Jalousie : pourquoi se comparer aux autres n'apporte rien et peut même nous détruire <!-- --> | Atlantico.fr
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La force mentale consiste à rejeter toute idée d’égalité entre individus.
La force mentale consiste à rejeter toute idée d’égalité entre individus.
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Bonnes feuilles

Comment trouver l'énergie cérébrale nécessaire pour dominer les déceptions, la tristesse et les difficultés de la vie ? L'auteur Jacques H. Paget donne des réponses. Extrait de "Le pouvoir de la force mentale" (2/2).

Jacques H. Paget

Jacques H. Paget

Avocat de formation, expert en négociations et conférencier international, Jacques H. Paget possède une solide formation sur l’illusionnisme. Conseiller auprès des dirigeants d'entreprises sur les principes psychologiques de persuasion utilisés en illusionnisme de haut niveau, il l'auteur du Pouvoir de l'illusion. Les clés de votre réussite (Plon, 2005), Les Grands Secrets du monde de l'illusionnisme (Eyrolles, 2005), Comment persuader les autres dans toutes les situations (Leduc.s Editions, 2012) et du Pouvoir de la force mentale. Les clés d'un moral d'acier (Plon, 2013).

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La montée du matérialisme et de la consommation a favorisé l’ampleur des frustrations par un sentiment très ancré en nous : la jalousie.

Par l’intermédiaire des médias, des relations sociales et des moyens de communication, les citoyens d’aujourd’hui passent une partie importante de leur temps à s’observer les uns les autres. Et à se comparer. Pourquoi le voisin a- t-il une voiture plus grosse que la mienne ? Pourquoi sa femme est- elle plus belle que la mienne ? Pourquoi lui et pas moi ? De manière indirecte, la comparaison implique une jalousie pour tout ce que je n’ai pas et que je devrais avoir. Sentiment fortement renforcé par l’idée qu’un des grands principes républicains émanant de la Révolution française, l’égalité, est ainsi bafoué.

Si nous sommes égaux, il n’est pas normal que nous n’ayons pas la même chose que les autres. Et voilà comment naissent des pensées terriblement négatives.

Pour se débarrasser définitivement l’esprit de ce sentiment qui contrarie l’accès à la force mentale, il faut comprendre d’où vient l’erreur que nous commettons. En premier lieu, il importe de cesser de se comparer en permanence à ceux qui nous entourent. Car comparaison n’est pas raison. C’est même plutôt le point de départ de la folie. Elle implique une envie d’égalité qui n’est en elle- même qu’une illusion. Le principe d’égalité provient historiquement de concepts issus de la francmaçonnerie, organisation centrée sur le savoir, née en Ecosse d’une résurgence de l’ordre des Templiers venus de France, et détenteurs notamment des connaissances en architecture permettant de bâtir les cathédrales. D’où le terme « franc- maçon ». La notion d’égalité concerne à l’origine l’équilibre des pouvoirs fondamentaux, guerriers, religieux et sorciers, constituant toutes les organisations sociales, égalité des pouvoirs politiques chère à Montesquieu dans son traité, l’Esprit des lois. Toujours l’esprit. Les révolutionnaires de 1789, fortement influencés par la franc- maçonnerie, reprennent le terme d’égalité pour l’appliquer aux individus dans leurs devoirs envers la nation, les impôts et la loi, dans un objectif d’équité citoyenne, pourrait- on dire.

En aucun cas il n’est question d’une égalité entre les citoyens eux- mêmes. Car l’inégalité est inhérente à l’humanité : il n’y a pas deux êtres humains semblables, si l’on exclut, bien sûr, les jumeaux. Et c’est précisément de la variété des personnes que provient la richesse d’un peuple. Il est essentiel de cultiver ses différences. Et d’éviter les ressemblances et les similitudes. Ne cherchons pas à nous imiter, à vivre de la même manière, à posséder les mêmes choses et à avoir les mêmes aptitudes. C’est au contraire de la diversité des individus, de leurs comportements et de leurs idées que peuvent surgir des créations nouvelles qui seront le moteur de développement de tout groupe social, qu’il soit un clan, une entreprise ou un pays. La richesse du monde actuel repose justement sur la variété d’individus et des inégalités qui leur a donné l’envie de créer de quoi rééquilibrer ces différences.

En cherchant à créer artificiellement une égalité qui n’existe pas et n’est pas profitable, on commet beaucoup d’erreurs, et ces erreurs recréent un sentiment d’inégalité. Rappelons- nous le discours de ce chef d’Etat prononcé devant les élèves de l’Ecole polytechnique sur « l’égalité des chances » ! L’incongruité de la situation est énorme : un juriste va exposer aux plus brillants cerveaux scientifiques de la nation l’idée selon laquelle il va mettre en place une égalité des chances ! Alors que tous les mathématiciens du monde savent que la chance est par définition inégale puisqu’on ne peut la prévoir, la maîtriser et donc la contrôler. Nous ne sommes même pas égaux devant la mort puisqu’elle survient, selon les cas, à des âges bien différents. Certains auront donc passé plus de temps à vivre que d’autres.

Si l’égalité des chances était possible, tout le monde devrait au moins gagner une fois dans sa vie à l’Euro Millions. Lorsque l’utopie sur une simple idée comme l’égalité est véhiculée au plus haut niveau d’un Etat, il n’est pas étonnant que ses citoyens soient plongés dans l’illusion qu’elle puisse exister et donc frustrés de voir leur croyance déçue.

Voilà bien l’absurdité de notre société occidentale, qui prône l’égalité mais ne valorise que la réussite en faisant bien sentir à chacun que « si tu n’es pas le meilleur, tu ne vaux rien ». L’émission de télévision diffusée dans tous les pays et intitulée « La France a un incroyable talent » en est la manifestation évidente. Un jury de seulement trois personnes, censées incarner de manière artificielle une réussite autoproclamée, juge avec une sévérité frôlant le sadisme, et des paroles souvent très blessantes, des personnes venues espérer dans leur propre réussite. Mais il n’y aura finalement qu’un vainqueur qui aura l’illusion d’avoir réussi puisque tous les autres seront bons à jeter. Quel monde ! Et nous appelons cela l’humanité… La force mentale consiste par conséquent à rejeter toute idée d’égalité entre individus afin de ne pas tomber dans l’envie que l’autre soit l’égal de soi- même, forme suprême de l’orgueil puisqu’on se considère alors comme une référence.

La notion d’égalité conduit parfois certains à penser que si le fils du voisin est devenu médecin, le mien aussi doit être médecin, même s’il n’est pas fait pour cela. Les parents espèrent souvent pour leurs enfants la réussite qu’ils n’ont pas pu avoir. Et c’est catastrophique. Pour l’enfant concerné, pour les futurs patients de ce médecin malgré lui, cher à Molière, et pour la société dans son ensemble qui sans cela eût peut- être gagné un remarquable sportif, plutôt qu’un énième disciple d’Hippocrate. La force mentale, c’est aussi savoir résister aux idées reçues souvent bien ancrées dans les mentalités. Le principe en a déjà été dénoncé en son temps par Flaubert qui, dans son célèbre Dictionnaire des idées reçues, voulait faire comprendre que toute acceptation d’une affirmation sans sens critique et sans analyse conduit fréquemment à admettre pour vraies des absurdités.

Celui qui dispose d’une véritable force de caractère construit sa vie sans envier quiconque et surtout sans chercher à copier ni imiter qui que ce soit. Il se concentre sur ses propres capacités et cultive son originalité sans espérer être l’égal de personne. Et sans souhaiter que personne ne lui ressemble, tant il a conscience de ses imperfections. Nous voyons ici que l’absence de vanité dont nous parlions précédemment est fondamentale pour ne pas être tenté d’imposer sa personnalité à ceux qui ne le souhaitent pas. La force mentale consiste aussi à résister à la tentation vaniteuse de vouloir transformer les autres, vouloir que les autres soient le reflet de notre propre valeur. Car ce n’est pas que tout le monde soit égal qui nous importe le plus, mais le fait que les autres soient égaux à soi.

Comment peut- on imaginer que cette égalité soit source de satisfaction ? L’égalité n’est pas exactement la bonne réponse aux difficultés. Nous en voyons fréquemment toute l’illusion : on peut affirmer que « tous les hommes sont égaux en droits », alors qu’il suffit de suivre quelques procès médiatisés pour entendre les commentateurs terminer presque toujours leurs chroniques sur le verdict en rappelant que « Selon que vous serez puissant ou misérable les jugements de cour vous rendront noir ou blanc… », extrait de la morale de la fable de La Fontaine Les Animaux malades de la peste, dans laquelle l’âne est finalement condamné alors qu’il est le moins coupable d’entre tous. L’inégalité de conditions, de traitement, d’estime entre individus est inhérente à la nature humaine : il y aura toujours des petits, des grands, des gros, des maigres, des beaux, des laids, des gens talentueux et d’autres pas, des riches et des pauvres, des gens intelligents et des gens stupides. La bonne tournure d’esprit, à l’égard des autres, consiste pas à ne pas les envier en aucune manière et à ne pas souhaiter qu’ils nous ressemblent. Mais à être spectateur du « Grand théâtre du monde », si bien décrit par le dramaturge espagnol Calderón de la Barca, et d’apprécier chacun pour ce qu’il a de spécifique et de particulier, même dans ce que l’on pourrait considérer comme des défauts, qui ne sont en fait que des caractéristiques originales. En ne cherchant pas l’égalité entre vous et les autres par un jugement comparatif, vous admettrez totalement que les autres ne soient pas comme vous. Et ce n’est que dans cet état d’esprit que vous pourrez les trouver réellement intéressants. Puisqu’ils sont différents.

Concluons ce chapitre sur l’envie et la jalousie par cette maxime de La Rochefoucauld : « Il y a dans la jalousie beaucoup plus d’amour- propre que d’amour. » C’est- à- dire toujours plus d’égoïsme que de générosité.

 Extrait de "Le pouvoir de la force mentale" (Plon), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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