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Hommes, femmes, la question à 1 milliard d’euros : qui est le plus intelligent? La science a des réponses
©Filckr

Egalité parfaite ?

De nouvelles études montrent que les femmes ne sont pas moins intelligentes que les hommes. Le rapport de force entre intelligence chez les femmes et chez les hommes s'est rééquilibré par rapport aux données de 1980 qui montrent qu'il y a 13,5 hommes pour une femme parmi les 1% les plus intelligents. L'éducation et le parcours de chacun joue un rôle.

Atlantico : Dans les années 1980, on comptait 13,5 hommes pour 1 femme parmi les 1% les plus intelligents, cette proportion est aujourd'hui de 3,8 hommes pour une femme. Les études réalisées ont monté que parmi les pourcentages "moins" intelligents, l'intelligence était plus équitablement distribuée entre les hommes et les femmes. Comment expliquer cette disparité chez les pourcentages les plus intelligents ? Les femmes ne peuvent-elles pas être autant des génies que les hommes ? 

Chrisitine Marsan : Il y a plusieurs facteurs qui entrent en ligne de compte.

Valorisation inégale des hommes et des femmes 

Pendant plusieurs siècles en Occident et plusieurs millénaires de par le monde, l'homme s'est décrété plus intelligent et a soumis la femme lui répétant qu'elle était moins intelligente, voire pas du tout. Rappelons-nous la fausse information qui est bien inscrite dans nos esprits, selon laquelle un concile de Macon aurait statué sur l'âme des femmes. Si l'information est fausse, l'opinion publique s'en est emparée et véhicule ce cliché depuis plusieurs siècles ayant pour effet une dévalorisation de l'intelligence des femmes comme de leur conscience.

Le XIXème siècle a été particulièrement castrateur pour les compétences des femmes et il a fallu le "combat" des suffragettes, puis des féministes pour obtenir des droits équivalents entre homme et femme. Cette inégalité de traitement a eu pour conséquence une séparation des rôles, des attributs et des compétences entre les hommes et les femmes. Ceux-ci étaient doués de raison, donc intelligents, notamment depuis les Lumières quant aux femmes, davantage sujettes aux passions et aux émotions (selon les héritiers de Descartes) ne participaient pas aux débats d'idées. Les rôles étaient bien définis, même si les cours de roi ont vu les capacités politiques se développer aussi bien chez les hommes que chez les femmes.

L'éducation de l'élite des femmes française fut longtemps entre les mains de Maison d'éducation de la Légion d'honneur, créées par Napoléon 1er et qui attendaient de leur instruction : « Élevez-nous des croyantes et non des raisonneuses2. » 

L'intelligence des femmes n'était pas la qualité que l'on attendait d'elles au XIXème siècle. Une jeune fille de "bonne famille" devait avoir les qualités d'une bonne épouse, dont celle de la soumission, qui ne se marie guère avec l'intelligence. Celle-ci conduisant souvent à avoir des avis divergents de la doxa transmise. Pourtant, c'est la finalité même de la science que de critiquer positivement les apports de ses prédécesseurs.

Effet plafond de verre

Depuis l'égalité en droit des hommes et des femmes à accéder à tout diplôme, études et métiers, la réalité est différente. Les plafonds de verre existent dans une grande majorité d'entreprises, les dirigeants ne voient pas d'un bon œil le partage du pouvoir et de ses avantages, valorisation des décisions prises, avantages financiers aux postes clés d'une entreprise (Conseil d'Administration, Comité de Direction), sans compter les effets narcissiques du prestige qui sont difficilement partageables. Alors, il est facile d'invoquer la disparité des capacités et une intelligence inégale à appréhender la complexité ou la stratégie.

Au vu des résultats aux examens de toutes les disciplines, grandes écoles, Polytechnique compris, des femmes qui réussissent partout et parfois même mieux que leurs confrères hommes, il reste le fait de dénigrer les femmes en maintenant un humour sexiste toujours largement pratiqué et jusqu'à la qualification de l'intelligence. "Les femmes ont une esprit pragmatique", lisez plutôt, sortie depuis peu des foyers, leur intelligence est celle de la maison, mais pas des sujets "sérieux" tels la stratégie, la politique, la prospective, domaine bien gardé des hommes.

Les réseaux d'influence ont aussi une hiérarchie selon que l'on est un homme ou une femme et nombre de loges maçonniques masculines continuent à tenir les loges féminines, donc les femmes, comme n'étant pas capables de penser de la même manière!

Quel rôle joue le conditionnement par la société sur cette répartition ? Les femmes sont-elles dévalorisées par leur environnement et leur propre parcours ?  Ont-elles tendances à se dévaloriser inconsciemment elle-même ? 

Cette longue répétition historique d'une inégalité de valorisation entre homme et femme et du discrédit massif des capacités intellectuelles des femmes a laissé des traces dans la psyché d'une majorité de femmes qui ont du mal à se départir du regard des hommes sur elles. Combien de fois, encore aujourd'hui, peut-on entendre d'un homme à la tribune d'une table-ronde lors d'un colloque dire à une femme publiquement qu'elle est jolie mais jamais qu'elle est intelligente! La réciproque ne s'entend jamais.

La confiance en soi a été inégalement valorisée entre hommes et femmes, d'autant que pendant longtemps une femme qui s'affirme a été qualifiée d'agressive et une femme en colère d'hystérique. Le contraire, non. Par conséquent, le conditionnement culturel et social joue pleinement dans ces disparités.

A la maison ou à l'école, l'instruction est différente selon les sexes et les rôles attendus de chacun sont différents et notamment le rapport à l'intelligence est inégal. La majorité des religions ayant également entretenu ces différences et ces valorisations différentes selon les sexes.

Si l'environnement a longtemps été défavorable aux femmes, de nombreuses lois visent à rendre cette égalité un droit et une réalité appliquée.

Ainsi, au-delà des comportements que certains hommes maintiennent (voir plus haut), les femmes sont également complices de cette inégalité en reproduisant, au travers de l'éducation, une image inférieure de la femme. Certaines mères n'encourageant pas leur fille à développer leurs capacités intellectuelles.

Comment expliquer la différence du ratio homme-femmes entre les années 1980 et aujourd'hui ? L'émancipation de la femme a-t-elle jouée un rôle ? 

La différence du ratio homme-femme visant à diminuer la différence entre les hommes et les femmes correspond aux effets des années 70 durant lesquelles les femmes se sont émancipées et ont acquis plusieurs libertés consécutives (liberté sexuelle, droit à l'avortement, pillule). Elles ont pu enfin décider de leur corps et de leur vie. Ces évolutions majeures qui ont suivi le droit de vote des femmes (1945) ont conduit à une émancipation progressive et en 1980 ces libertés n'étaient pas encore entrées dans les moeurs de toutes les femmes.

Aujourd'hui, avec presque 50 ans de recul (années 70, mai 68), plusieurs générations se sont succédées, la mixité à l'école a permis que garçons et filles se cotoient et aussi face aux études et aux enseignements. Cela a eu pour effet une démystification des uns et des autres et des résultats scolaires bien plus lissés entre garçons et filles.

Sur quoi repose l'intelligence ? Comment est-elle façonnée ? Aujourd'hui, est-il possible de distinguer un sexe qui serait "plus" intelligent que l'autre ? 

Certains continuent à mettre en avant la différence d'intelligence en fonction des sexes, mais les arguments avancées font plutôt office de bataille d'arrière-garde. La question n'est plus là, mais plutôt à savoir comment valoriser nos différentes formes d'intelligences (Howard Gardner) qui sont elles socialement valorisées ou non, évidemment dans certains contextes culturels, ces dévalorisations sont associées abusivement au sexe et en particulier aux femmes.

L'intelligence est la capacité à relier les choses ensemble pour faire émerger un sens et elle s'acquiert si l'enfant est stimulé, si sa curiosité est encouragée, si sa confiance en soi est reconnue, si ses explorations sont stimulées.

Plus un enfant, petite fille ou petit garçon, sera incité à déployer ses talents et plus il ou elle pourra manifester une intelligence de qualité (plusieurs des 9 décrites par Howard Gardner) et il deviendra mathématicien ou artiste selon son environnement, son éducation, les stimulations qu'il recevra.

Valorisons les talents de chacun, aidons les à oser être qui ils sont et chacun pourra déployer ses intelligences au delà des sexes, cultures et religions.

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