L’Insee a fouillé dans les secrets de la (non) participation électorale des scrutins de 2022 et voilà ce que ça nous apprend sur l’état réel de la démocratie française <!-- --> | Atlantico.fr
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Un citoyen s'apprête à voter avec sa carte électorale.
Un citoyen s'apprête à voter avec sa carte électorale.
©Ludovic MARIN / AFP

Enseignements du vote

Depuis 2002, les Français participent tous les cinq ans à deux scrutins nationaux la même année, l’élection présidentielle et les élections législatives. En 2022, la proportion de votants systématiques est passée à 37 %, une baisse de 11 points en vingt ans d’après l’Insee.

Isabelle Robert-Bobée

Isabelle Robert-Bobée

Isabelle Robert-Bobée est responsable de la division enquête et démographie de l’Insee.

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Atlantico : Vous avez mené une étude pour l’INSEE sur la participation électorale, qu'avez- vous observé de son évolution sur 20 ans ?

Isabelle Robert-Bobée : C’est une enquête que nous faisons depuis longtemps. En 2022, la majorité des personnes inscrites sur les listes électorales ont voté par intermittence aux élections présidentielles et législatives. C’est-à-dire qu’ils ont voté mais pas à tous les tours. C’est valable pour un électeur sur deux. Il est donc plus fréquent que le vote dit systématique – ceux qui votent à tous les tours – ou que l’abstention – ceux qui n’ont voté à aucun des tours – qui était à 16%.

Concernant l’évolution, le fait marquant c’est cette dominance désormais du vote par intermittence depuis 2017 (avec une légère baisse sur cinq ans). Jusqu’en 2012, le vote systématique prédominait. Ce changement est globalement valable pour tous les âges et toutes les catégories de diplôme.

Quelles sont les disparités selon l’âge ?

Selon l'âge, le niveau de vote n’est en effet pas le même. Les jeunes électeurs s’abstiennent plus que les autres et quand ils votent ils le font principalement par intermittence. 24% des 18-24 ans sont abstentionnistes et 60 % votent par intermittence. Les jeunes votent aussi beaucoup moins aux législatives qu’à la présidentielle. Le vote par intermittence diminue avec l’âge au profit d’un vote systématique. Ainsi les 70-79 ans votent toujours majoritairement de manière systématique. Néanmoins, il y a une abstention très marquée aux âges très avancés. Après 85 ans, on constate une abstention plus forte que chez les jeunes. On peut supposer que c’est lié à la santé des personnes.

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Est-on face à un effet d’âge ou un effet de génération ?

On ne l’a pas regardé dans cette étude. Mais ce qu’on a observé chez les jeunes, c’est une mobilité géographique plus importante qui fait qu’ils résident moins souvent que les autres dans la commune où ils sont inscrits. Et on sait que c’est un facteur associé au fait de moins voter.

L’écart s’est aussi creusé selon le niveau de diplôme…

Oui, ce sont les personnes les mieux dotées socialement qui participent le plus. C’était déjà vrai en 2017 et les écarts se sont creusés. C’est particulièrement parlant sur l’abstention systématique : 10% des électeurs qui ont un diplôme du supérieur contre 30% des électeurs sans diplôme.

Quel est le poids dans le vote des diplômés et des personnes âgées ?

Il y a des écarts importants de participation aux votes selon l’âge et le diplôme. Les personnes qui votent ont des caractéristiques sociales plus favorisées. Mais toutes les catégories votent. Il faut toutefois noter que habiter dans les quartiers de politique prioritaire de la ville est un facteur d’abstention, au-delà du fait que les populations qui y habitent sont plus jeunes et moins diplômées.

Vous avez aussi interrogé la distinction entre zone rurale et urbaine et entre homme et femme. Qu’observez-vous ?

Les écarts ne sont en fait pas très marqués entre zones rurales et urbaines si l’on tient compte du fait que les caractéristiques de la population ne sont pas les mêmes.

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Il y a peu d’écart entre les femmes et les hommes sauf aux âges élevés. Les jeunes femmes participent un peu plus que les jeunes hommes mais les femmes âgées de plus de 80 ans participent moins.

Que nous apprend l’étude des procurations ?

Ce sont les personnes qui ont les caractéristiques de forte participation aux votes qui sont aussi celles qui font le plus de procuration. Donc il y a des différentiels sur la participation mais aussi sur le mode de participation.

Quelles conclusions tirez-vous de ces données ?

La participation au vote reste très marquée selon les caractéristiques sociales des personnes : le diplôme, le niveau de vie, etc. L’âge est aussi un facteur important. Ces caractéristiques sociales jouaient fortement sur la participation aux votes il y a 20 ans, et c’est toujours le cas aujourd’hui.

Pensez-vous que ces tendances vont continuer à s’accentuer ?

Sur les 20 ans d’observation, l’abstention a augmenté (sauf entre 2002 et 2007), mais le phénomène majoritaire reste bien de voter.

Pour retrouver l'étude de l'Insee, cliquez ICI

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