L’histoire de la PME pour laquelle les investisseurs étrangers se bousculent... à condition qu’elle quitte la France<!-- --> | Atlantico.fr
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Renaud Prouveur, PDG du groupe Spallian, a créé un moteur français de cartographie innovant, récompensé par de nombreux prix technologiques.
Renaud Prouveur, PDG du groupe Spallian, a créé un moteur français de cartographie innovant, récompensé par de nombreux prix technologiques.
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La fiscalité m’a (presque) tuer

Renaud Prouveur, PDG du groupe Spallian, a créé un moteur français de cartographie innovant, récompensé par de nombreux prix technologiques. Des investisseurs étrangers sont prêts à financer son développement... Mais pas en France, car le risque fiscal est jugé trop lourd.

Renaud Prouveur

Renaud Prouveur

Renaud Prouveur est Président Directeur Général du groupe Spallian.
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Atlantico : Votre groupe Spallian, qui développe une activité de conseil stratégique et travaille auprès de nombreux ministères français et groupes internationaux a récemment créé un moteur de cartographie unique, "CORTO", qui permet de faire parler des données et de faciliter la prise de décision dans de nombreux domaines. Cet outil innovant a reçu des prix technologiques européens et américain. Pourtant, trouver des investisseurs français s'est révélé impossible pour votre entreprise. Quelles sont les difficultés auxquels vous avez été confronté ?

Renaud Prouveur : J'ai fondé ma société Spallian en 1998. Depuis deux ans, nous avons développé un logiciel de cartographie alternatif à google. Nous travaillons notamment sur la cartographie de la criminalité pour des institutions nationales comme internationales, ainsi que sur la cartographie des campagnes politiques. Cette nouvelle technologie nous a permis de connaître une phase de progression très importante grâce notamment à la signature nombreux contrats internationaux. Nous nous sommes donc retrouvés avec un marché qui dépassait largement nos capacités de prospection.

Cela nous a amené à engager des démarches pour rechercher de nouveaux fonds. Mon entreprise est profitable depuis 1999, mais nous avions besoin d'une bouffée d'oxygène pour pouvoir recruter de nouveaux ingénieurs et ainsi maintenir notre avance technologique, et développer notre force de vente à travers le recrutement de plusieurs chargés d’affaires. . C'est à partir de là, en octobre 2012, que les difficultés ont commencé : nous sommes allés au devant de nombreux fonds d'investissement.

A lire également : Qui vient encore, qui ne vient plus : les efforts de Hollande pour vendre la France aux investisseurs étrangers suffiront-ils à enrayer leur désaffection grandissante pour l'Hexagone ?

Nous avons eu énormément de mal à rencontrer des institutions françaises pourtant chargées de protéger les intérêts des entreprises nationales. Je pense notamment au FSI (Fonds Stratégique d'Investissement) qui n'a même pas daigné nous recevoir estimant que notre entreprise n'était pas stratégique. Alors même que nous allons démarrer un travail avec Interpol et notre technologie va être testée par le homeland security américain. Nous avons également vu d'autres institutions publiques comme la Caisse des dépôts, qui nous ont bien précisé qu'elle n'intervenait qu'en second couteau.

Ces structures sont-elles adaptées aux besoin des entrepreneurs ? Qu'en est-il de la Banque publique d'investissement (BPI) ?

Aujourd'hui, il n'y a pas d'infrastructures adaptées aux entreprises de taille intermédiaire comme la notre. Nous ne sommes pas une start-up et nous ne pouvons donc pas nous satisfaire des 300 000 euros alloués à ce titre par certaines régions. Le problème, c'est qu'il n'y a rien entre les 300 000 euros d'aide de départ et les fonds qui ne prennent en compte votre dossier qu'à partir du moment où vous avez dépassé le cap des 10 millions d'euros. Il n'y a pas d'interlocuteur adapté. C'est ce qui génère beaucoup de problèmes.

Concernant la BPI, nous n'y avons jamais eu accès. C'est une institution qui ne se conjugue qu'au futur ! En tant qu'entrepreneur, dans une période aussi complexe que celle que nous vivons en ce moment, nous avons besoin d’immédiateté et pas d'une usine à gaz.

Avez-vous eu plus de chance avec les investisseurs étrangers ? Ces derniers étaient-ils réticents à investir en France ?

Après nos échecs auprès des fonds français, nous nous sommes en effet tournés vers des fonds traditionnels qui sont pour la plupart anglais ou américain. L'ensemble de ces fonds étaient séduits par notre technologie, mais nous nous sommes heurtés à une forme de chantage financier. Beaucoup d'investisseurs tenaient le discours suivant : "Nous sommes investisseurs, mais pas mécènes ! Investir en France, c'est investir dans un pays où il y a un risque fiscal."Ils étaient prêts à investir à condition que nous quittions le pays ! Ces investisseurs ont été nourris par des cabinets de lobbying anglo-saxon qui ont présenté comme une réalité l'imposition sur les plus-values d'investissement entre 62% et 75%. Nous avons été obligés d'expliquer aux investisseurs potentiels que la taxe à 75% n'était qu'un projet politique, qui ne serait très probablement pas mis en œuvre, et qu'il ne concernerait que les ressortissants français.

La politique fiscale du gouvernement représente donc un frein pour les investisseurs...

En effet, le manque de responsabilité dans la communication gouvernementale sur le système d'imposition qui allait s'imposer aux investisseurs a été repris par de nombreux cabinets pour montrer que la France n'était pas un pays attractif. Il y a dans ce domaine un double discours. Le ministère de l'Economie et des finances nous présente la France comme un pays extrêmement attractif. Il y aurait de plus en plus d'investisseurs qui rentreraient dans le pays. Encore faudrait-il regarder les différents types d’investissement. Il y a une différence importante entre un investisseur qui place de l'argent dans des sociétés immobilières ou dans l'industrie du tourisme (qui de toute façon ne pourra pas quitter le pays) et ceux qui investissent dans des entreprises de nouvelles technologies. Pas une seule fois, les investisseurs ont accepté d'investir chez nous. Pas une seule fois, nous aurions pu lever des fonds sans lever le camp. La condition était toujours de partir en Angleterre ou aux Etats-Unis pour garantir aux investisseurs une situation fiscale stable.

Quelles solutions avez-vous trouvé pour continuer à vous développer. Avez-vous envisagé de quitter le pays ?

Nous sommes toujours en recherche de solutions. Il n'est pas question pour nous de partir... On s'oriente de toute façon vers un collège de personnes privées susceptibles de nous apporter un soutien financier personnalisé, et de nous accompagner avec pragmatisme dans cette phase stratégique de notre développement.

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