Le "tsunami" Sarkozy pétrifie ses concurrents : ce qu’ils voient chez l’ancien président et qu’ils n’auraient pas<!-- --> | Atlantico.fr
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Des tee-shirt à l'éfigie de Nicolas Sarkozy lors d'un meeting à Nice le 6 septembre 2014.
Des tee-shirt à l'éfigie de Nicolas Sarkozy lors d'un meeting à Nice le 6 septembre 2014.
©Reuters

Le retour du roi

L'ancien chef de l'Etat devrait officialiser sa candidature à la présidence de l'UMP ce dimanche 21 septembre. Xavier Bertrand et Alain Juppé se résignent déjà à rester sur le banc de touche. Et que ce soit dans l'entourage de François Fillon ou d'Alain Juppé, on n'hésite pas à parler de "tsunami".

Christian Delporte

Christian Delporte

Christian Delporte est professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Versailles Saint-Quentin et directeur du Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines. Il dirige également la revue Le Temps des médias.

Son dernier livre est intitulé Les grands débats politiques : ces émissions qui on fait l'opinion (Flammarion, 2012).

Il est par ailleurs Président de la Société pour l’histoire des médias et directeur de la revue Le Temps des médias. A son actif plusieurs ouvrages, dont Une histoire de la langue de bois (Flammarion, 2009), Dictionnaire d’histoire culturelle de la France contemporaine (avec Jean-François Sirinelli et Jean-Yves Mollier, PUF, 2010), et Les grands débats politiques : ces émissions qui ont fait l'opinion (Flammarion, 2012).

 

Son dernier livre est intitulé "Come back, ou l'art de revenir en politique" (Flammarion, 2014).

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Atlantico : Nicolas Sarkozy n'était pas encore de retour que nombre de ceux qui, quelques semaines plus tôt voulaient croire à leur destin personnel, annonçaient qu'ils étaient prêts à le soutenir. Y a-t-il dans cette réaction une part de résignation face à l'ancien président de la République ?

Christian Delporte : De résignation non, mais peut être la volonté de ne pas se couper des militants, qui, tous les sondages nous le disent, à 66% sont favorables à son retour. Le ralliement est aussi lié sans doute à des engagements de Nicolas Sarkozy, car certains avaient été très critiques à son égard, comme François Baroin, qui l’ont rejoint et qui souhaitent aujourd’hui son retour. Et il y a ce qui va être dévoilé dans les prochains jours, sur le sens de son retour, puisqu’on peut penser que, la ligne Buisson étant enterrée, il voudra apparaître comme le rassembleur, le fédérateur de la droite et du centre. En tout cas, personne ne peut empêcher le retour de Nicolas Sarkozy à la tête de l’UMP, donc autant être du bon côté. 

Pourquoi Nicolas Sarkozy fait-il si peur à ses concurrents ? Au delà de la stature, quelles qualités a-t-il qu'ils n'ont pas ?

C’est une bête politique. Il y a chez les militants UMP plus qu’une confiance en Nicolas Sarkozy, il y a un lien affectif, que les concurrents éventuels ne parviennent pas à établir. Ils ont une sorte de relation intime avec lui. Ajoutez à cela qu’il a su créer tout un imaginaire autour de lui : il apparaît confusément comme une sorte de magicien politique. Il fait peur parce qu’il peut être inattendu, il n’est pas un homme politique comme les autres. Ce qui distingue Nicolas, c'est la foi qu'il a en lui (Victor Hugo écrivait : "La confiance en soi fait les sots, la foi en soi fait les grands hommes"). De Gaulle, Mitterrand et quelques autres croyaient aussi en eux. Ce qui manque peut-être à ses concurrents.


Je retiens deux qualités qu’il maîtrise à merveille et qui lui permettent de s’imposer dans l’opinion publique : d’abord sa capacité à capter l’air du temps. Tout son parcours nous montre qu’il comprend assez vite les tendances, les sentiments, les sensibilités qui s’affirment dans l’opinion, et il en tient compte. Et, c’est un admirable communicant : lorsqu’il parle on l’écoute. Il est très attentif à l’audimat, et il fait toujours des scores importants. Il maîtrise tout l’appareil médiatique. Ce qui est beaucoup plus compliqué pour ses adversaires : François Fillon n’est pas un très bon communicant, il passe très mal à la télé ; Alain Juppé s’est amélioré mais il est toujours très réservé.

A quoi tient son statut actuel d'homme providentiel à droite, alors même qu'il a perdu la dernière présidentielle ?

Plusieurs raisons à cela. Il y en a une assez frappante, il a fait le même score que Giscard en 1981. A cette époque personne ne contestait sa défaite dans son camp, pour Nicolas Sarkozy, il y  a chez les militants l’idée qu’il n’a pas complètement perdu : il aurait suffit d’une semaine ou deux pour qu’il gagne. C’est un fait important puisque son image n’est pas écornée. Ensuite, on peut rajouter la suite des évènements : l’impopularité de François Hollande, et la situation très difficile dans laquelle on est, et enfin, il n’y a pas de leaderchip à l’UMP, il n’a pas été remplacé dans les cœurs des militants. Mais aussi parce que dans l’organisation et la domination des parties personne ne s’est véritablement imposé : Coppé, on sait ce qui lui est arrivé, Fillon n’arrive pas à décoller, peut-être Juppé… Mais aucun nom ne se démarque. Depuis qu’on interroge les militants UMP, c'est-à-dire depuis 2012, c’est toujours le seul.

Semble-t-il plus capable de rassembler la droite ? Pour quelles raisons ?

Cela dépendra de la ligne sur laquelle il est, s’il droitise son discours, il ne rassemblera pas à droite. Mais la question principale n’est pas de savoir comment il va rallier l’UDI, mais de savoir comment il va aller à la reconquête des électeurs, des couches sociales qui sont allés vers Marine Le Pen. L’enjeu, c’est de rassembler le plus possible au-delà de la droite. Autrement dit, on peut penser qu’il va oublier le Sarkozy de 2012, et va essayer d’aller à la source du Sarkozy 2007. 

Le Point, dans le numéro qu'il lui consacre ce jeudi 18 septembre, parle d'un personnage plus posé, dans la réflexion. Que gagne-t-il et que perd-il à dompter ses démons ?

Le thème "j’ai changé", c’est un thème récurent chez Nicolas Sarkozy. Il faudra montrer le changement de comportement par la preuve, on n’en est pas là, mais ce qui est sûr c’est que le nouveau Sarkozy doit être un Sarkozy plus grave, prenant de la hauteur et moins mordant. Je m’attends à un discours justifiant son retour sur le ton de la gravité et de la dramatisation. La question c’est de savoir combien de temps ça va tenir, si ça tient, c’est sincère, si ça ne tient pas c’était lié à un calcul politique.

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