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La sixième extinction de masse en cours est-elle plus évitable que les précédentes ?
©WALTER DIAZ / AFP

Alerte à la biodiversité

Selon un rapport publié par la Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), près d'un million d'espèces animale et végétale seraient sur le point de disparaître, soit une espèce sur huit.

Romain Julliard

Romain Julliard

Professeur du Muséum national d'Histoire naturelle, biologiste, spécialisé en Biologie de la Conservation, dans la conception, l'animation et la valorisation d'observatoire de la biodiversité (projet Vigie Nature), les thèmes de recherche principaux de Romain Julliard portent sur l'homogénéisation fonctionnelle de la biodiversité, ses mécanismes (réorganisation des communautés sous l'effet des changements globaux) et ses applications (construction d'indicateur de biodiversité).

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Atlantico : Alors que la planète a été d'ores et déjà témoin de plusieurs extinctions de masse, en quoi pourrait-on penser que la situation qui s'annonce pourrait être plus "évitable" que les précédentes ? 

Romain Julliard : Ces extinctions massives ont une origine qui ne fait aucun doute : notre exploitation non durable de la nature, avec trois mécanismes principaux, (1) la destruction des habitats par l’agriculture, l’urbanisation et l’exploitation forestière, (2) la surexploitation directe (en particulier, poissons en mer ; grande faune en Afrique) et (3) les pollutions diverses, à quoi vient s’ajouter comme phénomène amplificateur, le réchauffement climatique et les introductions d’espèces notamment dans les écosystèmes insulaires (lacs, îles). Cela conduit à ces pertes irréversibles et dramatiques que sont les extinctions mais aussi à une baisse massive de nombreuses populations et des dysfonctionnements en chaîne dans les écosystèmes qui vont avec.  

Comment mesurer la part du phénomène sur laquelle nous n'aurions que peu de prise ? 

 Il y a une part du phénomène sur laquelle nous avons peu de prise et qui est difficile à mesurer, ce sont les conséquences pour notre qualité de vie et pour l’état des ressources dont nous dépendons. Chacun peut déjà constater combien il est triste de se promener dans les plaines agricoles silencieuses,  où manquent papillons et fleurs des champs, mais personne ne sait mesurer cette tristesse. Les stocks de poissons pêchés sont pour beaucoup menacés et les quantités pêchées mondialement ne se maintiennent que parce que la technique permet d’aller plus loin et plus profond pour attraper l’ultime poisson. Manifestement, ce futur n’est pas assez tangible pour agir. 

Quelles seraient les actions "réalistes" que nous pourrions mettre en oeuvre et qui pourraient avoir un véritable impact sur cette menace ?

Aucun levier « réaliste » ne semble susceptible d’être efficace. Il nous faut être utopique et changer de paradigme. Au cours de l’histoire des sociétés occidentales, la biodiversité a d’abord été pensée comme une ressource infinie (la « manne divine »), puis comme un capital fini à exploiter au maximum comme d’autres ressources naturelles du même type (les énergies fossiles par exemple) ; pourtant, et nos sociétés n’en ont pas encore saisi l’importance, la biodiversité a ceci de particulier qu’elle est dynamique et renouvelable. Il nous faut trouver une nouvelle forme de contrat social qui incorpore notre dépendance au maintien de la capacité de la nature à se renouveler. C’est une condition pour enrayer la crise de la biodiversité et celle intimement associée de la crise systémique de nos sociétés.

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