La facture d’une élection présidentielle sans véritable campagne sera lourde. Mais peut-on encore l’éviter ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Un montage des portraits d'une partie des candidats à l'élection présidentielle d'avril 2022.
Un montage des portraits d'une partie des candidats à l'élection présidentielle d'avril 2022.
©Eric Feferberg, Joël SAGET, Patrick KOVARIK / AFP

Vie démocratique

Certains politiques ont dénoncé l'omniprésence de la guerre en Ukraine dans la campagne présidentielle, occultant les débats nationaux. Ils appellent le président sortant à participer aux débats avec les autres candidats, afin d’assurer la légitimité de l'élection.

Jean Petaux

Jean Petaux

Jean Petaux, docteur habilité à diriger des recherches en science politique, a enseigné et a été pendant 31 ans membre de l’équipe de direction de Sciences Po Bordeaux, jusqu’au 1er janvier 2022, établissement dont il est lui-même diplômé (1978).

Auteur d’une quinzaine d’ouvrages, son dernier livre, en librairie le 9 septembre 2022, est intitulé : « L’Appel du 18 juin 1940. Usages politiques d’un mythe ». Il est publié aux éditions Le Bord de l’Eau dans la collection « Territoires du politique » qu’il dirige.

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Atlantico : Bruno Retailleau et Gérard Larcher ont mis en garde contre l’absence de campagne présidentielle en raison du contexte ukrainien, estimant que sans débat, se poserait la question de la légitimité de celui qui sera élu. A quel point les conséquences d’une élection sans campagne seraient-elles lourdes politiquement, socialement et sur le plan des institutions ?

Jean Petaux : Il convient, en toute rigueur, de ne pas confondre Gérard Larcher et Bruno Retailleau. Le président du Sénat, deuxième personnage de l’Etat, s’exprime avec une autorité politique et institutionnelle nettement supérieure au second, président du groupe Les Républicains à la « chambre haute ». Bruno Retailleau a effectivement indiqué, dans un entretien public, « qu’une élection sans débat conduirait à un président élu sans mandat ». Il a souligné que si Emmanuel Macron était élu, sans qu’une campagne électorale ait véritablement eu lieu, cette élection serait marquée par une forme d’illégitimité. À bien y réfléchir cette démonstration, dans la bouche d’un des responsables politiques d’un parti présent dans la course présidentielle est très surprenante. Valérie Pécresse, la candidate soutenue par Bruno Retailleau, a obtenu le plus grand nombre de parrainages, preuve que cette formation politique dispose encore d’une « force de frappe » territoriale non-négligeable. Mais, hélas pour Madame Pécresse, cette « course en tête » des parrainages n’a aucun intérêt électoral. Ce qui compte ce sont les intentions de vote. Pour ce qui la concerne, elles connaissent une baisse régulière et très inquiétante (sondage Elabe publié le 01 mars 2022 la « pointant » à 11,5% des intentions de votes, soit désormais derrière Jean-Luc Mélenchon et donc en cinquième position…). On peut donc se demander si Bruno Retailleau n’a pas déjà, inconsciemment, intégré l’élimination directe de sa « championne » dès le soir du premier tour. Car s’il estimait, ne serait-ce qu’un tout petit peu, que la candidate LR était en capacité, non seulement de figurer au second tour, mais de l’emporter le 24 avril au soir, il ne ferait pas du tout ce procès en «illégitimité». En faisant sa démonstration, Monsieur Retailleau a intégré la victoire d’Emmanuel Macron et se projette, déjà, dans le rôle d’un des responsables de l’opposition présidentielle et gouvernementale. Singulière manière de faire campagne… 

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Il reste que si l’appréciation de Bruno Retailleau est maladroite et malvenue pour Valérie Pécresse, elle n’est pas pour autant erronée. Le quinquennat qui s’achève, au moins par la crise des Gilets Jaunes mais aussi par ce qui s’amorçait dans la réforme « systémique » des retraites, a bien montré que, même avec un débat politique ayant existé entre novembre 2016 et mai 2017 (même s’il ne fut pas « intense » comme en 1974, 1981, 1995 ou en 2007 et 2012, ce débat a été âpre et disputé en comparaison avec l’absence totale de cette année), la question du manque de légitimité à gouverner du président de la République a été le « bruit de fond » de la vie politique française entre 2017 et 2022. On peut, dès lors, craindre le pire pour le quinquennat qui s’annonce après le 24 avril et supposer que ce sentiment d’illégitimité ira croissant chez les Français, à son égard. 

Dans quelle mesure le désintérêt démocratique et le manque d’intérêt pour les candidats en lice risque-t-il de renforcer ce sentiment ? N’y-a-t-il pas un manque de projet susceptible de créer l’adhésion ?

Jean Petaux : L’absence de « vraie » campagne avec toute la dramaturgie qui « fait monter la pression », avec la mise en scène des meetings qui suscite de l’intérêt et donc génère, sinon des débats, au moins les conversations à la machine à café ou entre amis ou en famille, toute cette « formalisation » qui fait défaut du fait du contexte sanitaire jusqu’à maintenant et, désormais, de manière bien plus intense encore du fait de la « chape de plomb » engendrée par la situation internationale très tendue et anxiogène, l’ensemble de ces manques conjugués entraine un amoindrissement des échanges politiques. Comme, par ailleurs, il faut bien dire que les projets ne sont pas « denses » et, formellement, assez peu « mis en intrigues », le débat n’existe guère. C’est regrettable et dommageable dans la mesure où la conséquence directe de cet « étouffement » est le désintérêt du public, autrement dit des électeurs. 

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Il se peut que la crise internationale ramène du clivage entre les candidats. Ce n’est guère la tradition puisqu’il existe une forme de consensus sur les relations internationales. Pour autant on voit s’amorcer quelques prises de position différentes à l’égard de la conduite à tenir vis-à-vis de Poutine qui pourraient intéresser les électeurs et « rallumer la flamme » des divergences politiques. Finalement la configuration est assez simple. Elle tient dans l’énonciation suivante. Sans clivages marqués entre concurrents : pas de débats entre eux et leurs supporters ; sans débats et conflits spectaculaires : pas de campagne ; sans campagne : peu d’intérêt du corps électoraldonc forte abstention potentielle. 

Une campagne présidentielle atrophiée ne risque-t-elle pas de créer des frustrations politiques de l’ordre des gilets jaunes ou des éruptions violentes ?

Jean Petaux : C’est une forte probabilité en effet. Emmanuel Macron a été élu par 44% des électeurs inscrits sur les listes électorales, en mai 2017. C’est comparable aux chiffres de Nicolas Sarkozy en 2007 (43% des inscrits) et de François Hollande en 2012 (39%). Ce score, tout à fait dans les « standards » de l’élection présidentielle, depuis 25 ans, tient beaucoup à une participation encore satisfaisante au second tour de 2017 et surtout à « l’épouvantail » Marine Le Pen qui a eu un effet mobilisateur, même s’il fut nettement moindre qu’après le 21 avril 2002 qui a vu son père se qualifier au second tour. Pour 2022, dans l’hypothèse d’un duel Macron / Le Pen ou Macron / Zemmour (pure hypothèse car aujourd’hui rien n’interdit par exemple qu’il y ait un second tour Macron / Mélenchon…), il est très probable que l’abstention soit à un niveau bien plus élevé qu’au second tour de 2017 (25,44% des inscrits, soit 3,2% de plus qu’au premier tour). En conséquence de quoi, le 24 avril 2022, « l’assiette électorale » d’Emmanuel Macron sera bien moindre que le 7 mai 2017, jour du second tour, et, phénomène cumulatif, le score de sa ou de son challenger dépassera sans doute 40% des suffrages exprimés (Marine Le Pen : 33,90 % en 2017).  La possibilité d’une élection médiocre pour Emmanuel Macron n’est donc pas du tout à exclure. Mais, question de logique, cette situation vaudra pour tout autre élu ou élue que lui. Sans doute d’ailleurs avec plus force. C’est la raison pour laquelle la réflexion de Bruno Retailleau que vous mentionniez dans votre première question est véritablement « politiquement inopportune ». En imaginant que la candidate LR soit élue à l’Elysée le 24 avril (spectaculaire retournement de situation qui serait une vraie « remontada »…), elle le serait dans des conditions telles, craintes par Bruno Retailleau, qu’elle serait encore plus dans l’incapacité de diriger le pays que le président sortant.

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L’actuel président, même pour un second mandat, serait donc mal élu dans les urnes et mal élu par manque de débat politique sur son projet… Son deuxième quinquennat sera forcément alors bien plus « chahuté » que le premier ! C’est dire…. S’ajoutera à ce « procès en légitimité électorale présidentielle », la reconduction du « fait majoritaire » à l’Assemblée nationale, où, même si la « majorité présidentielle » sera moins monolithique et impressionnante qu’elle ne le fut en juin 2017 (on a vu d’ailleurs que le groupe LREM n’a cessé de voir son effectif pléthorique se « dégraisser » tout au long du quinquennat), toute une partie des opposants à Emmanuel Macron s’estimeront, à juste titre, non représentés démocratiquement à l’Assemblée nationale du fait de l’absence, même partielle, d’une proportionnalité dans l’élection législative. Les deux « ingrédients » (la critique à l’égard du président élu sur sa véritable légitimité à l’être mais surtout à « présider » et l’Assemblée suspectée d’être « non démocratique ») constitueront, sinon un poison violent pour la majorité présidentielle et gouvernementale, à tout le moins un cocktail détonant dans les mois à venir, dès qu’un projet de réforme sera inscrit à l’agenda politique.

Est-il encore possible de restaurer une véritable campagne présidentielle ? Par quel moyen ?

Jean Petaux : Ce genre de chose ne se décrète pas… Un des scénarii possibles pour les semaines à venir serait que la situation internationale, loin de baisser en intensité, non seulement se maintienne à un niveau élevé, mais s’aggrave encore. Dans cette hypothèse le « couvercle » sur la campagne présidentielle sera vraiment verrouillé et fort peu d’éléments de politique nationale parviendront à « sortir de la boite ». Tous les médias continueront à se désintéresser du contexte franco-français pour « couvrir » la crise internationale et géopolitique. Dans tous les cas le président de la République va se retrouver dans une situation, progressivement, de plus en plus « piégée ». Certes son statut de chef de l’Etat lui donne un avantage comparatif substantiel par rapport à ses concurrents. Incarnant la « souveraineté nationale » il est aussi « le père de la nation », protecteur et commandant en chef des armées (d’où le message très exceptionnel adressé lundi soir aux militaires français). Mais, cet « uniforme » risque de se transformer en « tunique de Nessus », celle qui brûla Héracles au point de le tuer, figure définitive du « cadeau empoisonné » : comment faire campagne « face aux autres » quand on est le chef d’un Etat engagé dans une coalition en situation de guerre potentielle ? Comment faire un meeting et soulever les cœurs avec rires, passions, applaudissements, images calibrées de « liesse populaire » dûment mise en scène par les « spin doctors » de l’équipe de campagne présidentielle, quand le monde se pense et danse au bord du cratère du volcan ? D’ores et déjà le meeting « emblématique » d’entrée en campagne, prévu dans « la ville de cœur », Marseille, le samedi 5 mars est annulé… Emmanuel Macron devient ainsi une sorte de « candidat oxymore » : un « entrant (en campagne) forcé d’en sortir (avant même de monter sur le ring) et « un (président) sortant qui voudrait entrer maintenant dans l’arène électorale et s’en trouve empêché ». 

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Il faut bien reconnaitre que son absence actuelle du casting électoral nuit beaucoup à la qualité du spectacle. Non pas tant par ses qualités propres qui sont réelles et le placent largement dans le peloton de tête des « acteurs » destinés àfigurer au « générique » du « spectacle » mais aussi parce qu’il existe un « ressort » immuable pour susciter l’intérêt des « spectateurs-électeurs » et redonner du souffle à un scénario anesthésié et anesthésiant. L’éternelle question posée depuis les Jeux du Cirque à Rome : qui va gagner entre le gladiateur champion en titre et celui qui vient lui disputer sa couronne ? Le « sortant » va-t-il être battu ou gagner une seconde fois ? Le favori (actuel) des sondages, celui qui semble avoir « course gagnée », va-t-il « coincer en montagne », « chuter dans le sprint final », ou confirmer les pronostics des parieurs pour la plus grande joie de ses supporters qui se sont remis « en marche » ? 

On pourrait ajouter à la configuration précédemment mentionnée, un dernier codicille dans son énonciation : « Sans Macron, peu de passion »… Raison de plus, pour la « beauté du match » et l’intérêt de la campagne, qu’il chausse rapidement les crampons.

« Bien sûr, je ne pourrai pas mener campagne comme je l’aurais souhaité en raison du contexte ». Cette déclaration de Macron dans sa lettre de candidature en Français acte-t-elle une forme de non campagne plus générale ?

Jean Petaux : Cette phrase d’Emmanuel Macron est tout sauf une surprise. On s’étonnerait presque de ne pas y trouver, en amorce, le « rappel » suivant : « Comme prévu, bien sûr…, etc. » tant il fallait s’attendre à cette posture. Formellement et fondamentalement elle n’a rien de scandaleuse d’ailleurs. En poussant le trait, dans une formulation que rejetteront tous les démocrates, y compris ceux de la « tendance hétérodoxe » incarnée par Marine Le Pen, Eric Zemmour ou encore Jean-Luc Mélenchon : le président en fonction, en ce moment, « à autre chose de plus important à faire qu’une campagne électorale ». Entre un débat franco-français sur « faut-il travailler plus pour gagner plus et baisser les impôts sur le travail et les impôts de production ? » et le bombardement massif de la plus grande centrale nucléaire du continent européen disposant de six réacteurs dont la destruction renverrait l’explosion de Tchernobyl au rang de « simple incident nucléaire », on comprend aisément que le « niveau critique » n’est pas tout à fait le même. Et c’est bien là que réside le problème d’ailleurs. Quoi choisir ? Comment se comporter ? En président ou en candidat ? Faut-il accepter de « parler programme » et d’en « débattre », quand, à 3.000 kilomètres des frontières de la France, le « projet » du chef de l’Etat de la Fédération de Russie est de prendre entièrement le contrôle d’un Etat souverain et voisin, « quoi qu’il en coûte », au risque de déstabiliser le monde entier par une « réaction en chaine » (c’est le cas de le dire) échappant à toute régulation internationale ?

De facto, sinon de jure, le président Macron ne peut laisser vraiment le champ libre au candidat Emmanuel, pour un second quinquennat. Que faudrait-il faire alors ?

Première option : Emmanuel Macron devrait renoncer à se présenter pour demeurer entièrement consacré à sa mission de chef de l’Etat, capitaine du « vaisseau France », pris dans une tempête mondiale. Certains de ses concurrents dans la « course présidentielle » l’ont peut-être espéré, tant semble grande son avance sur eux et élevée la probabilité de sa réélection. Mais sur quels fondements juridiques ou politiques cette « interdiction de candidature » serait-elle motivée ? Sur aucun évidemment ! Rien ne permet d’exiger une telle attitude de sa part. D’autant, semble-t-il, qu’une majorité de Français, certes relative, mais « majoritaire » néanmoins, entend lui renouveler sa confiance. 

Deuxième option : repousser les élections à d’autres échéances et à des temps meilleurs, en considérant que les conditions ne sont pas réunies pour qu’une campagne démocratique, répondant aux standards en vigueur dans les démocraties membres du Conseil de l’Europe et de l’OSCE, puisse se tenir. Il faudrait donc différer dans le tempscette consultation qui est « la mère des élections » dans notre pays, alors qu’elle serait empêchée en ce momentdu fait des contraintes internationales qui pèsent sur la situation politique intérieure française ? Mais jusqu’à quand durerait alors cette « prolongation de bail élyséen » ? Qu’est-ce qui pourrait y mettre fin et déclencher, ipso facto,la reprise du processus électoral ? On imagine ici les protestations des adversaires et concurrents du président sortant : « coup d’Etat non dit », « recours à une législation d’exception », « emploi inconstitutionnel de l’article 16 de la Constitution – qui ne prévoit même pas une telle configuration politique à même de justifier d’y recourir– ». En d’autres termes cette option est bien impossible.

Troisième option(celle qui a été retenue) : maintenir l’échéance électorale aux 10 et 24 avril prochains, en faisant une campagne « a minima » pour Emmanuel Macron, autrement dit faire la course avec les mains attachées dans le dos et peut-être même un boulet accroché au pied. Être le seul désormais après le 14 mars à devoir porter un « masque politique » l’empêchant, si non de parler, au moins d’être audible… Une situation paradoxale. Position de « surplomb » sur tous ses concurrents, primus inter pares d’autant plus marqué et légitime à l’être qu’il est le président en titre du Conseileuropéen des chefs d’Etat et de gouvernement ; le président de la République française et, à ce titre, le chef des Armées. Ses adversaires vont l’attaquer pour l’obliger à se départir de ce statut et à descendre dans la mêlée politique, celle des candidats au premier tour de la présidentielle. Le forcer à être un « candidat comme les autres » (« comme eux » autrement dit). Ce sera leur seul jeu et ils le joueront, légitimement, à fond. Macron résistera-t-il à sa propre tentation ? Celle de « jouer » lui aussi le match ? Il devrait faire en sorte de ne pas« succomber » à l’envie d’engager le fer et de rompre des lances,même politiques, même rhétoriques, contre ses adversaires … L’exemple de Poutine est là devant ses yeux : on ne sait jamais dans quel état on ressort d’une guerre ou d’une bagarre généralisée. Même quand, « sur le papier » on est donné comme le grand gagnant probable et le grandissime favori. Les « circonstances » (l’un des mots préférés du général de Gaulle car il lui permettait de faire totalement le contraire de ce qu’il avait éventuellement promis) servent Emmanuel Macron qui a tout intérêt à ne pas faire une « vraie campagne ». Même s’il fait semblant de s’en excuser, par avance, dans sa « Lettre aux Français ». Qu’il en profite… La suite (son second quinquennat) risque d’être moins porté par des vents aussi favorables. 

Une bonne fois pour toute : en politique on n’échappe que rarement à son statut. Lors du débat de l’entre-deux tours de la présidentielle de 1988, Jacques Chirac, tendu à l’extrême, cherche, dès l’entame, à mettre KO son adversaire, le président sortant. Cela donne (dans l’esprit à défaut d’être aux mots près) l’échange suivant : « Monsieur Mitterrand,vous m’autoriserez à vous appeler ainsi, car, ce soir, nous sommes deux candidats. Vous n’êtes pas le président de la République et moi je ne suis pas le premier ministre.Nous sommes deux candidats qui débattons sur un pied d’égalité ». Réponse doucereuse du président sortant, toute pleine d’un miel venimeux et mortel : « Mais vous avez totalement raison Monsieur le premier ministre » et appuyée par le sourire triste, vaguement contrit,de celui qui vient de donner le « coup de grâce » à son vis-à-vis, moins de trois minutes après le « coup d’envoi » du débat. Car, tous les témoins de la scène s’en souviennent : à compter de ce moment, sur cette seule réplique, il était évident que Mitterrand avait gagné le fameux « grand débat d’entre deux tours »et donc, finalement, la présidentielle de 1988. Tout porte à croire qu’Emmanuel Macron aura retenu la leçon : « Ne pas chercher à échapper à son statut car celui-ci est la meilleure garantie de réélection ». 

Cet entretien a été réalisé dans la soirée du 1er mars, sauf pour la dernière question, qui date du 4 mars 2022.

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