La performance économique dépend de la force démocratique donc de la participation aux élections... <!-- --> | Atlantico.fr
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Un électeur glissant un bulletin de vote, Illustration, Photo AFP
Un électeur glissant un bulletin de vote, Illustration, Photo AFP
©LUDOVIC MARIN / AFP

Atlantico Business

Vincent Pons, 39 ans, lauréat 2023 du prix du meilleur jeune économiste de l’année est professeur à Harvard. Sa recherche a porté sur l’impact de la qualité d’une démocratie sur la performance économique. Il plaide donc pour des mesures d’incitation à la participation électorale.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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« Faudra-t-il rendre la participation électorale obligatoire pour améliorer la qualité de la politique économique et donc sa performance ?». Vincent Pons , 39 ans lauréat 2023 du prix du meilleur jeune économiste décerné comme chaque année par le cercle des économistes et le journal Le Monde ne va pas, jusqu’ à proposer que le droit de vote soit obligatoire , mais il n’en est pas loin. En clair ,les travaux qui lui valent cette distinction internationale  portent sur la relation qui existe entre la qualité d’une démocratie politique et la performance d’une politique économique.

A priori, l'idée paraît simple. On sait déjà, et l’actualité quotidienne nous en apporte l’illustration, que les régimes autoritaires ne tiennent pas très longtemps face à une crise économique et sociale. L’inflation, les pénuries de biens alimentaires notamment, le chômage ont toujours été dans l’histoire les ferments de révoltes populaires qui portent des revendications de  changements radicaux...

Mais on sait aussi que la prospérité économique pour le plus grand nombre n’est possible que dans un régime de liberté démocratique. L’économie de marché, la concurrence, l’innovation qui sont les moteurs du progrès ne fonctionnent bien qu’en démocratie. Il y a peu d’exemples de dictatures ou de régimes très autoritaires qui soient devenus des champions du monde du bien-être pour le plus grand nombre.

Mais ce qui est intéressant c’est que Vincent Pons va plus loin. A partir de l’analyse de données empiriques et de big data de très grande ampleur, il a mesuré dans les démocraties l’impact des diverses formes de communication politique et il en arrive à la conclusion que les pays où les élections se déroulent normalement et sérieusement, et aussi où la participation aux élections est la plus importante, les résultats de la politique économique à court , moyen terme et long terme sont meilleurs.

Pourquoi ? Et bien parce que les élus ont une légitimité beaucoup plus forte. A partir du moment où ils ont pu faire une campagne claire avec un programme qui a pu être présenté et expliqué, les élus sont appuyés dans l’exécution de leur politique par une légitimité forte. Ils sont sécurisés et peuvent alors appliquer les réformes annoncées dès lors qu’elles ont été expliquées en amont des élections.

Le reproche que la majorité des français font à Emmanuel Macron est son manque de légitimité. Il a certes emporté l’élection présidentielle au 2e tour, mais il avait moins de 25% des votants au premier. Son taux de popularité ou d’adhésion est donc très bas. Le vrai problème est l’abstention record, puisqu’elle atteint en moyenne 30% du corps électoral, notamment chez les jeunes. Conséquences , le consensus est très difficile à obtenir et l’expression populaire qui ne s’est pas exprimée dans les urnes, s’exprime en dehors des urnes, dans les sondages, sur les réseaux sociaux ou dans la rue. A tel point qu'aujourd'hui on parle souvent d’une démocratie populaire et sociale mais qu'on ne peut  pas mesurer et estimer mais dont on sait aussi qu’elle est peut-être très souvent et facilement manipulée. Dans cette situation, il est très difficile à l’exécutif de prendre des mesures de reformes qui peuvent être douloureuses alors qu’elles  sont de toute façon nécessaires. L’homme politique mal élu ne tient pas très longtemps. Il ne peut pas passer ses réformes, mais si son diagnostic de départ était bon on lui reprochera le moment venu de ne pas l’avoir fait.

D’où les dérives populistes, démagogiques, qui aboutissent à des évolutions qui ne vont pas forcément dans le sens du progrès pour tous. L’élection de Donald Trump , le vote du brexit en Grande Bretagne sont des exemples flagrants d’un mauvais fonctionnement de la démocratie. Exemples dangereux parce que la démagogie  pousse les démocraties vers des mesures autoritaires. Et les régimes autoritaires sont peut-être capables d’imposer l’ordre et le silence, mais n’ont jamais été capables de générer de la prospérité économique. Le problème dans cette affaire c’est donc de favoriser le vote des électeurs sans pour autant le rendre obligatoire, parce que l’abstention est aussi une forme de vote... Alors que le succès de l’action politique dépend principalement de la participation au vote. La question est donc de savoir comment inciter les électeurs à voter. Si Vincent Pons exclut l’idée de rendre le vote obligatoire, en revanche il suggère l’inscription obligatoire des populations en âge de voter sur les listes électorales qui n’est pas automatique  en France, il suggère aussi des incitations à aller voter. Parce que rien qu’en France, c’est finalement assez difficile pour certaines catégories de français de s’inscrire (alors que ça devrait être automatique) difficile aussi d’aller voter…

Mais le fonctionnement de la démocratie ne s’arrête pas au vote, il faut aussi en aval mesurer l’adéquation entre ce qui a été promis et annoncé avec le résultat . Rien ne l’interdit dans la mesure où l’exécutif à une forte légitimité. La démocratie a une obligation de résultats.

Vincent Pons est français, c’est un pur produit du système français, passé par Sciences Po et par « Normale supérieure », qui a fait sa thèse de doctorat au MIT en 2014 et a été recruté par Harvard comme professeur-chercheur où il réside actuellement. Ses travaux s’appuient sur l’analyse économique mais relèvent aussi de la science politique, ses travaux sont régulièrement publiés dans les revues internationales les plus prestigieuses comme le Quarter Journal of Economicus, ou l’American Economic Review,) bien connues des universitaires , mais débordent désormais les centres de recherche pour toucher le grand public. Cette graine de prix Nobel comme on en a parfois en France a donc aussi commis des ouvrages plus accessibles « Porte à porte : reconquérir la démocratie sur le terrain » publié en France chez Calmann-Lévy , avec Guillaume Liège et Arthur Miller.

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