Impôts : La France a besoin d’autre chose que du populisme fiscal que propose le gouvernement <!-- --> | Atlantico.fr
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Gabriel Attal a présenté la plateforme En avoir pour mes impôts permettant d'en savoir plus sur la réalité de l'utilisation de l'argent public.
Gabriel Attal a présenté la plateforme En avoir pour mes impôts permettant d'en savoir plus sur la réalité de l'utilisation de l'argent public.
©Pascal GUYOT / AFP

Politique budgétaire

Le gouvernement a lancé la plateforme En avoir pour mes impôts pour aider les contribuables à estimer la valeur des services publics accessibles gratuitement. Une consultation a aussi été lancée. Les citoyens sont invités à donner leur avis sur l'utilisation des impôts et sur les domaines où il faudrait dépenser plus ou moins.

Les Arvernes

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.

Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.

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Alors que la campagne fiscale de déclaration des revenus bat son plein, le Gouvernement lance une consultation « En avoir pour ses impôts ». Conscient du recul drastique du consentement à l’impôt (bonnets rouges, gilets jaunes, pigeons…), il recueille l’avis des contribuables sur nos finances publiques. Cette approche, de pure communication, ne mènera à rien, alors que la situation des comptes publics s’aggrave de jour en jour. Une autre politique budgétaire doit être assumée sans attendre.

L’illusion participative

« En avoir pour ses impôts » a pour objet de faire la pédagogie du coût des politiques publiques et de consulter sur nos finances publiques.

Toutefois, consulter de manière participative sur le consentement à l’impôt est illusoire. Le cœur du sujet est donc la performance déclinante des services publics. L’éducation nationale s’effondre (PISA), l’offre de soins aussi comme en témoigne le temps d’attente aux urgences… La performance de notre politique budgétaire elle-même diminue avec la hausse vertigineuse de la charge de la dette (+30 Md€ d’ici 2027). La Cour des comptes souligne une forte augmentation des dépenses « ordinaires » en 2022 (+ 66 Md€) malgré le reflux des dispositifs d’urgence sanitaire et de relance. Signe la gestion dégradée des finances publiques, Bercy n’a pas été capable de présenter dans les délais la loi de règlement de 2021 finalement adoptée avec un an de retard. 

Ce n’est pas une approche participative du budget qui apportera les solutions. La solution du « plus de dépenses » qui en résultera inéluctablement n’est pas compatible avec le « trop d’impôt ». 

Seul le rétablissement de la performance de la dépense publique répond à cette équation impossible. Ces gisements de productivité sont parfaitement documentés et n’appellent pas une énième convention mais supposent une véritable ingénierie.

Or nous n’avons plus de politique budgétaire. La République des CERFA et des plans qui s’incarne désormais dans la « planification écologique » explique une large partie de la sur-dépense. Elle a conduit à la croissance exubérante d’administrations grevée par des coûts de coordination et une complexité fatale. La sur-bureaucratie embolise les processus, augmente les effectifs et dégrade la performance du service. A cela s’ajoute enfin la « République des chèques » (chèque énergie, chèque vélo, pass culture…) en première ligne de la politique anti-inflation. Sur ces 3 chantiers (sur-régulation, sur-bureaucratie, sur-providence), rien n’a été engagé de sérieux depuis 10 ans conduisant à dégrader notre compétitivité fiscale, la qualité de nos infrastructures et nos indicateurs globaux. 

C’est pourquoi cette campagne « En avoir pour ses impôts » doit être prise pour ce qu’elle est : une manifestation de populisme fiscal des élites. A défaut d’agir, le gouvernement consulte pour ne rien changer. Le macronisme qui a cannibalisé le débat politique autour d’une opposition artificielle entre technocratie (le pouvoir des experts) et populisme (le pouvoir du peuple)[1] est ici en échec si bien que la technocratie devient elle-même populiste pour masquer son impasse.

Que faire ?

Pas besoin de consulter, il faut désemboliser les processus, réduire et réaffecter les effectifs, dénormer, dé-millefeuiliser. Les administrations publiques et leur direction politique ne peuvent s’exonérer d’une refondation complète. En avoir pour son argent, appelle des changements profonds dans nos choix d’intervention, notre organisation, et nos processus. 

Une autre politique budgétaire est indispensable en redessinant complètement l’action publique : différenciée, agile, digitalisée, automatisée. Cela suppose une reprise en main stratégique et professionnelle des politiques publiques. Encore faut-il vouloir et savoir gérer l’Etat. 

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, d’économistes, de chefs d’entreprise et de professeurs d’université.


[1] Théorisé par C. Bickerton et C. Invernizzi Accetti (Technopopulism: The New Logic of Democratic Politics, 2021)

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