Il était une fois l'argent magique : bonne dette et mauvaise dette<!-- --> | Atlantico.fr
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L’endettement planétaire que nous connaissons est la manifestation concrète de la prolifération de l'argent magique.
L’endettement planétaire que nous connaissons est la manifestation concrète de la prolifération de l'argent magique.
©PHILIPPE HUGUEN / AFP

Bonnes feuilles

Jean-Marc Daniel publie « Il était une fois… l’argent magique, Conte et mécomptes pour adultes » aux éditions du Cherche-Midi. Dans le monde entier, des alchimistes modernes nous l'assurent : un « argent magique » vient de tomber du ciel. Aussi est-il devenu nécessaire de rappeler au citoyen-contribuable quelques leçons intangibles d'économie, avant de dissiper le mirage : l'annulation pure et simple des dettes publiques n'est ni réaliste, ni souhaitable – ni "rentable" ! Extrait 1/2.

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel est professeur à l'ESCP-Europe, et responsable de l’enseignement de l'économie aux élèves-ingénieurs du Corps des mines. Il est également directeur de la revue Sociétal, la revue de l’Institut de l’entreprise, et auteur de plusieurs ouvrages sur l'économie, en particulier américaine.

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L’argent magique, c’est de la dette qui croît et se multiplie dans l’actif des banques commerciales, permettant simultanément au passif des banques, qui représente les avoirs des particuliers, de croître dans les mêmes proportions. En ce moment, cet endettement est favorisé par des niveaux de taux d’intérêt très bas qui sont suscités et voulus par les Banques centrales. Quand les banques commerciales ont des doutes sur la fiabilité des prêts qu’elles ont consentis, que les emprunteurs soient publics ou privés, elles ont toujours la possibilité, dans le cadre actuel des politiques d’assouplissement quantitatif (de quantitative easing), de revendre à leur Banque centrale les prêts en question.

L’endettement planétaire sans précédent que nous connaissons est la manifestation concrète de la prolifération de cet argent magique. En quoi menace-t‑il l’économie?

Il la menace dans la mesure où il entretient un processus de substitution savamment organisée de dette publique au travail et non la multiplication d’investissements productifs débouchant sur une élévation des taux de croissance de l’économie. Cette substitution s’est amplifiée à l’occasion de la diffusion de la Covid-19 mais elle était déjà engagée avec les politiques mises en œuvre depuis la récession de l’économie mondiale survenue en 2009.

En 2019, avant l’arrivée de la Covid-19, le FMI a fourni une évaluation de l’endettement mondial fin 2017. Celui-ci était de 184000 milliards de dollars, soit l’équivalent de 2,25 fois le revenu annuel de la planète. Cette dette se partageait en 40% de dette publique et 60% de dette privée. Lors de son premier rapport sur l’endette[1]ment mondial, publié en 1950, le FMI évaluait celui-ci à l’équivalent du revenu annuel de la planète, avec une forte composante publique. Pour mesurer les problèmes que cela pose, il faut revenir sur l’utilité ou les dangers d’une dette, c’est-à‑dire définir ce que sont une « bonne dette » et une « mauvaise dette ».

Dans le chapitre précédent, nous avons assimilé la création monétaire et l’argent magique qu’elle nourrit au crédit. Repartons donc du « crédit » pour analyser l’impact de la dette. Dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, il existe un article « crédit », dont l’auteur, le juriste Antoine-Gaspard Boucher d’Argis, justifiait ainsi l’existence :

« Son effet est évidemment de multiplier les ressources du débiteur par l’usage des richesses d’autrui. »

Écrivant à une époque où l’or règne en maître, il ne peut pas concevoir que les « richesses d’autrui » puissent venir de nulle part. Ce qui est important dans son approche, c’est que le crédit, quelle que soit son origine, augmente instantanément les ressources de l’emprunteur. Ce qui détermine le partage entre la « bonne dette » et la « mauvaise dette » est l’usage que celui-ci fait de l’accroissement de ses ressources. Or il n’est pas le même pour les entreprises que pour les États car, contrairement à ce qu’affirment certains, il ne doit pas être le même. Pour parler clair, l’État n’est pas une entreprise et la dette publique n’a pas les mêmes objectifs que la dette privée. Ne pas comprendre cela a conduit à ce que le problème de l’endettement actuel se pose non seulement en termes de quantité mais aussi de qualité.

Dette privée et investissement

Concrètement, la dette privée est légitime parce que l’emprunteur s’en sert pour investir, ce qui crée de la richesse. Quand une erreur d’appréciation des entrepreneurs privés concernant leurs investissements ne permet pas une augmentation de la production, nous avons plus de monnaie pour la même production, ce qui conduit à de l’inflation.

Les autorités économiques ont entériné cela en fixant une norme d’inflation à 2%. Elles acceptent ainsi une légère dérive des prix qui est la mesure de la création inefficace de monnaie, c’est-à‑dire d’un droit à l’erreur implicite consenti aux investisseurs et à leur banquier.

Extrait du livre de Jean-Marc Daniel, « Il était une fois… l’argent magique, Conte et mécomptes pour adultes », publié aux éditions du Cherche-Midi.

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