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Il y a plus de naissances en Seine-Saint-Denis qu’à Paris désormais et voilà ce que ça changer
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Enjeux

Les statistiques de l'INSEE montrent que le nombre de naissances est désormais plus important en Seine-Saint-Denis qu'à Paris intra-muros.

Les statistiques de l'INSEE montrent que le nombre de naissances est désormais plus important en Seine-Saint-Denis qu'à Paris intra-muros. Comment ont évolué ces naissances au cours de ces dernières années, et comment peut-on l’expliquer ? 

Laurent Chalard : Effectivement, la dernière publication de l’INSEE du 30 août 2017, concernant les statistiques sur les naissances en France par département pour l’année 2016, montre que le nombre de naissances en Seine-Saint-Denis est supérieur d’un millier à celui constaté à Paris intra-muros, soit 29 065 naissances contre 28 384. Cela paraît surprenant, au premier abord, car Paris compte 600 000 habitants de plus que la Seine-Saint-Denis, en l’occurrence 2,2 millions d’habitants contre 1,6 million, témoignant d’un taux de natalité sensiblement plus élevé dans le département de banlieue.
Cette situation constitue un fait nouveau, consécutif d’un basculement récent, totalement passé inaperçu parmi les spécialistes, qui a eu lieu en 2014. En effet, jusqu’à cette dernière date, conformément à son poids démographique sensiblement moindre, le nombre de naissances en Seine-Saint-Denis était inférieur à celui de Paris intra-muros. Par exemple, si l’on remonte une vingtaine d’années en arrière, c’est à dire en 1997, alors qu’il y avait 29 744 naissances à Paris, soit un nombre à peu près équivalent à celui de 2016, par contre, il n’y en avait que 22 264 en Seine-Saint-Denis, soit sensiblement moins qu’aujourd’hui.
Comment expliquer ce basculement ? Il est le produit de deux principaux facteurs.
Le premier est la croissance de la population de la Seine-Saint-Denis, bien plus forte que celle de Paris intra-muros, qui contribue mécaniquement à augmenter le nombre de naissances dans ce dernier département, d’autant que les nouveaux arrivants sont issus de l’immigration internationale, ce qui a un impact, nous allons le voir, sur la fécondité. En effet, deuxième facteur explicatif du basculement, il existe des différences importantes de taux de fécondité entre les deux départements. En 2015, ce dernier était de 1,54 enfant par femme à Paris intra-muros alors qu’il était de 2,46 enfants par femme en Seine-Saint-Denis. Le seuil de remplacement des générations se situant à 2,06 enfants par femme en France, ces différences signifient qu’à fécondité égale d’une année sur l’autre, les naissances parisiennes diminuent mécaniquement, alors qu’en Seine-Saint-Denis, elles progressent. La plus forte fécondité de cette dernière est liée à la surreprésentation des familles d’immigrés extra-européens, en particulier originaires des pays les plus féconds de la planète (dont d’Afrique subsaharienne). Cependant, la plus faible fécondité parisienne peut aussi s’expliquer par la surreprésentation à Paris de jeunes femmes étudiantes entre 18 et 25 ans, potentiellement fécondes mais, qui n’ont dans la réalité que des enfants plus tardivement lorsqu’elles ont quitté la capitale, conduisant à baisser artificiellement le taux de fécondité parisien. 

Du point de vue de l'équipement et de l'aménagement du territoire, quelles sont les implications de ce renversement de tendance ? Cette situation est-elle prise en compte par les pouvoirs publics ?

Ce renversement de tendance signifie qu’à l’heure de la réflexion sur le Grand Paris, les investissements doivent être orientés, prioritairement et massivement, vers le département de Seine-Saint-Denis, qui concentre la croissance démographique et la jeunesse de la population. Concernant la politique du logement, il va falloir en construire beaucoup et il faudra qu’ils soient suffisamment grands pour accueillir des familles, en règle générale, un peu plus grandes que la moyenne régionale. En effet, le taux de sur-occupation des logements est beaucoup plus élevé en Seine-Saint-Denis que dans le reste de la région Ile de France, témoignant de l’inadaptation de l’offre par rapport à la demande. Concernant les équipements scolaires, si pour les écoles maternelles et primaires, l’équipement est relativement satisfaisant, par contre, pour les collèges et surtout les lycées ce n’est pas le cas. Par exemple, il y a seulement 116 lycées en Seine-Saint-Denis contre 188 à Paris. Concernant les transports en commun, la motorisation étant moindre que dans d’autres départements franciliens alors que le maillage en transports en commun est bien moins dense que dans Paris intra-muros, il convient de poursuivre la politique de construction de lignes de tramways et de métros, afin d’assurer une desserte fine du territoire, donnant accès facilement au cœur de la métropole pour tous les habitants de ce département. Sur le plan sécuritaire, qui dit jeunesse pléthorique relativement pauvre, dit risque plus important de comportements déviants, sous-entendant que les effectifs de police doivent être renforcés, en intégrant beaucoup plus de personnes issues du département.
La situation est partiellement prise en compte par les pouvoirs publics, qui ont bien compris, dans le cadre du projet du Grand Paris, qu’il fallait orienter préférentiellement les investissements vers ce territoire. On le voit dans le cadre de la politique des transports. Cependant, il existe un certain décalage entre « quantitatif » et « qualitatif ». En effet, les pouvoirs publics privilégient trop souvent le chiffre, « plus de classes », « plus de policiers », « plus de lignes de transport », à la qualité, c’est-à-dire un enseignement assuré par des professeurs motivés et expérimentés, une police de proximité reconnue et respectée par les habitants, des transports en commun propre et à l’heure. 

Quels sont également les enjeux à prendre en compte en termes d'intégration, et du défi posé par le multiculturalisme ? 

Au-delà de la question de l’adaptation de l’offre d’équipements à cette nouvelle donne démographique, l’enjeu le plus important concerne la gestion de l’immigration internationale, et plus spécifiquement extra-européenne, qui constitue les principaux flux migratoires récents. En effet, la Seine-Saint-Denis étant le principal sas hexagonal avec l’étranger, il s’en suit qu’au fur-et-à-mesure du temps sa population est, de plus en plus, composée uniquement d’immigrés extra-européens et de leurs descendants, les français de longue date comme les autres immigrés européens plus anciens ayant tendance à la quitter pour d’autres départements franciliens ou d’autres régions françaises. 
Or, le multiculturalisme de ce territoire n’étant pas assumé par les autorités publiques, qui ont toujours nié l’existence de différences entre les individus, la situation n’est pas facile à gérer au quotidien, comme le montre l’émergence de tensions entre communautés : par exemple, asiatiques contre maghrébins à Aubervilliers, ou chrétiens d’Afrique noire contre arabo-musulmans dans d’autres communes. Il va donc falloir mettre en place un réel programme d’intégration dans la société française de masses de population transplantées de l’ensemble de la planète si l’on ne souhaite pas qu’elles finissent par devenir majoritairement hostile à leur société d’accueil. En effet, les dérives actuelles, qui effraient déjà nos concitoyens, ne sont qu’un avant-goût de ce que pourrait être le futur si l’Etat français n’arrivait pas à s’adapter à la nouvelle donne démographique.

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