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Hausse des troubles mentaux chez les enfants : pourquoi les adultes en sont lourdement responsables
©FREDERICK FLORIN / AFP

Déstabilisant voire destructeur

Des études menées sur la santé mentale des enfants montrent une progression importante des troubles du comportement.

Nathalie Nadaud-Albertini

Nathalie Nadaud-Albertini

Nathalie Nadaud-Albertini est docteure en sociologie de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et et actuellement chercheuse invitée permanente au CREM de l'université de Lorraine.

 

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Atlantico : Les troubles anxieux et les troubles dépressifs majeurs, qui jusqu'ici concernaient surtout les adolescents, arrivent en tête des maladies les plus fréquentes chez les enfants dans le monde. Comment expliquer ce phénomène de société ?

Nathalie Nadaud-Albertini : Les enfants subissent aujourd'hui des pressions et des injonctions parentales dont ils étaient préservés auparavant. Ces injonctions sociales de réussite, de  décider soi-même de son avenir et "d'inventer sa vie" est désormais transférée aux enfants à un âge où ils n'ont pas les outils pour assumer une telle responsabilité.

L'enfant est pris dans les attentes des parents, qui les enjoignent de poursuivre teurs rêves, leurs passions etc avant même qu'ils aient pu les définir. Avant l'adolescence, ils ont au contraire besoin de normes et de cadres.

Quelles sont les conséquences psychologiques de ces injonctions?

Ces injonctions sont en apparence bienveillantes, mais en réalité elles peuvent être assez violentes pour un enfant. Sous couvert de favoriser l'autonomie, les enfants se retrouvent seuls face à une illusion de liberté, qui par ailleurs les plonge dans une compétition accrue. On peut dire à un enfant "réussis à l'école",  mais "invente ta vie" c'est déstabilisant voire destructeur. L'enfant peut éprouver un sentiment d'échec et de culpabilité, qui sont des facteurs déclenchants de dépression. Ils peuvent également réagir en retournant cette violence psychique contre eux-mêmes et contre les autres.

Ces injonctions sont une nouvelle norme, mais existe-t-il des enfants plus aptes à y faire face?

Les catégories sociales et le métier exercé par les parents comptent pour beaucoup. Or ces facteurs sontrendus invisibles par l’injonction « invente ta vie » qui fait comme si les différences de ressources économiques, sociales et culturelles n’existaient pas. Tout ce qui peut entraver et contredire cette soit-disante liberté de choix est rarement pris en compte par les parents, qui au contraire voient dans leur enfant un prolongement d'eux-mêmes et de leur réussite. On peut être bon élève en venant d'une famille modeste mais inventer sa vie, développer ses passions etc, c'est autre chose .Les enfants ne sont pas égaux dans "l'invention de leur vie", qui  implique la confiance en soi et une certaine aisance sociale

Ceux qui ne sont pas aidés par leur milieu ne sauront pas vers qui aller, et se méfient en général des institutions. Les parents devraient leur apporter ces informations mais ils ne le font pas, pensant qu'il faut encourager l'autonomie de leurs enfants…

Comment les enfants parviennent-ils à se protéger de ces demandes anxiogènes?

Il faut pouvoir s'échapper, rêver, s'ennuyer …L'imaginaire est indispensable mais souvent ils sont privés de ce temps d'enfance nécessaire pour se construire, justement. Il faut leur laisser l'espace et le temps pour développer leurs envies et le désir de se projeter, au lieu de les solliciter en permanence à travers de multiples activités censés déclencher une vocation. 

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