L’étonnante embellie Dupont-Aignan<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
L’étonnante embellie Dupont-Aignan
©ALAIN JOCARD / AFP

Vent en poupe

Malgré un été difficile, le candidat de "Debout la France connaît un score très honorable dans un sondage IFOP pour le Figaro de ce 18 décembre. Entre des Républicains en plein doute et un FN moribond, le député souverainiste peut-il attirer un nouvel électorat ?

Jean-Philippe Moinet

Jean-Philippe Moinet

Jean-Philippe Moinet, ancien Président de l’Observatoire de l’extrémisme, est chroniqueur, directeur de la Revue Civique et initiateur de l’Observatoire de la démocratie (avec l’institut Viavoice) et, depuis début 2020, président de l’institut Marc Sangnier (think tank sur les enjeux de la démocratie). Son compte Twitter : @JP_Moinet.

 

 

Voir la bio »

Atlantico : Dans un sondage IFOP pour le Figaro de ce 18 décembre, Nicolas Dupont-Aignan réalise un score de 6 points alors que les LR de Laurent Wauquiez ne réalisent que 12% des votes et que le Front national s'affiche à 17%. Suite à un été difficile découlant de son rapprochement avec le FN, aussi bien condamné sur le fond que victime collatérale du débat de Marine Le Pen, comment expliquer ce fort rebond du candidat de "Debout la France" ?

Jean-Philippe Moinet : Une partie de la droite "souverainiste" se retrouve peut-être dans l'option "Debout la France" de Dupont-Aignan, mais 6% d'intentions de vote ne font évidemment pas une dynamique spectaculaire. D'autant que ce parti est situé dans une sorte d'impasse tactique, en termes d'alliance. Après s'être brûlé les ailes dans l'aventure d'une alliance saisonnière avec le FN de Marine Le Pen, Nicolas Dupont-Aignan semble plus isolé que jamais. Une alliance avec LR de Laurent Wauquiez entrerait en pleine contradiction avec ce que Nicolas Dupont-Aignan a toujours prétendu incarner : une indépendance vis-à-vis du mouvement de Nicolas Sarkozy qui, à ses yeux, a toujours incarné un "européisme" qu'il exècre. Le relatif "rebond" de ce petit parti, coincé entre le FN et LR, s'explique par l'attrait d'une partie de la droite conservatrice et "souverainiste", qui ne veut pas basculer dans le vote lepéniste.

Ce qui me semble plus spectaculaire dans ce sondage Ifop pour Le Figaro, c'est le faible niveau d'intentions de vote que recueille Laurent Wauquiez: à 12%, son niveau est de 8 points inférieur au score du premier tour de François Fillon, ce score qui était présenté à LR comme un socle incompressible de la droite libérale et républicaine. La chute est brutale.

Peut-on imaginer que Nicolas Dupont Aignan puisse rééditer la performance de la liste Pasqua-Villiers en 1999, qui était parvenue à se hisser devant la liste Sarkozy, dès lors que Philippe Seguin eut jeté l'éponge ?

On peut imaginer beaucoup de choses, dans le processus actuel de décomposition/recomposition du paysage politique, amorcé au printemps dernier et qui n'a pas fini de provoquer ses soubresauts. Mais Dupont Aignan ne semble pas être la figure charismatique et crédible attendue, même à la droite de la droite. Son aventure, non assumée, avec Marine Le Pen a sérieusement affaibli ses positions. On ne voit pas, même en récupérant un Florian Philippot, quel vaste espace il serait en mesure de conquérir. Le seul atout qu'il a, par rapport à Laurent Wauquiez qui risque d'être mis en difficulté sur ce thème, c'est la cohérence idéologique: contrairement au Président de LR, le Président de "Debout la France" n'a pas changé, lui, ces dix dernières années, de positions sur l'Europe. Nicolas Dupont Aignan se plaira d'intenter à Laurent Wauquiez un procès en opportunisme politique. Ce qui sera relayé, à la fois au FN, et chez les "constructifs" ou les centristes qui avaient connu un Wauquiez pro-européen assumé il y a encore quelques années.

Dans quelle mesure Nicolas Dupont Aignan peut-il être en train d'attirer certains déçus du FN, des cadres notamment qui ne croient plus en Marine Le Pen, mais également d'électeurs LR fatigués du procès en droitisation de la ligne Wauquiez ?

L'état comateux du FN de Marine Le Pen est, en effet, à terme, une grande inconnue des prochains scrutins, notamment du prochain, celui des européennes de juin 2019. Le parti d'extrême droite va-t-il se maintenir à un niveau relativement élevé ? Où va-t-il subir, par lassitude de ses troupes, une lente mais irrésistible érosion faisant dire à l'électorat nationaliste qui avait fait le choix Le Pen qu'il faut désormais se tourner vers de nouveaux visages et un nouveau mouvement ? Cette chute lepéniste, encore très hypothétique, serait une deuxième opportunité pour le petit parti Debout la France et une éventuelle alliance durable Dupont Aignan-Philippot, après la première opportunité, qui réside dans l'affaiblissement visible du "bloc" Wauquiez, révélé par ce sondage Ifop pour Le Figaro. Dans le cas d'une érosion lepéniste, Dupont-Aignan peut attirer certains électeurs déçus du FN et son manque manifeste de perspectives. Mais le Président de Debout la France a encore de gros progrès à faire pour "populariser" son image et son discours. Il apparaît davantage comme un notable propret que comme un bateleur populiste, audible pour les gros bataillons électoraux du FN, qui se trouvent dans les catégories défavorisés de la population. La révolution populaire Dupont Aignan, de ce point de vue, ne semble pas vraiment en marche !

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !