Hélène de Portes, le mauvais génie de Paul Reynaud<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Histoire
Une photographie de l'homme politique et avocat français Paul Reynaud qui était Premier ministre lors de la défaite allemande de la France en mai et juin 1940.
Une photographie de l'homme politique et avocat français Paul Reynaud qui était Premier ministre lors de la défaite allemande de la France en mai et juin 1940.
©AFP

Bonnes feuilles

Robert Schneider publie « Maîtresses et femmes d'influence, Le coeur du pouvoir depuis 1789 » aux éditions Perrin. Robert Schneider retrace d'une plume enlevée le destin de dix femmes de l'ombre qui, à une époque où le deuxième sexe ne jouait aucun rôle dans la vie publique, se sont révélées indispensables. Extrait 1/2.

Robert Schneider

Robert Schneider

Robert Schneider a été chef du service politique de L'Express, directeur adjoint de la rédaction de France Inter, puis rédacteur en chef et chef du service politique du Nouvel Observateur. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages dont, chez Perrin, Les Mitterrand, Premières dames et De Gaulle et Mitterrand.

Voir la bio »

«Je vais appeler Hélène de Portes!» Paul Reynaud sort, ce 20 mars 1940, d’une réunion avec ses principaux collaborateurs. Elle n’a débouché sur rien. Pressenti par le président Albert Lebrun pour remplacer Édouard Daladier à la tête du gouvernement, il doit rapidement constituer un cabinet de guerre, d’union nationale, issu des grands partis politiques. Mais avec qui? Personne autour de lui n’est d’accord. Alors, tout naturellement, comme avant chaque décision importante, il se tourne vers la dame de son cœur. Il a besoin d’elle, de sa présence, de ses conseils, de ses intuitions. Seulement, cette fois, elle n’est pas à son côté. Elle est à Mont-de-Marsan pour la première communion d’un de ses enfants. N’écoutant que son impérieux besoin, Reynaud appelle le préfet des Landes et lui ordonne d’affréter sur-le-champ un avion militaire pour ramener sa maîtresse de toute urgence à Paris.

Qu’en pleine «drôle de guerre », alors que la menace allemande se précise, le président du Conseil s’en remette ainsi à une femme, connue pour ses sautes d’humeur, son exaltation, ses extravagances, devrait laisser ses collaborateurs stupéfaits. Il n’en est rien! Ils savent, comme tous ceux qui approchent Paul Reynaud, les politiques, les diplomates, les journalistes, qu’il faut compter avec elle. Il l’associe à tout, lui passe tout. À un diplomate américain attendant qu’elle sorte pour commencer un entretien, Reynaud glisse : « Vous pouvez parler en sa présence, de toutes façons je lui dis tout.»

Qui est-elle donc cette jeune femme dont l’influence, néfaste, va jouer en faveur des partisans de l’armistice ? Elle est la fille de Charles Rebuffel, un entrepreneur marseillais. Issu d’une famille modeste, boursier, il parvient à intégrer Polytechnique dont il sort «X-Ponts». Il crée sa société de travaux publics, les Grands Travaux de Marseille, connue sous le sigle GTM. Grâce à l’essor de la ville, auquel il participe, Rebuffel fait de sa société l’un des plus grands groupes de BTP français.

Au début des années 1920, fortune faite, la famille Rebuffel quitte Marseille pour Paris. Hélène, la préférée de son père, est ravie. Paris! Elle va rencontrer des gens plus cultivés, plus brillants que ceux issus du milieu patronal, et surtout provincial, dans lequel elle vit. «Elle voulait forcer la porte des salons, fermée à ceux qui n’étaient pas aristocrates et qui n’occupaient pas un poste de commandement dans le pays», note le journaliste Pierre Lazareff, rédacteur en chef de Paris-Soir. La jeune Marseillaise, qui a du culot et de la repartie, réussit à intégrer celui, fort réputé, de la comtesse Marthe de Fels, dont les intimes s’appellent Paul Claudel, Jean Paulhan et Saint-John Perse, qu’elle retrouvera quelques années plus tard au Quai d’Orsay sous son vrai nom, Alexis Léger. Elle croit rêver.

Ce n’est pas chez la comtesse qu’elle fait la connaissance de Paul Reynaud à la fin des années 1920, mai chez un collaborateur de son père, Maurice Gassier. La jeune fille devient l’amie de Jeanne, la femme de l’homme politique. Et, très vite, elle s’éprend du mari. Elle n’a pas vingt ans. Il en a quarante mais en paraît dix de moins. Elle est séduite par la personnalité originale de ce petit homme trapu aux yeux narquois et au sourire malicieux. Il est cultivé, vif d’esprit, éloquent. On le dit promis à un grand avenir. Lui n’est pas insensible à la drôlerie et à l’exubérance de cette jeune fille au caractère déjà bien affirmé.

Hélène cache mal ses sentiments. Ses parents sont atterrés. Un homme marié ! Pas question. Ils éloignent leur fille, l’envoient à l’étranger et lui cherchent un mari, de préférence à particule. Le marquis de Crussol leur paraît le parti idéal. Hélas, il est amoureux et s’apprête à épouser Marie-Louise Béziers, la fille d’un marchand de poissons plus riche encore que les Rebuffel (d’où le méchant surnom dont on affublera la marquise, la «marchande de sardines qui s’est “crue sole”»!). Le père d’Hélène porte alors son choix sur le comte de Portes, vieille noblesse ariégeoise désargentée. Le mariage ? Après tout, pourquoi pas! Hélène pensait qu’il l’affranchirait de la terrible condition sociale de « “jeune fille” et qu’il consacrerait sa liberté ».

Devenue mère de deux enfants, Hervé et Anne, vite confiés à une gouvernante, elle s’ennuie en province avec un époux qu’elle juge falot. Elle décide de revenir à Paris. Son mari entre aux GTM, elle ouvre son propre salon avenue Foch. Passionnée par la politique, elle penche à droite. Comme son père, qui a mal vécu l’expérience du Front populaire, elle est conservatrice. Toulonnais d’origine, ce dernier a fréquenté des officiers de marine, traditionnellement hostiles à la perfide Albion. Ainsi, comme son père, Hélène est anglophobe.

Sachant facilement se faire des relations, elle réussit à attirer dans son salon la fine fleur de la droite : André Tardieu, Georges Bonnet, Pierre-Étienne Flandin… et Paul Reynaud. L’avait-elle oublié ? Elle ne l’avait pas revu depuis des années. Il approche la soixantaine. Mais il n’a guère changé, il fait toujours beaucoup plus jeune que son âge. Hélène et Paul tombent follement amoureux. Comme s’ils voulaient rattraper les années perdues. Ils ne se quitteront plus. En 1938, ils abandonnent leurs foyers respectifs et emménagent ensemble place du Palais-Bourbon, à deux pas de l’Assemblée nationale. Paul Reynaud paraît subjugué par sa maîtresse.

Que lui trouve-t-il? Est-il séduit par son physique ? Petite, les traits irréguliers, sans grande élégance, Hélène de Portes n’est pas ce qu’on appelle une jolie femme. Louise Weiss la voit « auréolée de cheveux bruns, ses yeux bleus trouant un visage haut en couleurs, la voix rauque, la taille agile, plus aguichante que belle ». Philippe Barrès décrit presque un laideron: «Son visage couvert de taches de rousseur, et plutôt ordinaire, était animé par des yeux clairs et perçants. Vêtue d’un tailleur quelconque et d’un chapeau assez provincial, elle n’était remarquable que par le ton décidé et presque agressif de sa voix et par la vigueur de ses mains carrées et nerveuses.» Et Lazareff note : «Un peu boulotte, les lèvres toujours un peu entrouvertes laissant voir les dents du plaisir… elle avait de beaux yeux et de belles jambes mais elle était toujours habillée sans soin, sinon sans recherche, et mal coiffée.»

Reynaud apprécie-t-il son esprit ? Elle est vive, curieuse, mais sa pensée n’a rien d’original. Ses jugements, toujours péremptoires, souvent à l’emporte-pièce, assénés avec véhémence, relèvent plus de l’instinct que de la réflexion. Alors beaucoup pensent ce qu’Alfred Fabre-Luce, homme de lettres, suggère dans son Journal de la France: la jeune femme tient Paul Reynaud par les sens. Pastichant le Tasse, le grand poète italien du XVIe  siècle, Fabre-Luce la décrit sous les traits de Clorinde, et Reynaud sous ceux de Scipion: «L’influence de Clorinde étonne encore… Une légende veut qu’elle détienne des secrets d’amour inédits… C’est le cerveau de Scipion qu’elle désire. À son sexe, elle lui accorde seulement assez d’exercices pour l’empêcher de se fatiguer avec d’autres. […] Clorinde commence sa journée par un break-fast avec Scipion. Tout en beurrant sa tartine, elle anime autour de lui le petit monde où elle circule et qu’il n’a pas le temps de fréquenter. Il écoute ses ragots d’un air grave, comme si c’étaient des rapports de police… Il finit par prendre quelques salons pour la France. Les critiques d’un jeune écrivain ou les réserves d’une dame bien-pensante font passer un nuage sur sa figure, et il change des détails de sa politique pour que Clorinde puisse lui apporter la nouvelle d’une appréciation plus favorable.»

La charge est caricaturale. Mais il est vrai que Reynaud est fou d’Hélène et que le sexe joue un grand rôle dans leur relation. N’a-t-il pas noté dans ses carnets cette phrase de Pearl Buck : « Les hommes, leurs pensées intimes sont toujours enroulées comme des serpents autour du corps de quelques femmes»? Il lui passe tout, il lui cède tout. Pas dupe de ses intrigues, souvent maladroites, de ses excès, de sa véhémence, il les met sur le compte de ses problèmes de santé. Elle souffre en effet d’une maladie de la moelle épinière qui la contraint à se faire soigner à Vienne. Et puis, il lui sait gré de lui être totalement dévouée et de lui rendre de signalés services.

S’il a obtenu de quitter la Justice, où il s’ennuyait, pour les Finances, c’est à elle qu’il le doit. À ses relations, à son entregent, à son culot. Elle est intervenue auprès de Georges Monnet, le ministre des Affaires étrangères, dont la femme, Odette, est une de ses amies d’enfance à Marseille. Elle est aussi intervenue auprès de sa rivale et amie, Marie-Louise de Crussol, la «marquise rouge ». Maîtresse de Daladier, le président du Conseil, elle tient salon avenue Henri-Martin, où elle reçoit des dirigeants radicaux. Alors qu’importe si parfois Hélène dérape et le met en porte à faux!

Ainsi, le 6 mars 1940, quinze jours avant sa nomination à la tête du gouvernement, la convie-t-il à dîner dans son appartement du ministère des Finances, avec Drexel Biddle, ambassadeur des États-Unis auprès du gouvernement polonais en Angleterre, Walter Lippman, le célèbre journaliste américain, André François-Poncet, l’ex-ambassadeur de France à Berlin, l’économiste Jacques Rueff et Roland de Margerie, officier de liaison entre le Grand Quartier général et le ministère des Affaires étrangères. Ce dernier, placé à côté d’Hélène de Portes, relate l’«insupportable conversation»: «Elle ne cesse pas un instant, d’une voix stridente, de dire du mal de mes deux chefs, le général Gamelin et Léger, de m’interroger sur eux, de me demander mon avis à leur sujet. […] Je fus frappé par sa nervosité et par la légèreté avec laquelle elle s’exprimait en public sur les affaires les plus importantes de l’État.» Ce qui horripile Margerie, ce n’est pas seulement qu’elle donne son avis sur tout devant un diplomate américain, c’est que le ministre laisse faire, la couvant «d’un regard amoureux ».

Margerie n’est pas seul à juger sévèrement l’extravagant comportement de la comtesse. Jules Jeanneney, le président du Sénat, la qualifie d’«inquiétante personne»; Georges Mandel, le ministre de l’Intérieur, de «femme infernale »; le général Spears, le représentant personnel de Churchill en France, d’«horrible femme »; Winston Churchill, de «perroquet»; André Maurois, de «grande nerveuse, de dingo »; Charles de Gaulle, de « dinde » (ajoutant, il est vrai, «comme toutes les femmes qui font de la politique »); et Évelyne Demey, la fille de Paul Reynaud, de «personnage encombrant et ostentatoire ».

On lui prête un grand pouvoir. À son directeur de cabinet, encore tout étonné d’avoir été convoqué par la maîtresse du président Reynaud, Daladier répond: «Mon pauvre ami, nous sommes gouvernés par une femme …» Le 6 juin 1940, l’ambassadeur des États-Unis, William Bullitt, adresse un télégramme au président Roosevelt: «Les Français qui se battent méritent mieux que d’être gouvernés par la maîtresse d’un président du Conseil.»

Elle ne gouverne pas, mais son influence est grande. Aux Finances, puis à Matignon, elle n’a de cesse d’éliminer ceux qui, autour de Paul Reynaud, veulent se battre jusqu’au bout, de promouvoir ceux qui sont favorables à la signature d’un armistice dont certains sont proches des idées de Hitler et de Mussolini. À chaque fois ou presque, ce sont ses choix qui l’emportent. Elle déteste Gaston Palewski, le directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères, qu’elle juge belliciste, et soutient son adjoint, Dominique Leca, pacifiste. Lors d’un conflit entre les deux hommes, elle appuie le second. Palewski est limogé, Leca promu à sa place. Anglophile, Alexis Léger, l’inamovible secrétaire général du Quai d’Orsay depuis 1931, prix Nobel de littérature sous son pseudonyme de Saint-John Perse, est «renvoyé comme un domestique », selon son expression. Il demande un rendez-vous à Paul Reynaud, car il veut une explication, et lui livre la sienne : il a été victime d’une campagne menée par ses proches, notamment par la plus proche d’entre eux. Le président du Conseil répond: «Je sais, je sais ce que vous voulez dire. Vous ne vous trompez pas. Mais faites-moi l’honneur de penser que d’aucune façon je n’en ai été touché.» Léger ne l’a pas cru. Il avait raison.

Qui désigner à la tête du Comité de guerre, un poste clé ? La comtesse pousse l’un de ses protégés, Paul Baudouin. Il est nommé avec rang de sous-secrétaire d’État pour qu’il puisse participer au Conseil des ministres. Lorsque Daladier sera évincé du gouvernement, le 5 juin, il fera fonction de ministre, Reynaud ayant repris le portefeuille. Directeur général de la Banque d’Indochine, Baudouin est connu pour ses prises de position favorables aux dictatures allemande et italienne. Pendant les semaines où se jouera le sort de la France, ses liens avec Hélène de Portes seront étroits. En 1948, il écrira : «À partir de mon entrée dans le ministère, je devais avoir avec elle, chaque jour, un ou plusieurs entretiens.» Il aura sur elle une forte influence. Elle était d’autant plus perméable à ses idées qu’elle détestait plus Churchill que Hitler!

À la fin du mois d’avril 1940, Paul Reynaud, terrassé par une méchante grippe, doit s’aliter. Pendant plus d’une semaine, sa maîtresse va faire mine d’exercer le pouvoir au nom du président du Conseil. Son appartement, place du Palais-Bourbon, devient une sorte de Matignon bis. Assise derrière la table de travail de Paul Reynaud, elle reçoit des ministres, des membres du cabinet, des diplomates. De temps à autre, elle se lève, entrouvre la porte de la chambre et dit: «Comment allez-vous mon petit Paul? Reposez-vous. Tout va bien. Nous travaillons.» Hélène de Portes vit intensément ce moment où elle ne se contente plus d’agir dans l’ombre.

Les événements se précipitent. Le 9 avril, l’armée allemande a envahi le Danemark et la Norvège. Le 10 mai, la Wehrmacht lance une offensive de grande envergure aux Pays-Bas, en Belgique et au Luxembourg. Hélène de Portes pousse Reynaud, enfin rétabli, à appeler Pétain au gouvernement, en tant que vice-président du Conseil. Elle pense que le prestige du vainqueur de Verdun lui sera utile en ces heures graves. Le président hésite. Il reste partisan de continuer la lutte, mais il a conscience de sa faiblesse politique. Investi avec une seule voix de majorité, soutenu par des «bellicistes» et des «pacifistes» qui n’ont rien en commun, la présence de Pétain au gouvernement pourrait l’aider à entretenir l’esprit d’union nationale plus que jamais nécessaire. D’autant qu’à en croire Leca, le Maréchal ne sera ni encombrant ni dangereux : « Avec sa petite heure de lucidité par jour», le vieil homme de quatre-vingt-quatre ans sera une « vieille potiche militaire sur la cheminée ». Va donc pour ce Pétain qu’il n’aime pas!

Le 18 mai, convoqué par Reynaud, le Maréchal se présente à son domicile à l’heure convenue, 8 heures du matin. Il a la surprise, le président Reynaud étant encore sous sa douche, d’être reçu par Hélène de Portes. Elle l’implore : «Monsieur le Maréchal, empêchez Paul de faire des bêtises.» En clair, de continuer la guerre. Pétain, pour qui les femmes n’ont rien à faire dans les affaires militaires et la politique, ne prend même pas la peine de lui répondre.

Plus l’armée allemande se rapproche de Paris, plus le comportement de la comtesse devient erratique. Son ami Leca note : «Elle s’agite comme un hanneton dans une lanterne, elle vitupère tout le monde et sait de moins en moins ce qu’elle doit souhaiter13.» Elle ne décolère pas après la nomination de De Gaulle au sous-secrétariat à la Défense et à la Guerre. Elle a tout fait pour l’empêcher, rédigeant à l’intention de son amant une note au vitriol contre celui qu’elle appelle le « grand escogriffe va-t-en guerre ».

Le 6 juin, elle fait un esclandre dans le bureau de Paul Reynaud, en présence de William Bullitt, l’ambassadeur des États-Unis. Celui-ci met aussitôt en garde le président Roosevelt: «Ce soir, Reynaud lui a interdit d’entrer dans la pièce où il venait pour vous parler au téléphone. Elle est entrée, néanmoins, et quand il lui a ordonné de quitter la pièce, elle a refusé. Je pense que vous devriez à l’avenir éviter de telles conversations, car la dame les répétera dans toute la ville en les exagérant.» Le 8 juin, la «pacifiste » se mue en passionaria patriote. Elle demande un pistolet-mitrailleur au préfet de police de Paris, pour, lui dit-elle, faire le coup de feu contre l’envahisseur à la porte de Pantin. Elle conseille à Paul Reynaud d’aller affronter l’ennemi à son côté, quitte à mourir à la tête des troupes françaises! Dès le lendemain, ce moment d’exaltation passé, elle fait le siège de son amant pour qu’il signe rapidement un armistice avec les Allemands.

La veille, c’est elle qui a accueilli le commandant Navarre, chef de la section allemande des services de renseignements de l’armée. Convoqué par le président du Conseil à son domicile, le militaire s’étonne d’être reçu par Hélène de Portes, en présence, qui plus est, d’un homme qu’il ne connaît pas. La comtesse se tourne vers ce dernier: «Mon petit Drieu, soyez assez gentil pour passer dans la pièce d’à côté.» Il s’agit de l’écrivain Pierre Drieu la Rochelle, converti aux idées national-socialistes et qui se suicidera après la Libération. Les questions posées par Mme de Portes, qu’elle lit sur des fiches, portent sur l’armée allemande, son état de préparation, son moral. Navarre s’interroge: est-ce elle qui les a écrites, ces fiches, ou est-ce le président? Puis, elle lui demande si Paul Reynaud pourrait obtenir un armistice des Allemands dans de bonnes conditions. Et sinon, qui? Il répond que le président étant perçu par eux comme inféodé aux Anglais, un grand chef militaire serait sans doute mieux vu. Fin de l’entretien. Navarre est accablé. Il écrira: «Je ne pensais pas que le gouvernement français était tombé à ce point en quenouille.»

Extrait du livre de Robert Schneider, « Maîtresses et femmes d'influence, Le coeur du pouvoir depuis 1789 », publié aux éditions Perrin

Lien vers la boutique : cliquez ICI et ICI

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !