique subsaharienne, une zone de forte pression. La crise économique mondiale majeure qui est comme une séquelle, un effet secondaire de la pandémie risque encore d’aggraver la pression et la tension migratoire. La pression car l’Afrique ne sera pas épargnée par la récession et la tension car la concurrence va devenir plus vive sur le marché de l’emploi national. Nos classes dirigeantes peinent à comprendre que l’immigration n’est pas une question morale mais un enjeu politique et économiqie. Elle peut renforcer ou affaiblir un pays suivant que ce dernier manque de main d’œuvre ou ne parvient pas à éponger son chômage domestique. Pour renforcer une nation, l’immigration suppose deux conditions qui ne sont plus réunies : d’abord, une démographie jeune, d’où la folie de stratégie telle que préconisées par l’UE qui consiste à remplacer des vieux indigènes par de jeunes migrants car ce sont toujours les enfants indigènes qui assimilent les jeunes migrants.  Tout le drame des banlieues réside dans le fait que les enfants d’immigrés ne peuvent s’assimiler eux-mêmes.

La seconde condition qui n’est plus réunie en raison de l’aliénation de nos classes dirigeantes à l’Amérique (les élites européennes, en particulier françaises sont toutes inconsciemment américaines car l’UE n’est, au fond, qu’une singerie des États-Unis), c’est la confiance en soi. Un peuple ne peut accueillir des migrants et en tirer profit qu’à la condition de les assimiler. Et pour les assimiler, il a besoin d’avoir une forte dose de confiance en son avenir.

A cet égard, la crise du Covid peut exercer des effets contradictoires : elle a mise au jour l’affaiblissement des nations, leur dépendance. La pandémie a aussi servie d’effet de loupe grossissante pour démontrer à la population l’incompétence des soi-disants « élites » et ouvre donc la voie à leur remplacement et à un changement de paradigme.

En renouant, notamment, avec l’idée de souveraineté. Ce concept restaure la dignité du peuple et rappelle sa nécessaire autonomie, lui ré-apprenant à ne compter que sur lui pour défendre ses intérêts vitaux. C’est une chance historique qui s’ouvre de reprise en main, de réappropriation, par les Français, de leur destin collectif. Si les Français le veulent, ils pourront concevoir d’autres stratégies que celles de leur classe dirigeante qui considère les migrations de peuplement, au même titre que le changement climatique comme des fatalités qu’il faut se résoudre subir. Qui sait si un jour, les Français ne décideront pas de stopper le regroupement familial,  de renvoyer en masse les clandestins et de refaire leurs forces. Qui sait si nos immigrés ne deviendront pas l’avant-garde d’une grande transhumance humaine Sud Nord qui va tout balayer sur son passage mais les ambassadeurs d’une France redevenue elle-même dans le monde et qui donc se tournera naturellement vers son hinterland africain ?

Nathalie Maroun : Si beaucoup d’organisations publiques et privées anticipent les risques cyber, rares sont celles qui sont sensibilisés au risque de manipulation de leurs propres données dans le but de les déstabiliser par une rupture de confiance. Derrière le mot Fake News se cachent plus que des informations erronées ou laissant la possibilité à l’interprétation. Le risque de désinformation nous semble concerner de plus en plus de sujets : financiers, sanitaires et même citoyens et démocratiques.

Trois impacts majeurs sont à craindre :

1. L’affaiblissement de la confiance des citoyens, partenaires, investisseurs envers la parole officielle d’une organisation ou de la parole de l’Etat qui devient une version comme une autre de la vérité, ouverte aux interprétations et aux opinions diverses. C’est ainsi que sont nées les plus grandes controverses de ces dernières années : la crainte des vaccins, le climatosceptisme ou encore les théories du complot liées au Covid-19. Projeter ce risque sur des enjeux stratégiques telle que la sécurité de l’Etat, de ses frontières ou de ses institutions a fortiori en période d’élections pourrait être un tournant dans la vie démocratique, mettant à mal la possibilité pour les citoyens de faire des choix éclairés.

2. La difficulté à certifier une information comme vraie. Ainsi, même un compte certifié sur un média social, être une agence de presse reconnue ou une personnalité à la notoriété installée ne suffisent plus pour garantir la non manipulation des propos énoncés. Hackers, cyber-armées et autres professionnels de la déstabilisation peuvent déjà usurper une identité et diffuser toute sorte de désinformations à l’instar du compte Twitter de l’Associated Press qui en 2013, sous l’action de l’Armée Electronique Syrienne a annoncé l’explosion  d’une bombe à la Maison Blanche.

3.Dans cette guerre contre la fabrique du faux, le troisième impact possible est celui de remettre en cause le concept de désaccord, qui est le principe essentiel de la démocratie. Nous pouvons alors craindre une volonté d’uniformisation de l’information à l’instar de l’initiative du gouvernement français qui a sélectionné quelques médias présentés comme sûrs, au détriment de la liberté d’expression et la diversité des sources. Notre principale crainte est en effet celle de la montée des autoritarismes avec une volonté marquée de désigner une version vraie de toute information, en somme une version idéologiquement acceptable.

Dans les années qui viennent, la technologie, l’intelligence artificielle et la dextérité des cyber attaquants permettront sans doute des possibilités de plus en plus sophistiquées de Deepfake et de manipulation de l’information. Il serait par conséquent nécessaire dans une approche prospective de ne pas se contenter de définir le risque potentiel mais d’anticiper déjà ce que le boom technologique pourrait nous permettre de perfectionner en terme d’outils de veille et d’analyse car la réponse au risque de désinformation n’est pas uniquement communicationnel, il est également technique, juridique… La meilleure lutte contre le risque de désinformation c’est de réussir à le cantonner dans la bulle idéologique où il est né dans un subtil équilibre entre la liberté d’expression et la mission sacro-sainte des organisations étatiques ou privées de rester audibles et crédibles, en somme de protéger la confiance comme capital immatériel.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !