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L’Inde va entrer dans le top 5 des économies mondiales et la France en sortir : faut-il s’en inquiéter ?
©NARINDER NANU / AFP

C’est grave docteur ?

La France a longtemps été la cinquième puissance économique mondiale. Dans les deux décennies à venir, nous allons assister à un bouleversement inexorable du classement interétatique.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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La France a longtemps été la cinquième puissance économique mondiale. Dans les deux décennies à venir, nous allons assister à un bouleversement inexorable du classement interétatique.

Il est désormais loin le temps où l'on désignait bien des nations par l'expression de pays en voie de développement voire plus crûment de pays du tiers-monde.

Ainsi, l'Inde sera dès 2018 la cinquième puissance mondiale reléguant la France au sixième rang. Certains analystes se précipitent sur l'explication démographique mais elle n'est pas seule en cause. Les informaticiens indiens (exemple de TCS), les comptables et autres sociétés d'audit sont réputées et reçoivent pléthore de chiffre d'affaire venu d'externalisations occidentales. Sans même évoquer la croissance de la productivité par tête.

A titre d'exemple, la Citibank fait imprimer l'ensemble des chéquiers de ses clients en Inde ce qui démontre que les coûts relatifs de la logistique permettent d'abattre les règles de la spécialisation internationale issues de l'esprit fécond de David Ricardo.

Désormais, de plus en plus de pays peuvent prétendre fabriquer de plus en plus de biens et services. C'est ce qui explique que selon plusieurs analyses dont celle récente du cabinet britannique " Center for Economics and Business Research ", la Chine dépassera les Etats-Unis peu après 2030.

Les experts français du CEPII sont formels : " la démondialisation n'aura pas lieu ". Autant dire que l'on perçoit tout de suite l'urgence du défi français qui réside dans notre compétitivité flasque que reflète, hélas, notre important déficit du commerce extérieur : - 63 milliards pour 2017.

En 2022, la France – toujours selon le CEBR – sera 7ème : en un quinquennat (dont nous ignorons pour l'heure le bénéfice intrinsèque) nous aurons perdu deux places au profit de l'Inde et du Royaume-Uni qui devrait absorber le Brexit puis devenir un grand pays de libre-échange attractif par sa fiscalité.

A défaut, le 6ème de 2022 ne serait autre que le Brésil puissance à la fois industrielle et agricole. Là encore, tout n'est que question de temps. L'étude précitée considère en effet que le Brésil sera la 6ème puissance économique mondiale en 2032.

Ces chiffres macroéconomiques recouvrent une réalité sectorielle bien anticipée par les banques d'affaires occidentales du type Lazard Frères, à savoir la montée progressive des opérations de fusions-acquisitions initiées par les pays du Sud.

Il faut évidemment penser à Mittal absorbant Arcelor, leader de l'acier européen en juillet 2006. Idem pour l'expansionnisme du groupe Tata. Les groupes indiens ont ainsi consacré près de 140 milliards de dollars à leur croissance externe sur la période 2005-2015.

Parallèlement, il faut penser aux rachats méthodiques des opérateurs chinois à l'instar de Fosun dans le secteur du tourisme (Club Med, etc).

Les pays composant les BRICS sont des puissances d'autant plus redoutables qu'elles ont désormais les moyens de venir acquérir, sur site, en Occident, les maillons technologiques qui manquent parfois à leur chaîne de valeur. Dès lors, on retrouve la notion d'avantage concurrentiel et d'étendue du marché chères à Adam Smith ou plus récemment aux matrices du BCG ou aux analyses de Michaël Porter.

Le centre de gravité du monde économique et géopolitique glisse irréversiblement vers l'Est : ainsi, en 2022 Chine et Japon confirmeront leur rang respectif actuel : 2ème et 3ème places.

Pour conclure sur cette dynamique des nations, il faut remarquer que 100 ans après le début de son réarmement (1933), l'Allemagne restera en 2032 à la cinquième place de ce classement. Paradoxe de l'Histoire européenne, le pays vaincu de 1945 sera le seul européen dans les cinq premiers.

Preuve avérée qu'il a su déléguer habilement des filières de sous-traitance à son hinterland (Tchéquie, Autriche, Hongrie, etc) et preuve anticipée qu'il risque de regarder encore davantage vers le concept de MittelEuropa et les théories du Groupe de Visegrad plutôt que vers les rêves atlantistes formulés par Jean Monnet il y a soixante ans.

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