"Le Prince" de Machiavel, ou comment un ouvrage du XVIe siècle influence encore la pensée politique d'aujourd'hui<!-- --> | Atlantico.fr
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Une statut de Nicolas Machiavel.
Une statut de Nicolas Machiavel.
©Frieda/Wikipedia

Bonnes feuilles

Modeste fonctionnaire de son temps, Machiavel est un analyste politique ayant influencé toute la pensée politique derrière lui. Notamment avec son ouvrage le plus fameux : Le Prince. Extrait de "Machiavel", de Jean-Yves Boriaud, aux éditions Perrin (2/2).

Jean-Yves  Boriaud

Jean-Yves Boriaud

Professeur de langue et de littérature latine à l'université de Nantes, Jean-Yves Boriaux est une spécialiste de la Rome à l'âge de la Renaissance. 

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Aucun doute, donc : Le Prince est bien un ouvrage de circonstance, un témoignage de bonne volonté, de compétence politique, une démonstration à même de valoir à son auteur un emploi à Rome ou à Florence. Mais c’est un ouvrage fondé sur une véritable expérience, et il est bien précisé en introduction qu’il est le fruit « de la connaissance des actions des grands hommes acquise au prix d’une longue expérience des choses de ce temps et de la lecture continuelle de celles de l’Antiquité ». Comment s’articule alors cette brève construction en 26 chapitres qui aboutissent à une adresse directe au «Prince» à venir, au «rédempteur» sommé «de s’emparer de l’Italie et de la libérer des barbares»?

L’ouvrage se veut didactique.  Traitant des principats, il commence logiquement par une taxinomie de ces régimes: leur dénombrement, d’abord (chapitre I), puis l’analyse du fonctionnement de chacun, cela jusqu’au chapitre XI.

Pour Machiavel, il existe ainsi: – les principats héréditaires (qui, ne faisant l’objet d’aucun processus d’acquisition, intéressent peu le propos); – les principats mixtes, plus agités puisque résultant de l’ajout d’un territoire nouveau à un État préexistant; – les principautés nouvelles, qu’on peut acquérir par ses propres armes (ou celles d’autrui) et son propre mérite, et grâce au concours de la Fortune. C’est là le morceau de bravoure de Machiavel qui n’a cessé, depuis des années, de voir se faire et se défaire de telles principautés; – le principat civil, où le Prince parvient au pouvoir porté par la « faveur» de ses concitoyens;  les principautés ecclésiastiques, au fonctionnement particulier puisque la difficulté consiste dans leur « acquisition», mais qu’on n’a aucun mal à conserver.

Après le chapitre  XI, on change de registre pour détailler les rapports que le Prince doit entretenir avec la chose militaire. Cela a fait dire à certains que la lettre de décembre 1513 dut être adressée à Vettori avant même l’élaboration de cette seconde partie, puisque Machiavel y dit expressément qu’il expliquera dans l’« opuscule » « ce qu’est une principauté, combien d’espèces il y en a, comment on les acquiert, on les conserve, pourquoi on les perd», ce qui correspond au programme de ces onze premiers chapitres.

Des chapitres XII à XIV, donc, Machiavel reprend son programme militaire, expliquant encore une fois combien le système mercenaire est préjudiciable à un État et combien vaut mieux le recrutement de troupes locales.

Puis il envisage, en dernière partie, les ressorts qui permettent à un Prince de conserver cet État (XVI: «La libéralité et la parcimonie » ; XIX: «Comment fuir le mépris et la haine »…), les dangers qui menacent le Prince (XXIII: «Comment fuir les adulateurs »…), avant de poser, au chapitre XXV, la question de fond, celle qui agite toute la problématique politique de la Renaissance : «Quel pouvoir a la Fortune dans les affaires humaines et comment il faut lui résister », où il développe, exemples à l’appui, son idée maîtresse, celle de la nécessité pour le Prince d’adapter son comportement aux circonstances. Enfin, on l’a dit, il lance un appel pressant à un Prince fédérateur – qui ne s’est pas dévoilé jusque-là qui saura redonner à l’Italie la dignité qu’elle a perdue, en 1494, en s’effondrant devant la furia francese.

Extrait de "Machiavel", de Jean-Yves Boriaud, aux éditions Perrin

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