Le nombre de projets d’embauches est tel que la France devrait être en situation de plein emploi. Alors qu’on en est encore loin. Cherchez l’erreur ! <!-- --> | Atlantico.fr
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Olivier Dussopt, ministre du Travail.
Olivier Dussopt, ministre du Travail.
©CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

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La situation de l’emploi actuellement est incompréhensible. Le nombre d’embauches non satisfaites est tel que la France devrait être en situation de plein emploi. Alors pourquoi ? Existe-t-il une tendance au non-travail ?

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Jamais, dans l’histoire des 50 dernières années, il n'y aura eu autant d'offres d’embauches en France, jamais autant d'événements organisés pour permettre des rencontres entre les offreurs d’emplois et les demandeurs. Dans les stades ou les chambres de commerce, les conseils généraux ou les communes. Chaque institution socio-économique y va de son « job dating ». On se croirait au Canada, ou en Australie. Mais chez nous ça ne marche pas. 

Il y aurait actuellement plus de 520 000 projets d’embauche en Ile de France qui restent sans réponse. Environ 1 millions et demi si on regarde ce qui se passe dans la France entière. Qu’en sera-t-il l’année prochaine à la même époque pour les jeux olympiques qui vont donner un coup de fouet supplémentaire au marché. 

Beaucoup de ces propositions de jobs concernent certes les jobs d’été ou des jobs pour étudiants mais pas seulement. D’ailleurs, beaucoup pourraient être des portes d’entrée dans la vie active et de retour à l’emploi pour ceux qui sont au chômage. 

En face de tous ces projets, il reste encore plus de 7% de la population en âge de travailler au chômage… C’est énorme. Et sur ces 7%, plus de la moitié seraient considérés comme perdus définitivement pour l’aventure sociale de l’emploi. Ils n’ont sans doute aucune formation,  aucune éducation et sont à priori complètement perdus. Environ 4% de la population en âge de travailler serait comme disent les anglo-saxons « neither in employment, nor in education or training and no family ou home ».

La réintégration de ces populations est évidemment une question d'éducation et de formation, mais si l’effort sur l' éducation est nécessaire mais il ne résoudra pas le problème immédiat. 

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Plus qu'un travail : voilà ce que les métiers apportent en plus ou en moins que le salaire

Dans l’immédiat les acteurs de l’économie peuvent offrir ou créer plus d’un millions d’emplois dont la moitié à Paris, et près de 30% dans les régions touristiques, le midi et la Bretagne principalement. Ne parlons pas des demandes qui vont se multiplier au fur et à mesure qu’on approchera des Jeux olympiques. 

Quant aux types d’emplois offerts  et qui ne trouvent pas preneurs, Pôle emploi a dressé une sorte de hit-parade des secteurs dans lesquels il y a forcément du travail :

1. dans les industries culturelles, Les artistes ou personnels techniques pour le spectacle vivant forment le contingent de postes non pourvus le plus important ; 

2. la transformation numérique, qui a besoin de salariés pour participer à l’hébergement des données, la fameuse Data, puis la cybersécurité et la connectivité de objets ; 

3. la restauration qui, très handicapée actuellement par manque de personnel dans la cuisine et dans les salles. Plus du tiers des serveur dans les café -restaurants ont disparu après le covid 

4. le personnel d’entretien dans toutes les entreprises, ainsi que personnel de sécurité, aides à domicile 

5. dans le secteur de la santé, tous les établissements sont en pénurie d’aides-soignants 

Certains de ces métiers demandent  de l’expérience et de l’expertise, mais beaucoup ne requièrent qu’assez peu de formation. La formation est d’ailleurs proposée par la plupart des entreprises demandeurs. En théorie, beaucoup de projets d’embauches offrent des opportunités de corriger les carences de la formation initiale.

Dans beaucoup de secteurs, les horaires ont été réaménagés, dans la restauration par exemple ou les hôpitaux, les salaires ont été revalorisés, mais rien n’y fait, les entreprises ont toujours autant de mal à recruter et à fidéliser. L’urgence des urgences est de répondre à la demande saisonnière de l’été. Beaucoup de commerces  de café, de restaurant , ont prévu de fermer un ou deux jours dans la semaine faute de main d’œuvre. Beaucoup de restaurants se retrouvent dans l’obligation de ne servir qu’un seul repas, déjeuner ou dîner, parce qu’ils n’ont pas le personnel pour assurer les deux services.

La loi travail va donc en priorité essayer de répondre à cette urgence par une meilleure organisation du marché de l’emploi.  Une plus grande fluidité comme le dit le projet de loi. La belle affaire . Le risque est de créer une usine à gaz de plus. 

Le problème va être de résoudre la question de la motivation au travail qui a beaucoup évolué depuis dix ans et notamment après le Covid. Beaucoup  de ceux qui pourraient travailler ne le veulent plus , quitte à changer leur mode de vie. Tout se passe comme si le travail comme composante de la vie sociale et personnelle était sorti du logiciel de la vie quotidienne. 

Le courant d’opinion qui regroupe ceux qui considèrent que la croissance économique et l’accumulation de richesses ne sont plus les réponses adéquates. Ce courant qui défend la religion de la non croissance ou du non travail, a rejoint celui des écologistes dont certains prônent aussi la non croissance comme solution au réchauffement climatique. Pas ou peu de croissance ce n’est pour eux pas ou peu d’émission de gaz à effet de serre. Donc, beaucoup  considèrent qu’à  l’époque actuelle ils n’ont  pas besoin de travailler plus. 

Il va donc falloir dans la loi et pour des raisons de justice autant que d’efficacité, clarifier la question du RSA… Le RSA a permis à beaucoup de gens en situation difficile de survivre, mais le RSA n’a pas permis d'accroître leur appétence pour l’emploi, au contraire. Le projet de conditionner une aide sociale  comme le RSA a une obligation de fournir du travail pour le bien public  ne manquerait pas de vertu. Mais c’est toute une organisation qu’il faut mettre en place et surtout impulser un changement d’attitude par rapport aux aides publiques. Pas question d’hypothéquer la puissance de l’État providence, mais de changer le contrat lierait le simple citoyen à cet État. Un contrat qui donne des droits certes mais qui imposerait aussi quelques obligations ce qui sérieusement n’est pas le cas aujourd’hui. 

On ne dira pas que certains sans emplois sont peu pressés d’en trouver certes, mais on peut dire que la générosité du système ne les incite guère à en chercher.

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